RENCONTRE — BISHUN RAMJOORAWON, 51 ANS: Souillac, un patrimoine sous l’oeil d’un historien

Bishun Ramjoorawon, 51 ans, passionné d’histoire, nous livre le récit de son village natal. Deputy Rector du collège Thanacody, il reste humble malgré son degré en histoire, son diploma en économie, son parcours politique en tant que conseilleur du village avec six mandats consécutifs ou encore son lien de parenté avec le Premier ministre. Gros plan sur cet homme pour qui l’histoire de Souillac n’a aucun secret.
Assis sur une chaise, cigarette à la main, Bishun Ramjoorawon médite sur l’angle avec lequel il va débuter sa narration. Comme imprégné par le passé, il entame avec le tout premier « gouvernement » qu’a connu Maurice. Il raconte comment pendant cinq ans les Français n’étaient pas là car « ils ont peut-être pensé que les Hollandais retourneraient. » En 1721, les Français colonisent Maurice définitivement. C’est là que nous pouvons avancer que nous avons eu le tout premier « gouvernement », dit-il.
Il s’arrête un instant, le temps d’expliquer qu’au temps des Hollandais il n’y avait pas vraiment de gouvernement. Il avance toutefois que les Hollandais recevaient des mots d’ordre de leur mère patrie mais « n’étaient pas considérés comme un gouvernement comme tel. » Il s’étend alors sur la compagnie des Indes. Comment il y a eu plusieurs gouverneurs à cette époque, mais celui qui marqua l’histoire fut Bertrand François Mahé de La Bourdonnais, « qui a à son actif le port, la Government House, entre autres. »
Le deuxième gouvernement fut le « gouvernement de la couronne » ou encore « gouvernement royal ». Il soutient alors que le gouverneur qui a marqué l’histoire à cette époque était François Vicomte de Souillac, qui a d’ailleurs donné son nom au village. Il ne manque pas de souligner que c’est le seul gouverneur qui a « le sang royal ». C’est le seul à cette époque qui avait le titre de Vicomte.
Bishun Ramjoorawon conte comment à l’époque, le Sud a accumulé un retard économique sur le reste de l’île, du fait du nombre élevé de rivières et donc des difficultés de communication. La seule solution était de construire des ponts afin de relier les villages. Chose que le Vicomte de Souillac a concrétisée à cette époque. « Bénis par les Dieux, nous avons la rivière Savanne, la plus grande rivière dans le Sud. » Le gouverneur de Souillac a constaté qu’il était possible d’accorder plus d’importance à Souillac en y construisant un port.
C’est alors que Souillac devint la capitale du Sud. Toutes les transactions passaient par le Pont de Souillac. Les colons eurent plus d’encouragement à planter la canne à sucre à grande échelle.
M. Ramjoorawon fait ressortir « que s’il n’y avait pas Souillac, il n’y aurait pas eu d’autres villages. » Il raconte comment il y aurait plus de développements s’il n’y avait pas eu la Révolution française de 1789.
Il enchaîne ensuite avec l’origine des sites connus de Souillac tel que Gris-Gris, site qui doit son nom à l’Abbé la Caille, qui avait un chien nommé ainsi. Le nom Telfair, lui, provient du propriétaire de l’usine de Bel-Ombre Charles Telfair. C’est le premier colon blanc à avoir créé une école pour les esclaves. Bishun Ramjoorawon raconte aussi pourquoi le Cimetière des marins se trouve aussi loin de l’église St Jacques. À cette époque, les Français avaient un morcellement, et cet éloignement pourrait être dû à un problème de plan de construction. Et de narrer comment malgré l’inégalité des sexes à cette époque, le plus grand chemin de Souillac s’appelle Lady Barkly ; comment l’école primaire Permal Soobrayen était jadis un cimetière… Il enchaîne avec le jumelage de Souillac de France et Souillac Maurice, qui « a eu un franc succès ; les Souillaquiens et Souillacois sont toujours en contact. »
Bien qu’il en connaisse un rayon sur l’histoire de Souillac, M. Ramjoorawon ne sait trop d’où lui vient cette passion pour l’histoire. « C’est peut-être à cause du fait que ma famille a beaucoup d’histoire. Je ne me suis jamais vraiment posé la question… »
Notre interlocuteur se lamente sur le fait que l’histoire n’a pas autant d’importance à Maurice. « À Maurice on ne reconnaît pas les historiens. Tu fais de l’histoire et t’es juste une personne cultivée. »
Pour Bishun Ramjoorawon, on devrait « tirer des leçons du passé et ainsi songer à ce que l’on peut faire pour l’avenir. » Il estime que l’histoire permet d’apprendre le bon et le mauvais côté des choses afin d’éviter de répéter les mêmes erreurs dans l’avenir.

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