SCULPTURE : Lewis Dick invité au Népal pour le World Wood Day

Le sculpteur émérite Lewis Dick, qui compte plus de 35 ans de carrière, a été invité par le gouvernement du Népal pour le World Wood Day, événement qui a lieu chaque année à travers le monde et qui s’est tenu les deux dernières années au Tanzanie et aux Pays-Bas. Cette année, le World Wood Day se tiendra au Népal du 17 au 27 mars et verra la participation de Maurice. « C’est un privilège pour moi et pour mon école de sculpture de Bambous. Pendant cinq jours à Katmandou, ce sera la célébration du bois. Huit de mes élèves ont aussi été choisis, mais il faut pour l’instant trouver des sponsors afin qu’ils puissent faire le déplacement. Je lance un appel dans ce sens. »
C’est avec un large sourire que Lewis Dick nous relate sa joie d’avoir été choisi. « Cette fierté revient à toute l’île Maurice. Chaque année, un comité international se réunit et l’école de sculpture de Bambous, dont je suis le fondateur, est reconnue internationalement. » Dire qu’au tout début de sa carrière Lewis Dick était maçon et qu’il lui était difficile de nourrir sa petite famille. Un jour pourtant, las de cette situation, il se rend sous un arbre avec une idée en tête : mettre fin à ses jours. La corde installée sous les branchages lui donne l’impression de voir dans la forme du tronc comme deux épaules, deux bras et deux jambes. Il décide alors de couper la branche de l’arbre avec laquelle il devait se pendre pour faire une poupée en bois et l’offrir à ses deux filles. La poupée était « comme dans le conte de Pinocchio », où Gepetto donne vie à un morceau de bois. C’est heureux qu’il a alors offert ce présent à ses deux filles le jour de l’an. « Les autres filles du quartier, qui avaient reçu de vraies poupées, voulaient arracher celle de mes filles. Un homme qui passait par là leur a parlé. Il a ensuite frappé à ma porte et lui aussi est tombé sous le charme de la poupée. À l’époque, j’étais endetté et je lui ai dit que, pour Rs 4 000, j’acceptais de lui vendre cette même poupée, sans comprendre vraiment ce qui se passait. » Il poursuit : « J’ai fabriqué une autre poupée en bois à mes filles, mais elles n’en ont pas voulu. Une cousine de France l’a alors achetée pour Rs 3 000. De là, je me suis reconstruit et, à mesure que je façonnais d’autres objets en bois, je gagnais de l’argent pour nourrir ma famille et pour arranger ma maison. » Et lorsqu’on lui demande s’il n’a pas à l’esprit de racheter sa toute première poupée, il répond : « J’ai essayé, mais vu qu’à l’époque je l’avais vendu Rs 4 000, somme qui représentait alors une fortune, l’acquéreur a accepté de me la revendre, mais pour Rs 200 000. C’était impossible. Mais c’est une poupée en bois dont je relate l’histoire à chacun de mes voyages. »
Lewis Dick a même été invité au grand symposium international de sculpture, en Suisse, il y a des années de cela. L’oeuvre en bois, qui lui a valu du succès dans ce pays, est un couple de vieux enlacés et des mains, au bas du tableau en bois, voulant les séparer et s’approprier leurs biens. « Une vieille dame, qui a vécu la même histoire, m’a approché pour me dire que c’est une partie de sa vie. “Le bois a volé mon histoire”, m’avait-elle dit. Cette oeuvre d’art, mise aux enchères, a rapporté au final la coquette somme de Rs 300 000. »
Dès lors, Lewis Dick comprend que les artistes sont investis d’une mission. « L’art n’a pas de frontière, il exprime une création, de l’émotion, une histoire, un vécu. La sculpture est synonyme de thérapie. » Lewis Dick semble emporté dans ce tourbillon d’émotions et invite des jeunes dans son espace. L’école de sculpture de Bambous voit ainsi le jour et compte beaucoup d’adhérents. Chaque année, il reçoit la visite de 3 000 touristes. « Je lance un appel au gouvernement pour qu’on ait notre propre fonds pour nos artistes sculpteurs. Si le gouvernement prélevait Rs 10 de taxe sur chaque touriste, cela ferait une somme colossale au final et cela pourrait constituer un premier fonds. De cette manière, on aurait pu mettre en place une vraie structure. Et d’ici 2020, la relève sera assurée dans ce domaine, engendrant ainsi la création d’emplois pour des jeunes. Les métiers de mains augurent l’avenir de demain. » Fier d’avoir été le porte-drapeau dans cette filière et d’avoir eu des retombées satisfaisantes sur le plan international, Lewis Dick espère que les huit jeunes pourront l’accompagner au Népal. « Ce sera une occasion pour eux de faire montre de leurs talents et de montrer qu’à Maurice aussi, il y a une éclosion de talents. »

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