Services financiers : the new normal

Le secteur financier mauricien et le pays l’ont échappé belle. On avait beau feindre l’optimisme, surtout depuis le passage de la délégation de la GAFI en septembre dernier, mais rien n’était définitif. La publication des Pandoras Leaks avait contribué à alimenter le suspense, car les noms d’une quinzaine de Mauriciens, dont certains avaient des placements dans les Îles Vierges, avaient pu, à un certain moment, créé un moment de doute concernant la sortie de Maurice de la liste grise du Groupe d’action financière. On comprend le profond soupir de soulagement et de satisfaction poussé par beaucoup de ceux qui avaient suivi en direct la conférence de presse du président de la GAFI, Marcus Pleyer.
Comme pour maintenir l’expectative, ce dernier avait commencé sa conférence de presse 15 minutes après l’heure annoncée. Mais le sourire devait revenir lorsque le président de la GAFI a annoncé que le Botswana et Maurice avaient été retirés de la fameuse liste grâce aux durs labeurs et à la détermination de ces deux pays, et après la “on-site visit” réussie de la délégation de la GAFI. Sa déclaration, à l’effet que « Mauritius has been removed from the list » résonnera pendant longtemps dans les oreilles de tous ceux intéressés, directement ou indirectement, par notre centre financier. D’ailleurs, peu de Mauriciens ont suivi la conférence de presse du ressortissant allemand Marcus Pleyer jusqu’au bout. D’ailleurs, son point de presse n’était pas encore terminé qu’une déclaration du Premier ministre, Pravind Jugnauth, était déjà diffusée par la MBC. De son côté, le ministre Mahen Seeruttun était aux anges dans une première déclaration au Mauricien, ce dernier affirmant que l’heure était à la célébration.
En fait, le soulagement et la satisfaction étaient à la mesure de l’importance que le secteur des services financiers a prise pour Maurice. Comme l’industrie touristique et l’industrie du voyage, le secteur des services financiers a en effet un effet multiplicateur considérable dans notre économie. L’Economic Development Board (EDB) le présente d’ailleurs comme un secteur vital pour l’économie mauricienne. Il faut dire que le secteur offshore contribue à la création d’emplois à forte valeur ajoutée. Le secteur, qui comprend les activités bancaires, emploie ainsi directement plus de 15 000 professionnels. Le nombre d’emplois directs dans les services financiers (non bancaires) au 31 décembre 2016 était, lui, de 7 257,  selon les chiffres publiés par la FSC. Il contribue de fait à hauteur de 12,1% à notre économie. Quant à sa contribution au PIB, elle est actuellement constituée de l’intermédiation financière, qui comprend essentiellement les activités bancaires et les marchés de capitaux (6,9%), les activités d’assurance (3,2%) ainsi que les leasings financiers et autres activités d’octroi de crédits (0,7%), constate l’EDB.
Le développement du secteur offshore a également entraîné une croissance substantielle des autres sous-segments de l’industrie des services financiers, ainsi que des réserves de change du pays et, surtout, de la balance des paiements. La contribution des taxes payées dans le cadre du régime offshore a dépassé les Rs 3,7 milliards en 2015 et constitue une source importante de revenus en devises étrangères pour le gouvernement. Une panne au niveau de ce secteur peut dès lors déséquilibrer durablement la balance des paiements du pays.
La crise qui a secoué le secteur financier durant 18 mois sous la pression de la GAFI avait mobilisé de manière extraordinaire toutes les intelligences du pays dans le domaine. Cela a été le cas au niveau du gouvernement, mais aussi des régulateurs, des opérateurs et du secteur privé. Les cinq recommandations sur les 40 auxquelles le pays devait adhérer étaient cruciales. Il aura fallu de nouveaux règlements, de nouvelles législations, et des changements de paradigme au niveau des institutions régulatrices.
Mais c’est maintenant que les choses sérieuses commencent. Comme le souligne le gouverneur de la BoM, Harvesh Seegolam, « il est maintenant important pour nous de veiller à ce que les mesures qui ont été mises en place non seulement restent en place, mais qu’elles soient encore améliorées ». Ce n’est qu’à ce prix que nous pourrons devenir un modèle pour l’Afrique. On se prend à rêver aujourd’hui de ce qui se passerait si la même énergie était déployée pour combattre toutes les formes de fraudes, de corruption et de gaspillage…

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