Simple question de probabilités

S’il y a un terme aujourd’hui sur toutes les lèvres, quelle que soit la sphère qui les anime – politique, économique, communauté des experts, mais aussi simples gens du peuple, comme vous et moi –, c’est bien celui de « changement climatique ». Il en aura pourtant fallu du temps pour que l’humanité, dans son ensemble, prenne conscience de son existence. Car ce dérèglement, certains – principalement dans la communauté scientifique, mais pas seulement – l’ont évoqué depuis déjà plusieurs décennies déjà, sans que l’on n’y apporte quelconque crédit. Et pour cause, puisqu’il y a 30 ou 40 ans, les hausses de températures étaient quasi inexistantes. Et ce, pour une bonne raison : le climat n’est pas l’instantané de nos actions présentes, mais de notre nocivité passée. Avec pour triste constat que même si nous arrêtions dès aujourd’hui d’émettre une seule molécule de CO2 dans l’atmosphère autre que celles que la Nature nous autorise à émettre pour nous maintenir en vie, il nous faudrait encore plusieurs décennies avant d’en mesurer les premiers bénéfices.
Pour autant, il est évident que, puisque nous en avons donc désormais conscience, nous ne pouvons rester les bras croisés à attendre que nous ayons atteint le point de non-retour, autrement dit ce moment précis où le climat basculera dans l’irréversibilité, transformant peu à peu notre Terre et la vie qu’elle abrite encore en enfer vénusien. Pour ce faire, il convient d’alerter l’opinion publique, l’équipage du « navire Terre » semblant bien plus maître de son destin que ne le sont ceux qui en tiennent normalement le gouvernail. Aussi est-il de notre devoir de rappeler, à chaque fois que nous en avons l’occasion, les dangers qui menacent l’espèce humaine et, plus généralement, l’ensemble du vivant.
Puisque les chiffres parlent bien souvent plus que les mots, arrêtons-nous un instant sur ceux publiés récemment par Météo France, et plus exactement sur ses projections en termes de hausses de températures pour l’Hexagone. Ainsi, soulignant d’emblée que « toutes les observations recueillies à l’échelle planétaire confirment une accélération sans précédent du changement climatique », Météo France élabore trois scénarios, et ce, sur la base de rapports des experts du Giec, soit sur les émissions de gaz à effet de serre maîtrisées, modérées et, enfin, non réduites. Avec des résultats, et pardonnez-nous ce jeu de mot facile, qui font froid dans le dos. Ainsi, selon le chemin que nous prendrons, les hausses de températures pourraient, d’ici la fin du siècle, soit se stabiliser autour de +1 °C (dans le meilleur des cas), atteindre +2,2 °C (formule intermédiaire) ou, si nous ne faisons rien, s’envoler à… +4,5 °C.
Inutile de dire que la France ne prend absolument pas la bonne direction en cette matière, faisant craindre le pire pour les générations présentes et à venir, notamment avec une hausse 30 à 50% des épisodes de sécheresse et autres calamités, moins facilement chiffrables, à l’instar de pluies extrêmes, d’inondations et de tempêtes. Et l’on ne parle ici bien sûr que de la France, pays bénéficiant encore d’un climat relativement tempéré et des ressources nécessaires pour faire face à ces futurs désastres. D’où la question : comment se traduiront ces scénarios dans les zones géographiques les plus exposées aux affres du changement climatique, et qui sont souvent aussi les plus pauvres ? Sans données chiffrées, et donc sans projections possibles, difficile de le dire. Si ce n’est qu’il paraît évident que certaines régions du monde déjà hostiles risquent de très rapidement devenir carrément invivables. Avec pour conséquence notamment de pousser leurs populations à chercher refuge dans les zones les moins impactées.
Ils pourraient d’ailleurs être très nombreux, certains évoquant même le chiffre d’un milliard de migrants climatiques d’ici les 50 à 60 prochaines années. Et lorsque l’on voit toute la difficulté de l’Occident, à commencer par le Vieux continent, à régler la question de quelques dizaines de milliers de migrants aujourd’hui, l’on imagine sans peine ce que la venue de plusieurs centaines de millions de personnes risque d’occasionner comme dégâts, avec la possibilité même d’assister à des guerres de territoires. À moins bien sûr que l’humanité ne reprenne d’ici là son destin en main. Probabilité, hélas, qui nous semble cette fois toute relative !

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