Spectacle pitoyable

Les Mauriciens ont eu droit cette semaine à un spectacle pitoyable digne de ces telenovela brésiliennes avec, comme acteur principal, Raj Dayal. Le député de la circonscription No 9 a fait subitement son apparition sur les écrans après avoir juré un affidavit en Cour suprême, dans lequel il affirme avoir été forcé de démissionner de ses fonctions ministérielles par l’ancien Premier ministre dans le sillage de qui est désormais connu comme l’affaire “bal kouler”. Dans le sillage de sa déclaration, il annonce un deuxième épisode, dont l’action devrait être révélée dans le courant de la semaine. Nouvel épisode hier : on croit savoir qu’il aurait donné un délai au Premier ministre, soit jusqu’à 15h, pour décider. Ce qui explique que son rendez-vous au bâtiment du Trésor sur le coup de 15h était suivi par toute la presse, qui ne voulait sans doute pas rater une seconde le déroulement de cette affaire. L’ancien ministre a maintenu le suspense à sa sortie. Ce qui indique que d’autres épisodes sont à venir. « Le Premier ministre prendra ses responsabilités et je prendrai les miennes », a lancé l’ancien commissaire de police, rappelant aux journalistes présents qu’il est « un militaire », et ce bien qu’autant qu’on le sache, il n’y a pas d’armée à Maurice. Tout ce remue-ménage de Raj Dayal a pour seul objectif qu’il retrouve son fauteuil ministériel avant la dissolution du Parlement, le 22 décembre prochain. Il a annoncé qu’il ferait d’autres déclarations à la presse, dont la seule préoccupation est de savoir s’il démissionnera ou pas du Parlement.

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À l’évidence, c’est l’autorité du Premier ministre qui est directement “under attack” et c’est vers lui que tous les regards sont tournés. Sa réaction est attendue avec intérêt par la population. La nomination ou la révocation d’un ministre relève en effet de ses prérogatives, en tant que Premier ministre, et la moindre erreur de sa part pourrait créer l’escalade dans son propre parti. Cédera-t-il ou ne cédera-t-il pas ? Dans son entourage proche, on fait comprendre qu’il n’est pas homme à se laisser faire et, surtout, à céder aux chantages, d’où qu’ils viennent. Il va sans dire que s’il cède à Raj Dayal, d’autres seront tentés de s’engager dans la même voie afin d’avoir un portefeuille ministériel, ne serait-ce que pour quelques jours.

Le Mauricien faisait état hier de l’éventualité que la “Combined Cycle Gas Turbine” était revenue en force sur le tapis et que le bureau du DPM s’apprêterait à convaincre les finances de revenir sur ses objections formelles. Tout le monde sait que le Premier ministre, qui est également le ministre des Finances, considère que les investissements publics pour la réalisation de ce projet sont trop élevés et ne peuvent être supportés dans la situation actuelle des finances de l’État. Dans l’opposition, on estime qu’il est trop tard pour mettre un projet d’une telle importance en route et qu’il est préférable de laisser le prochain gouvernement, qui sera au pouvoir avant la prochaine fête du travail, prendre une décision réfléchie.

Par ailleurs, la situation économique n’est pas brillante. Le dernier document publié cette semaine suggère que nous vivons au-dessus de nos moyens. Alors que nous nous gargarisons d’un taux de croissance de 3,9% ou de 4% et que le conseil des ministres relève les félicitations du FMI au Premier ministre, on oublie que le taux de la dette a atteint le niveau de 64%, alors que les objectifs consistent à atteindre le niveau de 60% en juin de l’année prochaine. Or, le FMI souligne que « without fiscal consolidation, the authorities dept target of 60% of GDP by FY 2020/21 is unlikely to be met ». L’institution va plus loin en observant que « rather, public dept is projected to stay elevated over the forcast horizon, with the dept outlook being susceptible to a range of macro-fiscal shocks ». Voilà qui nous fait réfléchir.

Tous ces problèmes politiques et économiques ne peuvent être traités sérieusement par un gouvernement qui est à la veille de la fin de son mandat, avec ce que tout cela comporte comme instabilité. C’est pourquoi, plus tôt les élections générales arriveront, et mieux ce sera pour le pays.

Jean Marc Poché

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