Le commerce devient le deuxième pilier économique
– Le taux d’épargne en chute libre à 9% du PIB
– L’inflation à 7,9% d’ici 2024
Dans son dernier “Macroeconomic Update”, Strategic Insight Group procède à un état des lieux de la situation durant ces dernières années. Il observe que la performance économique sur les cinq dernières années montrait déjà des signes de faiblesse, notamment dans les secteurs manufacturier, touristique et sucrier. Finalement, c’est le “Wholesale & Retail Trade” (consommation) et le secteur financier qui ont dopé la croissance du pays et la firme souligne que « we note changing dynamics in the economy over the last 12 years with the financial and insurance activities losing market share to wholesale & retail trade as the 2nd pillar of the economy ».
Les raisons à cela sont l’encouragement du gouvernement pour développer la consommation, surtout depuis ces dernières années : l’introduction du salaire minimum, la révision du PRB en 2016, la hausse considérable de la pension de vieillesse, sans oublier la propension des Mauriciens à dépenser. Il y a aussi les “high employment packages” dans les secteurs bancaire, de l’assurance et le Global Business, qui créent un nouveau « consumer segment having very decent purchasing power ».
Suivant ce développement tous azimuts du secteur de la consommation, l’épargne a drastiquement chuté. De 21,1% du PIB en 2007, le taux d’épargne est passé à 9% en 2018, observe Srategic Insight Group. « Households are depleting their savings for recurrent expenditure rather than spending on capital expenditure », a-t-on indiqué. Et cette consommation à outrance, estime le groupe, met une pression sur la croissance future et la baisse de l’épargne affectera l’investissement également. La stratégie de développement économique, axée essentiellement sur la consommation, a fait grimper les importations pour atteindre Rs 201 milliards en 2019. Au plan de l’inflation, Strategic Insight table sur un taux de 5% cette année, qui grimpera à 7,9% d’ici 2024.
C’est dans ce contexte que le pays doit désormais faire face à deux chocs, à savoir la COVID-19 et l’inclusion de Maurice sur la liste noire de l’UE pour blanchiment et financement du terrorisme. Face à ces deux chocs, le rapport estime que la croissance du pays chutera de 11% cette année (alors que le FMI estime la baisse à 6,8%). « Le redressement se fera à partir de 2021, mais à des taux de croissance inférieurs », prévient Strategic Insight, et ce selon le “new normal”.
Le groupe explique que « our economic intelligence team estimates recovery to be slow and pace of the expansion to be lower than before the Covid-19 ». Il annonce un taux de croissance inférieur à 3% de 2021 à 2024, se basant sur plusieurs facteurs, notamment les difficultés persistantes des exportations, le redressement lent dans le secteur touristique, les effets de contagion de l’impact de la COVID-19, les difficultés du secteur du Global Business, les investissements en baisse et le chômage en hausse. Strategic Insight Group precise que « depending on the extent and length of Covid-19 on our economy and main trading partners, the growth rate could be closer to the pessistic scenario.”
Déjà pour 2019, il pense que Statistics Mauritius devra revoir ses estimations de croissance à la baisse, plutôt vers 3,1%. En termes de “domestic ramifications” de la COVID-19, la note est — et sera — salée dans les mois à venir, selon le rapport : hausse considérable du nombre d’entreprises mises sous administration, hausse des défauts de paiement (“trade credit”, “financial credit”), contagion des effets de la pandémie vers d’autres secteurs à travers un effet domino, pressions inflationnistes, “supply shocks”, pression grandissante pour une dépréciation de la roupie, explosion de la dette publique du pays, effets dramatiques sur les PME, projets d’investissements reportés et un risque potentiel de “mild stagflation”.
À tous ces effets négatifs, viendront s’ajouter les effets de l’inclusion de Maurice sur la liste de pays à risques concernant le blanchiment d’argent. Et les effets de ce deuxième choc sont non négligeables : diminution de l’attrait du pays pour le Global Business, fuite de capitaux, fonds de capital-investissement qui pourraient “shifter” leurs opérations, pertes d’emploi potentielles avec effet socio-économique, les entreprises européennes ne pourront plus utiliser Maurice comme plateforme d’investissement vers l’Afrique, sans oublier les risques de réputation.