(Tirs croisés) Hausse du coût de la vie : Jusqu’où se serrer la ceinture ?

« Le petit peuple vit un véritable calvaire » et « les prix des produits de première nécessité ne cessent d’augmenter » fait ressortir Suttyhudeo Tengur, de l’APEC (Association pour la Protection de l’Environnement et des Consommateurs). Force est de reconnaître qu’au vu du contexte économique, de surcroît, avec la récente hausse du prix de l’essence, l’on peut s’attendre à d’autres escalades de prix de divers produits que n’hésiteront pas à appliquer les entreprises de distribution impactées par cette hausse du prix de l’essence.

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Mais, jusqu’où se serrer la ceinture quand le petit peuple et la classe moyenne sont déjà à la limite et ne peuvent se la serrer plus que cela ? Pour le président de l’APEC, « le moment est mal choisi pour imposer une telle hausse sur l’essence, utilisée majoritairement par de petits propriétaires de véhicules à usage personnel ».

Il rappelle que les prix des carburants sont déjà lourdement taxés par le gouvernement. « Avec le confinement, les ménages sont sous pression et arrivent difficilement à joindre les deux bouts à chaque fin du mois ». Il s’insurge de l’absence de mesures correctives par rapport aux énormes gaspillages révélés par le Bureau de l’Audit chaque année.

« Attendons le prochain budget pour voir si le gouvernement aura appris la leçon pour venir s’imposer un budget d’austérité avec en tout premier lieu, se débarrasser des huppés du pouvoir pour ensuite mettre de l’ordre dans l’écurie d’Augias ».

Pour sa part, Reaz Chuttoo, du CTSP (Confédération des Travailleurs du Secteur privé et public), réagissant face au rapport de l’Audit, estime que « le gouvernement doit s’engager à montrer qu’il a tenu compte du rapport et annoncer des mesures pour empêcher de tels gaspillages ». De plus, pour soulager le fardeau des consommateurs, « l’État doit intervenir pour soulager le peuple. L’État peut venir en aide à ce peuple qui se fait souvent arnaquer. Aujourd’hui, nombre de prix sont en hausse au supermarché. Des publicités leurrent les gens. Il faudrait un amendement de la Consumer Protection Act pour des pénalités sévères concernant les publicités mensongères » souligne-t-il.

Et d’ajouter : « le consommateur doit pouvoir filmer et envoyer sa vidéo instantanément sur une hotline. Faute d’inspecteur sur place, les consommateurs doivent être eux-mêmes des inspecteurs ! L’économiste, Kugan Parapen, lui, est d’avis que Maurice est probablement en phase d’entrer « dans une période prolongée de ce qu’on appelle une ‘Stagflation’ (stagnation et inflation), soit une économie stagnante où l’inflation est présente. C’est une des pires situations économiques dans lesquelles on peut se retrouver ». Selon lui, tout l’argent qui est allé dans les gaspillages et la corruption « aurait dû être utilisé à mettre de l’ordre dans les comptes de l’État ».

Il est d’avis que l’on ne devrait pas espérer un retour à la normale avant plusieurs années, voire même avant cinq ans. « Cela demandera la solidarité de tout un chacun et un réajustement du mode de vie. Le plus important dans une période pareille est de diminuer autant que possible le niveau d’endettement ».

SUTTYHUDEO TENGUR (APEC) : « Le petit peuple vit un véritable calvaire »

Depuis la crise sanitaire, nombre de foyers vivent une situation économique précaire causée notamment par la dépréciation de la roupie et la hausse du fret qui se répercutent sur les prix des produits de consommation. Sans compter les pertes d’emplois et réductions de salaire pour certains. Pour corser le tout, le prix de l’essence a connu une hausse de 10%. Cette hausse, est-elle justifiée ou aurait-on pu l’éviter ?

Le moment est mal choisi et le gouvernement est aussi mal inspiré pour imposer dans la conjoncture actuelle une telle hausse sur l’essence, utilisée majoritairement par de petits propriétaires de véhicules à usage personnel. Même s’il y a une légère augmentation du prix du pétrole à l’échelle mondiale, la STC aurait pu attendre la fin du confinement pour venir avec une telle mesure. D’ailleurs, les prix des carburants sont lourdement taxés par le gouvernement. Il n’y a qu’à voir la panoplie de taxes imposées par le gouvernement où les automobilistes sont littéralement saignés.

Les foudres que la STC s’est attirées dans le sillage de l’achat de médicaments et équipements durant le premier Lockdown sont encore fraîches dans la mémoire des Mauriciens, avec notamment des dépenses énormes qui auraient bénéficié à certains proches de l’hôtel du gouvernement. Maintenant que la STC vient appliquer cette augmentation, n’est-ce pas déplacé ?

Ce qui s’est passé durant le premier lockdown dans l’allocation des contrats d’achats de médicaments est et restera un très lourd passif pour le gouvernement en raison de la politique de copinage et de parachutage des proches du pouvoir à des postes clés. Et croyez-moi, cela risque de peser très lourd lors des prochaines échéances pour les élections municipales bientôt et pour la prochaine joute électorale en 2024.  Et comme pour add insult to injury, voilà que la STC revient avec ses gros sabots imposer une nouvelle augmentation sur les automobilistes. Gare au retour de la manivelle !

Alors que l’État devrait s’évertuer à pratiquer un esprit d’austérité en réduisant les gaspillages les uns plus consternants que les autres comme révélés chaque année par le rapport de l’Audit, on a l’impression que c’est davantage les ménages qui se voient imposer cette austérité au vu de toutes ces augmentations que subissent les consommateurs depuis l’an dernier. N’est-ce pas davantage l’État qui devrait se serrer la ceinture ?

Tout État devrait être un role model et gérer le pays de manière exemplaire et transparente. Or, c’est le contraire auquel on assiste : ‘Fais ce que je te dis mais ne fais pas ce que je fais’ semble être le nouveau mantra du régime. Chaque année, comme à l’accoutumée, le rapport de l’Audit met en exergue les manquements, dérapages et autres abus commis par les grands commis de l’État. Suivant la procédure normale, c’est le Public Accounts Committee présidé par un député de l’Opposition qui doit disséquer les diverses recommandations et commentaires du directeur de l’Audit où les responsables des ministères doivent s’expliquer sur ces abus. Mais, avez-vous déjà entendu des mesures correctives prises pour éviter de tels abus. Jamais ! Les années passent et se ressemblent. Et les abus et autres manquements continuent de plus belle. Avec le confinement, les ménages sont sous pression et arrivent difficilement à joindre les deux bouts à chaque fin du mois. Les prix des produits de première nécessité dont l’huile comestible, le lait en poudre, le beurre, les grains secs et j’en passe, ne cessent d’augmenter. Attendons le prochain budget pour voir si le gouvernement aura appris la leçon pour venir s’imposer un budget d’austérité avec en tout premier lieu, se débarrasser des huppés du pouvoir pour ensuite mettre de l’ordre dans l’écurie d’Augias.

Le contexte mondial étant ce qu’il est, avec par ailleurs, les vaccins coûtant une somme astronomique au gouvernement et les aides financières accordées à certains groupes fragilisés par le deuxième confinement, on présume que c’est encore les ménages qui vont devoir payer à travers les impôts et autres flambées de prix…
L’État est condamné à soutenir financièrement les groupes fragilisés et en même temps mettre à exécution le Wage Support Scheme aussi bien qu’un Support Scheme pour les PME afin d’éviter une crise sociale. Aux derniers chiffres, l’État avait déboursé plusieurs milliards. Je note cependant que certains groupes hôteliers ont bénéficié de certaines largesses de l’État, groupes qui avant le premier lockdown affichaient des profits frisant le milliard de roupies. Alors, les prix flambent, ce sera encore et toujours la classe moyenne et pauvre qui seront les plus mal servis. Toi, petit peuple dans tout ça ? Grignote ton pain noir…

L’épargne devient impossible pour encore plus de familles. Certains n’arrivent même pas à joindre les deux bouts. Quelles sont vos prévisions économiques pour les prochains mois concernant la classe des ouvriers et la classe moyenne ?
L’épargne est devenue un rêve pour la quasi-majorité de cette frange de la population. Comment épargner quand on n’arrive pas à boucler ses fins du mois ? Et surtout quand on a perdu son emploi ? Le petit peuple est en train de vivre un véritable calvaire pandémique et arrivera difficilement à se remettre sur ses jambes dans le court et moyen termes. L’avenir est très sombre.

Pour conclure ?
Depuis le 10 mars dernier, j’ai noté un « je m’en foutisme » indécent de la part de la population. Le Mauricien n’a pas encore appris la leçon de la première vague de la pandémie. On se croit tout permis mais c’est lorsqu’on devient victime qu’on réalise sa bêtise. Il y a quelques jours, 22 personnes habitant à Highlands ont été contaminées de la COVID-19. Allez comprendre pourquoi ? Est-ce que le Mauricien a besoin d’un choc psychologique pour se réveiller ? Le dernier point, c’est que le gouvernement devrait agir comme modèle dans toutes ses actions et dans la transparence. Assez de ces nominations scandaleuses et place aux compétences d’où qu’elles viennent ! Et si le Premier ministre et ses ministres acceptaient de réduire leurs honoraires disons de 10% pour la prochaine année financière, ce serait un bel exemple à suivre mais il y a loin de la coupe aux lèvres…

REAZ CHUTTOO (CTSP) : « L’État doit intervenir pour soulager le peuple »

REAZ CHUTTOO

Depuis la crise sanitaire, nombre de foyers vivent une situation économique précaire causée notamment par la dépréciation de la roupie et la hausse du fret qui se répercutent sur les prix des produits de consommation. Sans compter les pertes d’emplois et réductions de salaires pour certains. Pour corser le tout, le prix de l’essence a connu une hausse de 10%. Cette hausse est-elle justifiée ou aurait-on pu l’éviter ?

Le système que l’on a est l’Automatic Pricing Mechanism, ce qui implique que quand le prix a augmenté à l’international, ainsi en sera-t-il ici. Mais, en réalité, ce n’est pas si automatique que cela car quand le prix baisse à l’international, tel n’est pas le cas ici. En fait, on a mis un ‘price buoyancy’. Lorsque le prix d’achat de l’essence baisse, on ne le baisse pas ici, conservant supposément l’excédent pour donner des subsides quand le prix de l’essence devient trop élevé. Le comité qui décide du prix de l’essence est multipartite où sont représentées la société civile, associations de consommateurs à l’exception des syndicats. À mon humble avis, toutefois, dans un tel contexte, le gouvernement aurait dû avoir une décision politique car à part le prix de l’essence, bien d’autres prix ont augmenté. Cette hausse impactera sur la classe moyenne qui utilise l’essence. Une raison derrière cette hausse est qu’en période de confinement, l’automobiliste utilise sa voiture surtout pour des raisons professionnelles. Et, le coût du transport revient à l’employeur. C’est pourquoi il n’y a pas eu beaucoup de réactions jusqu’ici. Au déconfinement, ce sera différent. Peut-être le gouvernement prendra-t-il une décision dans le Budget à venir. Pour l’heure, c’est surtout les entreprises qui travaillent qui ressentent cette hausse. Mais, les compagnies de distribution n’hésiteront pas de passer cette hausse sur les prix de vente de leurs produits. Indirectement, donc, les consommateurs subiront cette hausse mais ne le réalisent pas.

Alors que l’État devrait s’évertuer à pratiquer un esprit d’austérité en réduisant les gaspillages les uns plus consternants que les autres comme révélés chaque année par le rapport de l’Audit, on a l’impression que c’est davantage les ménages qui se voient imposer cette austérité au vu de toutes ces augmentations que subissent les consommateurs depuis l’an dernier. N’est-ce pas davantage l’État qui devrait se serrer la ceinture ?
Vous mettez le doigt sur la plaie. À chaque publication du rapport de l’Audit, on voit la même chose. C’est comme une tradition où tous doivent accepter la situation. Lors d’une interpellation parlementaire dernièrement, on a demandé un débat autour de ce rapport. L’Opposition s’est retrouvée avec pour seule réponse : « Kifer to pa ti fer sa kan to ti au pouvwar ? ». Il est immoral que d’un côté, on révèle tous ces grands gaspillages et de l’autre, cela passe comme une lettre à la poste. Il est grand temps d’y mettre de l’ordre. Le gouvernement doit, en amont du Budget, s’engager à montrer qu’il a tenu compte du rapport et annoncer des mesures pour empêcher de tels gaspillages. Quand on analyse les rapports de l’Audit, on voit que depuis plus 15-20 ans, le Bureau de l’Audit tire la sonnette d’alarme sur certains items. Cela montre que la classe politique n’a rien fait !

Le contexte mondial étant ce qu’il est, avec par ailleurs, les vaccins coûtant une somme astronomique au gouvernement et les aides financières accordées à certains groupes fragilisés par le deuxième confinement, on présume que c’est encore les ménages qui vont devoir payer à travers les impôts et autres flambées de prix…

Définitivement. D’abord, pour soutenir les salaires dans le tourisme, cela coûte environ Rs 500 M par mois. Il y a une hausse au niveau des amendes par exemple. Quand on donne ici, il faut balancer là par des hausses sans quoi le pays coulera. En revanche, je pense que l’État peut venir en aide à ce peuple qui se fait souvent arnaquer. Par exemple, aujourd’hui, nombre de prix sont en hausse au supermarché. Des publicités leurrent les gens. Exemple : une pub parle d’une promotion sur du poulet fermier à Rs 117 les trois livres. J’ai été dans ce supermarché de Rose-Hill à 9h30 et le produit n’y était pas. En confinement, nombreux sont ceux qui ont payé un transport pour venir et ne sont pas en mesure de changer de supermarché. J’ai composé le 185 pour une plainte et on n’est pas revenu vers moi. Cinq minutes après avoir crié ma colère au supermarché, on est venu pour dire que le produit vient d’arriver… Le lendemain, j’y suis retourné pour une promotion sur des frites et la même chose s’est produite. Les commerces ont trouvé un nouveau système : faire des pubs alléchantes et ensuite on met un nombre de produits réduits et le prétexte c’est un retard dans la livraison.

Comment éviter tout cela ?

Il faut des lois sévères. Comment dénoncer des prix exorbitants quand les prix ne sont pas fixés ? Il faudrait un amendement de la Consumer Protection Act pour des pénalités sévères concernant les publicités mensongères. Il faut définir ce qu’est une pub mensongère et établir un nombre de produits que le commerçant doit vendre quand il fait une pub. Le consommateur doit pouvoir filmer et envoyer sa vidéo instantanément sur une hotline. Faute d’inspecteur sur place, les consommateurs doivent être eux-mêmes des inspecteurs !
Votre prévision pour l’avenir ?
Nous n’aurons pas une situation pire. Mais, nous virons au jour le jour. Il faut que la banque par exemple soit plus souple quand les ‘Standing Orders’ ne sont pas à l’heure car le versement de la MRA se fait avec retard. L’État doit intervenir pour soulager le peuple qui n’est pas fautif si l’État ne lui a pas versé de l’argent. Il faut plus d’interventions. Par exemple, qui payera le salaire des employés en quarantaine ? Par ailleurs, certains employeurs sont en train de fixer des comités disciplinaires comme cette grande compagnie pétrolière à Port-Louis. Cet employé n’a aucun inspecteur du travail pour le défendre ni de syndicaliste qui n’a pas de WAP encore et n’ayant pas moyen d’avoir un avocat, quel recours a-t-il ? Plus que jamais nous aurons besoin de l’intervention de l’État pour soutenir le petit peuple et la classe moyenne.

KUGAN PARAPEN (ÉCONOMISTE) : « Maurice en phase d’entrer en ‘stagflation’ »

Depuis la crise sanitaire, nombre de foyers vivent une situation économique précaire causée notamment par la dépréciation de la roupie et la hausse du fret qui se répercutent sur les prix des produits de consommation. Sans compter les pertes d’emplois et réductions de salaires pour certains. Pour corser le tout, le prix de l’essence a connu une hausse de 10%. Cette hausse était-elle justifiée ou aurait-on pu l’éviter ?

Les ménages et la société en général font en effet face à une situation extrêmement difficile, surtout ceux vivant avec des revenus limités. Si on se fie au cours du pétrole sur les derniers douze mois, on se rendra compte que le prix du baril du pétrole a plus que doublé sur la dernière année et augmenté de plus de 60% sur les trois derniers mois. Il était quand même assez difficile de ne pas répercuter cette hausse sur les consommateurs. Toutefois, quand les prix avaient dégringolé de manière vertigineuse l’an dernier, la STC n’avait pas répercuté toute la baisse sur les consommateurs. On a vu cette même tendance durant les dernières années. Ce qui explique en grande partie les profits astronomiques de la STC durant ces dernières années. Dans le contexte difficile actuellement, je pense que c’est un peu une manière indirecte pour le gouvernement de recueillir de l’argent qui sera transféré dans le Consolidated Fund comme les dernières années. La STC fera certainement cette année encore des centaines de millions de roupies de profits.

Alors que l’État devrait s’évertuer à pratiquer un esprit d’austérité en réduisant les gaspillages les uns plus consternants que les autres comme révélés chaque année par le rapport de l’Audit, on a l’impression que c’est davantage les ménages qui se voient imposer cette austérité au vu de toutes ces augmentations que subissent les consommateurs depuis l’an dernier. N’est-ce pas davantage l’État qui devrait se serrer la ceinture ?

Je pense que peu importe la situation économique, le gaspillage et la corruption demeurent problématiques car impactant négativement le potentiel économique d’un pays. Aussi bizarre que cela puisse paraître, en temps de crise, c’est à l’État de se substituer aux consommateurs et aux entreprises parce que la consommation et l’investissement est en baisse. Il faut forcément une contrebalance quelque part. C’est à l’État de venir faire du stimulus fiscal, soit d’engendrer le gros déficit budgétaire pour pallier la baisse de la demande du secteur privé et des ménages. Aux Etats-Unis, en ce moment, l’État investit des trilliards de dollars dans des plans d’infrastructure, de transition énergétique etc. A Maurice, l’État a signifié son intention d’injecter pas mal d’argent à travers le MID mais à aujourd’hui pas grand-chose n’a été déboursé. Si l’État n’arrive pas à accélérer ce processus, il est fort possible qu’on rentre dans une spirale récessionniste car le manque de demande engendrera encore plus de baisses dans la demande et cela deviendra un vrai problème.

Comment l’État peut-il générer plus d’argent?
Il n’y a pas quatre chemins. En règle générale, l’État peut faire des dettes dans les moments difficiles ou réinjecter dans l’économie pour créer de la croissance dans le futur et en espérant que la croissance qui sera créée soit supérieure à la dette générée. Le problème à Maurice est qu’on est arrivé à une limite en termes d’endettement public. Donc, s’endetter davantage aujourd’hui fait tiquer.

Comment limiter les hausses des prix sur les consommateurs ?
Il y a divers mécanismes. On doit voir si cette inflation est transitoire ou si elle est là pour rester longtemps. L’Allemagne par exemple avait pendant la seconde partie de 2020, mis un Temporary Freeze sur la TVA pour pas mal de produits. Les prix ont grimpé mais vu qu’il n’y avait plus la TVA, cela a plus ou moins équilibré les choses. À Maurice, on a diminué l’Excise Duty sur les voitures mais cela ne concerne pas les ménages vulnérables.

Qu’attendez-vous du Budget ?

Je ne vois pas comment ce gouvernement aura de la marge de manœuvre pour de gros changements économiques d’autant que Maurice vient de rentrer sur la liste noire de la Grande-Bretagne, de l’Europe et que notre système financier dépend beaucoup sur ces deux régions. On a fait des excès dans le passé. Quand l’économie allait bien, il fallait se pencher sur la réduction de l’endettement public. On ne l’a pas fait. Tout cet argent qui est allé dans les gaspillages et la corruption aurait dû être utilisé à mettre de l’ordre dans les comptes de l’État.

Vos prévisions économiques ?

Maurice est probablement en phase d’entrer dans une période prolongée de ce qu’on appelle une ‘Stagflation’ (stagnation et inflation), soit une économie stagnante où l’inflation est présente. C’est une des pires situations économiques dans lesquelles on peut se retrouver car il n’y a pas de grosse croissance économique alors que le coût de la vie augmente. La qualité de vie du Mauricien se détériorera. Ce sera une première pour nombre de Mauriciens car on n’a pas vécu une telle chose depuis les années 80. On aura une perte d’achat assez importante dans le sens où la roupie restera faible. Dans le court terme, avec une probable réouverture des frontières, il est fort possible qu’on note une légère amélioration mais on ne devrait pas espérer un retour à la normale avant plusieurs années, voire même avant cinq ans. Ce sera une période délicate mais il faudra prendre son mal en patience. Cela demandera la solidarité de tout un chacun et un réajustement du mode de vie. Le plus important dans une période pareille est de diminuer autant que possible le niveau d’endettement sans quoi on se retrouvera dans un gouffre ne pouvant joindre les deux bouts à force de devoir payer des intérêts à gauche et à droite.

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