La réforme de la pension universelle annoncée dans le budget, sans consultation préalable, suscite inévitablement incompréhension, frustration et indignation parmi la population et le monde syndical, lequel s’est lancé dans un bras de fer pour obtenir le maintien de ce qu’il considère un droit universel à 60 ans. De l’autre côté, les défenseurs de la réforme ne manquent pas de pointer un système absolument insoutenable. Entre la détresse d’un peuple accablé par la cherté de la vie face à une mesure venant le déstabiliser davantage et l’urgence économique, le dilemme est cornélien.
Si Faizal Jeeroburkhan dit comprendre la vision des actuaires sur les risques d’un système à bout de souffle, toute réforme, nuance-t-il, « doit être accompagnée d’un dialogue sincère et d’une volonté politique d’atténuer ses effets sur les plus vulnérables. » Il juge impératif que le gouvernement engage sans tarder des consultations avec les partenaires concernés en vue d’élaborer une formule équitable conciliant impératifs budgétaires et justice sociale. « Les changements proposés, absents du programme électoral, ont été imposés sans concertation préalable, ni propositions concrètes visant à réduire les salaires ou les privilèges accordés aux hauts responsables de l’État. Cette démarche a nourri un sentiment d’injustice au sein de la population. » Il estime toutefois que cette vague de déception et de colère occulte une réalité : la nécessité urgente de relancer une économie en grande difficulté.
Amit Bakhirta analyste financier et Chief Executive Officer d’Anneau, soutient pleinement la nécessité d’une réforme mais remet en question la simple modification de l’âge de départ à la retraite. « Cela ne résout pas le problème de la bombe à retardement que constitue la viabilité du système de retraite. Repousser la situation à cinq ans ne résoudra pas les problèmes sous-jacents de déficit et de viabilité des retraites. » Il recommande d’examiner le financement, les cotisations et les stratégies d’investissement afin de garantir l’équité et la viabilité de notre système de retraite à très long terme. Il questionne le Modus Operandi : « si ces problèmes sous-jacents ne sont pas traités correctement, d’ici 10 ans, faudra-t-il repousser l’âge de la retraite à 70, 75 ans, etc. suivant cette logique ? » C’est pourquoi il se penche davantage pour la réforme de l’ensemble de notre système de retraite, et non seulement l’âge de la retraite.
Avec une détermination sans faille, le syndicaliste Reaz Chuttoo, défend le droit des citoyens à une retraite digne à 60 ans. « Cette pension est un item du budget au même titre que l’éducation, la santé etc. et ces items du budget sont financés par le Tax Payers’ Money », dit-il. L’argument démographique est pour lui « un mensonge car la démographie ne réduit pas la croissance du Consolidated Fund. La population mauricienne a pu chuter à 1 million mais il y a 2 millions de personnes dans le pays.» Il ajoute qu’« il y a beaucoup de travailleurs étrangers qui ne touchent pas la pension mais qui consomment ! La taxe sur la consommation continue d’augmenter. » Il demande le gel de la réforme et des débats en vue d’étudier les possibilités de maintenir « cet aspect du Welfare State. Le gouvernement a les moyens. Dans notre mémorandum, la CTSP a soumis des mesures innovatrices en ce sens. »
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FAIZAL JEEROBURKHAN (observateur) : « L’absence de consultations socialement : une erreur »
Les actuaires et économistes poussent un ouf de soulagement face à l’annonce du report de l’âge d’éligibilité de la pension de vieillesse à 65 ans soulignant que le système n’était plus soutenable, notamment avec le vieillissement de la population, une dette publique de Rs 642 milliards, soit 90 % du PIB, et une menace de Downgrade au Junk Status par Moody’s… En tant que citoyen et observateur social et politique, quel est votre point de vue ?
En tant qu’observateur politique, je ne peux que partager le soulagement exprimé par les professionnels du secteur financier. Les chiffres qu’ils avancent sont sans appel : dans sa forme actuelle, le système de pension de vieillesse à 60 ans est devenu insoutenable. Le pays fait face à une dette publique avoisinant les 90 % du PIB. Dans ce contexte, les mises en garde répétées des agences de notation, notamment Moody’s, ne peuvent être ignorées.
À cela s’ajoutent des tendances démographiques et économiques préoccupantes : le vieillissement progressif de la population, avec un ratio passant de 2,7 travailleurs actifs pour un retraité aujourd’hui à 2,0 en 2035, la chute persistante du taux de fertilité – tombé à 1,34 en 2024 – ainsi que l’émigration croissante des jeunes professionnels.
Par ailleurs, le coût de la Basic Retirement Pension (BRP), déjà évalué à Rs 55,4 milliards, pourrait grimper à Rs 100 milliards d’ici à 2035. À cela s’ajoutent les Rs 90 milliards allouées à la protection sociale, représentant à elles seules 34 % du budget national. Enfin, les scandales de détournement de fonds publics et les turbulences économiques mondiales n’ont fait qu’aggraver la situation. Dans un tel contexte, les professionnels de la finance n’avaient d’autre choix que de tirer la sonnette d’alarme. Mais en tant qu’observateur social, je ne peux ignorer le cri de détresse de celles et ceux que cette réforme impacte directement. Leur inquiétude est légitime.
Le monde syndical décrie l’absence de consultation générale avant l’annonce de la réforme du système de pension…
Toute réforme, pour être acceptable, doit être accompagnée d’un dialogue sincère et d’une volonté politique d’atténuer ses effets sur les plus vulnérables. Il est donc impératif que le gouvernement engage sans tarder des consultations avec les syndicats, les ONG et les organisations de la société civile afin d’élaborer une formule équitable. L’enjeu : concilier impératifs budgétaires et justice sociale. L’absence de consultations sur un sujet aussi sensible socialement constitue une erreur que le gouvernement aurait sans doute pu éviter. Cependant, face à l’intransigeance de certains opposants, farouchement hostiles à toute forme de compromis, nous pouvons légitimement nous interroger sur l’efficacité qu’auraient eue ces consultations.
Car comment espérer un consensus lorsque les émotions prennent le pas sur l’analyse objective des données ? Lorsque les intérêts d’une minorité priment sur le bien-être collectif ? Lorsque les visions à court terme supplantent les enjeux de long terme ? Lorsque les considérations partisanes viennent parasiter un débat qui devrait, avant tout, servir l’intérêt général ? Et surtout, lorsque ceux responsables de ce marasme socioéconomique, sont en première ligne pour exiger le statu quo.
Beaucoup font ressortir qu’alors que l’Alliance du Changement avait conquis le cœur de la population pendant la campagne électorale en lui promettant un changement radical de l’ancien régime, sept mois seulement après avoir jeté son dévolu sur la nouvelle alliance, lui exprimant une préférence claire pour diriger le pays, le peuple ne ressent que déception et colère… Ces sentiments sont-ils légitimes ?
Ces sentiments paraissent légitimes aux yeux de nombreux observateurs. Les changements proposés, absents du programme électoral de l’Alliance du Changement, ont été imposés sans concertation préalable, ni propositions concrètes visant à réduire les salaires ou les privilèges accordés aux hauts responsables de l’État. Cette démarche a nourri un sentiment d’injustice au sein de la population.
Par ailleurs, certaines promesses électorales ambitieuses – voire irréalistes – formulées par l’alliance lors de sa campagne n’ont pas été tenues depuis son arrivée au pouvoir, il y a sept mois. Le déficit de communication autour de la réforme et l’absence d’un travail pédagogique en amont ont contribué à amplifier le mécontentement. Ce climat de frustration a atteint son paroxysme lors de la présentation du budget, alors que les attentes de la population ne cessaient de croître.
Cependant, cette vague de déception et de colère occulte en partie une réalité incontournable : la nécessité urgente de réformer la gouvernance et de relancer une économie en grande difficulté. Sous l’ancien régime, le pays a connu une dégradation accélérée sur les plans politique, économique, social, environnemental et institutionnel. La mauvaise gestion des affaires publiques, marquée par la corruption, le népotisme, le favoritisme, l’affairisme et l’incompétence, faisait régulièrement la une des journaux.
Durant cette période, la population s’était habituée à un modèle basé sur les subventions et les aides en tous genres, sans réelle prise de conscience de la détérioration des indicateurs macroéconomiques. Le pays consommait largement au-delà de ses capacités de production. Progressivement, une mentalité de dépendance et d’attente immédiate s’est ancrée dans la société. Or, ce changement d’état d’esprit, nécessaire pour accompagner le changement de régime, tarde encore à se manifester.
Les défenseurs de la BRP à 65 ans font ressortir que ce n’est que la sincérité et l’audace qui animent un gouvernement désireux de redresser le pays après les abus financiers de l’ancien pouvoir car il met sa popularité à risque. Le peuple saura-t-il comprendre les enjeux économiques ou retiendra-t-il tout jusqu’aux prochaines élections ?
Face à une conjoncture économique alarmante, le gouvernement n’avait guère le choix. Les mesures adoptées sont certes drastiques, parfois impopulaires, mais elles témoignent d’un sens aigu des responsabilités.
Dans ce contexte de mécontentement social croissant, l’exécutif serait bien avisé de lancer une vaste campagne de pédagogie et de sensibilisation autour des réalités budgétaires du pays. Une question cruciale s’impose : devons-nous désamorcer cette bombe à retardement ou laisser courir le risque de son éclatement brutal ?
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AMIT BAKHIRTA (Analyste financier) : « Repousser l’âge de la retraite ne fait que repousser le problème à plus tard »
Les actuaires et économistes poussent un ouf de soulagement face à l’annonce du report de l’âge d’éligibilité de la pension de vieillesse à 65 ans soulignant que le système n’était plus soutenable, notamment avec le vieillissement de la population, une dette publique de Rs 642 milliards, soit 90 % du PIB, et une menace de Downgrade au Junk Status par Moody’s… Êtes-vous d’accord ?
Nous soutenons pleinement la nécessité d’une réforme que nous recommandons depuis des années, sans nécessairement être d’accord avec le modus operandi proposé, notamment en ce qui concerne les nuances d’application de la réforme du système de retraite en termes d’âge.
Suite à la publication du discours sur le budget, nous notons que Moody’s a publié une déclaration soulignant les risques liés à une consolidation budgétaire rigoureuse et que le FMI, dans ses documents de consultation pour la quatrième consultation, soulève à nouveau cette question de réforme du système de la retraite.
Cependant, le pays doit comprendre que la simple modification de l’âge de départ à la retraite ne résout pas le problème de la bombe à retardement que constitue la viabilité du système de retraite.
Repousser la situation à cinq ans ne résoudra pas les problèmes sous-jacents de déficit et de viabilité des retraites.
Nous devons également examiner le financement, les cotisations et les stratégies d’investissement sous-jacentes afin de garantir l’équité et la viabilité de notre système de retraite à très long terme.
Les syndicalistes parlent d’État providence démantelé ; d’atteinte fondamentale à la justice sociale. Reaz Chuttoo déclare : « aujourd’hui, une personne doit prouver qu’elle est malade, vulnérable ou dans le besoin pour avoir accès à une pension, jusqu’ici un droit universel ». Narendranath Gopee déclare, lui, que « la pension universelle est non négociable » et parle « d’allocation symbolique qui valorise les efforts de ceux qui ont contribué au développement du pays ». Comment ces paroles résonnent-elles en vous ?
J’ai déjà brièvement partagé mon point de vue personnel et celui d’Anneau sur le sujet ces dernières semaines sur plusieurs plateformes de médias et j’éviterai donc un Bis Repetita. Ce qui, selon moi, apporterait une valeur ajoutée à ce sujet, c’est de l’approfondir, en examinant, outre les modifications relatives à l’âge, les changements proposés concernant les cotisations de la population, les travailleurs des secteurs public et privé, les travailleurs indépendants, le budget de l’État, etc. Qu’adviendra-t-il désormais de la CSG et du NPF/NSF, et notamment de leurs stratégies d’investissement, de leurs plans actuariels, etc. pour en assurer la pérennité ?
Si ces problèmes sous-jacents ne sont pas traités correctement, d’ici dix ans, il faudra peut-être alors repousser l’âge de la retraite à 70, 75 ans, etc. suivant cette logique, n’est-ce pas ? C’est pourquoi nous devons réformer l’ensemble de notre système de retraite, et pas seulement l’âge de la retraite, ce qui ne fait que repousser le problème à plus tard. Il ne le fait pas disparaître.
Reaz Chuttoo, de la CTSP, refuse catégoriquement le ciblage revendiquant la pension de vieillesse à 60 ans pour tous pour éviter d’humilier les démunis. Il propose ensuite que le gouvernement taxe les riches en retour pour récupérer l’argent. Qu’en pensez-vous ?
Suite aux récentes mesures budgétaires, je suis en profond désaccord, avec tout le respect que je dois à ce sujet. Les personnes relativement aisées, ainsi que 21 % de la population active, paient déjà une part bien supérieure à ce qui serait considéré comme « juste ». Je ne pense donc pas qu’une charge fiscale supplémentaire sur certains segments résoudra le problème sous-jacent des cotisations, de la stratégie et des rendements d’investissement, des énormes déficits des fonds de pension et de l’adéquation actif-passif.
Il est déjà très probable que la charge fiscale plus élevée aura un impact sur l’investissement et la production économique à court terme. Soyons réalistes : plus la charge fiscale est lourde, moins Maurice est attractive. Le pays est déjà mis à mal par une monnaie dévaluée et des charges fiscales plus lourdes, un marché des changes engorgé, entre autres.
Il ne faut pas oublier qu’un cran de trop et la charge fiscale devient si peu attractive que la stratégie budgétaire pourrait inciter les investisseurs et les hauts revenus à quitter notre pays. Pour une petite nation insulaire, il est déraisonnable de s’aveugler de ces risques.
Certains font valoir que cette réforme ne fait que repousser de 5 ans le fait de devoir payer les retraités. Mais qu’au bout de 5 ans, le compte reviendra au même : il faudra payer les personnes éligibles à 65 ans. Pouvez-vous nous donner une idée si l’impact de cette réforme sur l’allègement des dettes du pays sera vraiment conséquent ?
Les retraites représentent environ Rs 44 milliards des dépenses budgétaires, soit environ 22 % du budget. Il s’agit de versements effectifs et non de cotisations au NPF/NSF, etc. aux retraités.
Ainsi, même si repousser la décision à cinq ans entraîne une augmentation supplémentaire des versements, cela ne résout pas le problème sous-jacent. Il est certain que davantage de recettes, qui seraient autrement consacrées au paiement des retraites, pourraient désormais servir à rembourser en partie la dette de notre pays.
Nous estimons que ces dépenses pourraient représenter entre 0,4 % et 1,4 % du PIB par an, et donc vraisemblablement entre 2 et 3 % des dépenses budgétaires annuelles. À très court terme, elles sont négligeables du point de vue de la viabilité de la dette, mais cumulées sur 5, 10 ou 15 ans, elles deviennent significatives.
Il est important de comprendre que la réforme du système de retraite ne résout pas les problèmes d’endettement à court terme, mais plutôt ceux de la viabilité à long terme, du service des pensions et du déficit des retraites.
En conclusion ?
La rigidité doit être en harmonie avec la malléabilité. C’est cela la sagesse.
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REAZ CHUTTOO (CTSP) : « La pension : un item au même titre que l’Éducation, la Santé etc. »
Les actuaires et économistes poussent un ouf de soulagement face à l’annonce du report de l’âge d’éligibilité de la pension de vieillesse à 65 ans soulignant que le système n’était plus soutenable, notamment avec le vieillissement de la population, une dette publique de Rs 642 milliards, soit 90 % du PIB, et une menace de Downgrade au Junk Status par Moody’s… Vous qui bataillez pour que le BRP soit maintenu à 60 ans pour tous, sans ciblage, comment le gouvernement pourra-t-il continuer à financer cette pension qui représente à elle seule 25% des dépenses courantes ?
Les actuaires travaillent pour les assurances. Avec l’âge de retraite et le BRP à 65 ans, la personne sera obligée d’aller jusqu’à 65 ans. Les compagnies d’assurances auront juste huit ans pour payer la pension car l’espérance de vie moyenne à Maurice est autour de 73 ans. Plus l’âge de retraite s’en rapproche donc, plus ces compagnies font de profits.
Quant aux économistes, ils épousent la politique libérale : « The State cannot be a direct producer of goods and services ». Pour eux, l’État doit agir juste comme un facilitateur, et la production de biens et services doit être entre les mains du secteur privé. C’est ce dernier qui doit générer la croissance et pas l’État. Pour que le privé investisse, il a trois conditions : qu’il puisse prendre les secteurs essentiels qui font obligatoirement du profit ; avoir le pouvoir absolu de Hire and Fire comme dans le précédent Employment’s Act et réduire le Red Tapism Interference dans le Business (qu’ils puissent avoir les patentes rapidement ; ne pas les questionner sur leurs produits et la traçabilité).
La BRP est une malhonnêteté intellectuelle. Il ne s’agit pas d’une Basic Retirement Pension mais d’une Old Age Allowance. D’ailleurs, plus de la moitié de ceux qui la perçoivent n’ont jamais travaillé. Cette pension est un item du budget au même titre que l’éducation, la santé etc. L’éducation ou la santé peut par exemple représenter 30% du budget et ces item du budget sont financés par le Tax Payers’ Money. Les économistes aiment que l’âge soit repoussé pour réduire les Public Expenditures et l’État peut alors accorder plus d’Incentives au monde du Business. La Corporate Tax à Maurice (15%) est un des plus bas au monde de même que la Direct Income Tax.
Comment poursuivre avec ce système qualifié d’insoutenable ?
Il y a la Direct Taxation et la taxe sur la consommation. Le gouvernement parle de problème démographique qui n’a aucun lien avec la pension de vieillesse. Les couples ont moins d’enfants mais il n’y a pas moins de travailleurs dans le pays. Nous disons qu’en 2000 il y avait 9 personnes pour un pensionné et maintenant 2,5 personnes pour un pensionné. Non, il y a 2,5 Mauriciens pour un pensionné mais il y a beaucoup de travailleurs étrangers qui ne touchent pas la pension mais qui consomment ! Donc, la taxe sur la consommation continue d’augmenter ainsi que l’Income Tax. L’argument démographique est un mensonge. La démographie ne réduit pas la croissance du Consolidated Fund. La population mauricienne a pu chuter à 1 million mais il y a 2 millions de personnes dans le pays.
Pourquoi militez-vous non seulement pour ceux qui exercent un métier difficile et les invalides mais insistez pour que la pension de vieillesse soit maintenue pour tous, même les plus riches ?
Je suis totalement d’accord que les riches ne méritent pas les soutiens de l’État. Toutefois, si l’on ne donne pas aux riches, on humilierait les pauvres. Doit-on pousser ceux-ci à s’afficher en misérables pour obtenir cette pension ? Là, on a mis deux comités pour étudier par secteur et pas par métier, ce qui est déjà une erreur et une discrimination constitutionnelle. Un chauffeur de camion dans l’industrie sucrière est 3 fois mieux rémunéré qu’un autre de la zone franche. On fait la même erreur en se basant sur le secteur et non selon le métier. Le deuxième comité se penchera sur l’invalidité de la personne. Quid de celui qui n’a pas travaillé ? Aura-t-il à entrer dans le trafic d’influence pour simuler une maladie ? Donc, donnez à tous la pension qui est universelle. Après on augmente la taxe des riches par 0.5%. Ils retourneront tout le manque à gagner. Et, on n’humilierait personne.
Le monde syndical décrie l’absence de consultation générale avant l’annonce de la réforme du système de pension. Que revendiquez-vous à présent que le Premier ministre a annoncé deux comités pour examiner les modalités d’application de certaines mesures de soutien ciblées ?
Une majorité de Mauriciens ne sont pas d’accord avec cette réforme. Et que voyons-nous ? Avec l’annonce des deux comités, l’âge de la pension de vieillesse à 65 ans. Or, c’est cela la base de notre contestation. Nous ne sommes d’accord ni avec la pension de vieillesse à 65 ans ni avec le ciblage. Qu’allons-nous faire dans ces comités ?
Lors des débats budgétaires, ils ont déjà dit que la mesure budgétaire est très bonne. Avant même de s’être réunis dans le comité. Donc, il n’y a pas d’objectivité. Quand ils nous entendront, les syndicats et la société civile, pourront-ils dire que cette mesure n’est pas bonne ? Je suis un des derniers mohicans qui ai lutté depuis des années contre plusieurs tentatives de repousser l’âge de la pension de vieillesse.
En 2013, le gouvernement d’alors, à la veille des élections, décide de faire des débats parce que le NPF, créé en 1978 pour 40 ans, arrivait à terme en 2018 et il fallait donc préparer un remplacement. À l’unanimité, même les patrons ont reconnu que le NPF avait créé des Working Poor. Même des personnes dans la zone franche ayant contribué 42 ans ne touchaient que Rs 800 de pension à sa retraite. Les débats ont continué sous le nouveau gouvernement et en 2016, Lutchmeenaraidoo amende la NPF Act pour dire que les travailleurs peuvent augmenter leur contribution et non les patrons.
Nous demandons donc de geler cette réforme et d’organiser un débat large pour étudier les moyens pour maintenir cet aspect du Welfare State. Le gouvernement a les moyens. Dans notre mémorandum, la CTSP a soumis des mesures innovatrices en ce sens.