(Tirs croisés) Zaheer Allam sur les logements sociaux : « Encourager la participation du secteur privé »

Les principaux partenaires du secteur en conviennent : avec quelque 30 000 demandes pour les logements sociaux, un chiffre qui ira croissant alors que ces demandes sont loin d’être satisfaites même à moitié, le pays est en situation de crise.

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Zaheer Allam, consultant en Sustainable Futures and Urban Regeneration, estime qu’une diversité de solutions est nécessaire. Pour lui, l’offre de logements accessibles et décents ne devrait pas être la seule responsabilité du gouvernement. « Il est nécessaire d’encourager les promoteurs privés à participer. Des mécanismes incitatifs, tels que des avantages fiscaux ou des concessions de terrains, pourraient être mis en place pour encourager le secteur privé à construire des logements abordables ».

Il suggère d’encourager de nouvelles méthodes de construction à la fois moins coûteuses et plus durables. Toutefois, souligne-t-il, la qualité de vie ne dépend pas que du logement mais aussi de l’environnement immédiat. Si la mission est urgente, il se dit convaincu qu’avec un engagement commun, « nous parviendrons à la réaliser ».

D’après la NHDC, en 2021, quelque 27 000 familles nécessitaient un logement. Le gouvernement vient d’annoncer la construction de 8 000 logements sociaux au coût de Rs 2,7 millions l’unité, lesquels devraient être prêts dans 18 mois. Le chiffre est loin des 27 000 familles qui en ont besoin. Quelles solutions pour les autres familles les plus démunies pour lesquelles Rs 2, 7 millions représentent une fortune ?
Maurice figure parmi les pays avec le plus haut taux de propriétés immobilières. Ceci ne signifie pas qu’il ne faut pas intensifier les efforts, mais peut-être cela indique-t-il que nous arrivons à une étape où une diversité de solutions est nécessaire étant donné que la culture de la propriété est déjà fortement ancrée.

Il est essentiel de comprendre que la fourniture de logements abordables ne devrait pas être seulement une responsabilité gouvernementale. Il est nécessaire d’encourager les promoteurs privés à participer et à trouver des moyens innovants pour rendre ce secteur économiquement viable.

Des mécanismes incitatifs, tels que des avantages fiscaux ou des concessions de terrains, pourraient être mis en place pour encourager le secteur privé à construire des logements abordables. En outre, des programmes ou mécanismes de location-achat pourraient être une solution viable pour ceux qui ne peuvent pas se permettre un logement à Rs 2,7 millions.

Il est également crucial de revoir la planification urbaine et de promouvoir un développement urbain équilibré et inclusif. Par exemple, en veillant que les infrastructures et les services essentiels soient accessibles, et en favorisant l’intégration sociale par le biais d’une mixité sociale dans l’habitat.

Le coût de construction a augmenté par plus de 30%. La crise économique rend-il encore plus difficile l’accès à un toit décent ?
Absolument, l’augmentation des coûts de construction rend indéniablement plus difficile l’accès à un logement décent, notamment dans le contexte actuel de crise économique. Nous subissons le poids combiné de la pandémie et de son impact sur le marché mondial, ainsi que des conséquences du conflit entre l’Ukraine et la Russie.

Cependant, ces défis nous incitent à explorer de nouvelles méthodes de construction, à la fois moins coûteuses et plus durables. L’importation de tous nos matériaux de construction est coûteuse. Nous pourrions nous tourner vers des méthodes utilisant des matériaux disponibles localement ou à portée régionale. Et peut-être même revisiter certaines méthodes traditionnelles.

Je construis actuellement ma propre maison. Mon épouse et moi avons décidé de ne pas utiliser de carrelage, un choix à la fois coûteux et à fort impact en termes d’émissions de CO2. À la place, nous avons opté pour le traditionnel sali. Nous avons décidé de ne pas installer de climatisation grâce à un système de ventilation transversale efficace qui permet de maintenir une température agréable dans la maison.

Nous prévoyons également de réaliser des économies sur les coûts énergétiques grâce à une bonne luminosité naturelle, parmi d’autres stratégies. Tous ces petits éléments concourent à réduire les coûts de construction mais aussi les coûts opérationnels sur le long terme.

Que faut-il tenir en considération pour permettre aux plus démunis d’avoir un toit décent ?
Il est important de souligner que la qualité de vie ne dépend pas que du logement mais aussi de l’environnement immédiat. Il faut donc veiller que les logements soient intégrés dans des quartiers bien planifiés, avec un accès facile aux services essentiels comme les écoles, les centres de santé, et les transports publics.

Suffit-il de rendre accessible un toit décent à ces familles qui ont squatté ici et là des années durant ou faut-il encore les accompagner psychologiquement ?
L’accompagnement des familles ne doit pas se limiter à un soutien psychologique. Il doit être envisagé de manière holistique pour assurer une intégration complète et réussie des individus dans leur nouvel environnement. Cela comprend notamment l’accès à l’emploi et à l’autonomisation. Des stratégies à court terme, comme la facilitation de l’emploi, peuvent apporter un soutien immédiat.

Cependant, il est aussi essentiel d’envisager des mesures à long terme pour assurer une stabilité durable. Par exemple, des programmes de formation pour les familles inscrites pourraient offrir des compétences précieuses et ouvrir des voies générant des revenus. Ces programmes pourraient couvrir une gamme de compétences, allant de l’artisanat local à la formation en technologie numérique.

L’implication des résidents dans la gestion de leur logement et de leur quartier peut aussi être un puissant moyen d’autonomisation. Cela peut non seulement renforcer le sentiment d’appartenance et la cohésion sociale, mais aussi donner aux résidents un sentiment de contrôle sur leur environnement.

Quelle vision avez-vous des logements sociaux dans le futur ?
Je pense qu’on doit se concentrer sur trois piliers principaux : l’inclusivité, la durabilité et l’intégration communautaire. Les logements sociaux du futur devraient être conçus pour répondre aux besoins de tous les individus, indépendamment de leur âge, de leur genre, de leur situation familiale ou de leur handicap. Cela signifie des logements flexibles et adaptables qui peuvent évoluer en fonction des besoins changeants des résidents.
Deuxièmement, la durabilité. Face à la crise climatique actuelle, il est essentiel que les logements sociaux de demain soient écologiquement durables. Cela implique l’utilisation de matériaux de construction écologiques, des designs écoénergétiques et l’intégration de technologies vertes comme l’énergie solaire ou la récupération de l’eau de pluie.

Troisièmement, l’intégration communautaire. Les logements sociaux ne devraient pas être isolés ou stigmatisés. Au lieu de cela, ils devraient être intégrés dans le tissu urbain, avec un accès facile aux services publics, aux espaces verts et aux opportunités d’emploi. L’objectif est de créer des quartiers diversifiés et dynamiques où les résidents des logements sociaux sont des membres à part entière de la communauté.

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