Trafic de drogue : Audit Trail tous azimuts pour décryptage de l’énigme Franklin

Le Roi de l’Ouest acculé face aux aveux de son prête-nom, Rikesh Sumboo - Descente de l’ICAC au Ti-Mimi Grill de La Gaulette pour récupérer le livre de ventes et la machine de recettes électronique

Le complice Nono : « Rs 600 000 se larzan ki mo’nn travay kouma skipper ! »
Alors que l’un de ceux convoqués pour les besoins d’auditions parle de revenus de Rs 827 000 par mois comme recettes de ses activités professionnelles, les limiers de l’Independent Commission Agaisnt Corruption mettent la pression sur des Audit Trails des principaux protagonistes en vue de décrypter l’énigme de l’Unexplained Wealth de Jean-Hubert Célérine, alias Franklin, et aussi connu comme le Roi de l’Ouest. Ainsi, les séances d’interrogatoire se sont enchaînées hier au QG de l’ICAC pour Franklin, et son présumé prête-nom Rikesh Sumboo. Initialement, ce dernier avait expliqué aux enquêteurs que le duplex résidentiel de trois étages de La Gaulette, évalué à quelque Rs 25 millions, aujourd’hui sous placé sous scellées, est bien enregistré en son nom, mais que c’est Franklin qui assure tout le financement.

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Assisté de Me Kailash Trilochurn, ce suspect est revenu sur les discussions qu’il a eues avec le véritable propriétaire, qui lui aurait demandé, selon lui, de lui « rendre un service ». En retour, Franklin devait l’aider à faire prospérer sa compagnie de location de véhicules. Rikesh Sumboo a dit tout ignorer des activités du premier nommé, ajoutant que leur amitié date de seulement un peu plus de deux ans.

Il a également expliqué que Franklin le contactait lorsqu’il avait besoin d’une voiture et qu’il lui fournissait l’argent. Ainsi, à travers son entreprise, Rikesh Sumboo louait ou sous-louait pour de longues périodes des véhicules de luxe pour Franklin.
Ce qui aura été le cas de la Ford Mustang que l’ICAC a saisie mardi, et dans laquelle Franklin voyageait avec le comédien camerounais Nico Le Mimi l’année dernière. Les enquêteurs soupçonnent Rikesh Sumboo d’avoir aidé Franklin dans plusieurs transactions financières douteuses qu’il reste à élucider.

Pressé de questions face à ces accusations, Franklin a campé sur sa position, soit la même posture que celle adoptée depuis l’éclatement de l’affaire, et donc en faisant valoir son droit constitutionnel au silence. Pendant toute la journée d’hier, les enquêteurs l’ont confronté à la version de Rikesh Sumboo. « Mo pena narien pou dir », a tout simplement rétorqué Franklin, assisté de son avocat, Me Yatin Varma. Au même moment, une équipe de l’ICAC s’est rendue à son restaurant, le Ti Mimi Grill, à La-Gaulette, pour y effectuer une perquisition. Les enquêteurs ont mis la main sur le livre de ventes et la caisse enregistreuse électronique (Point of Sale). Ne leur reste plus qu’à procéder à une Forensic Examination  pour établir les rentrées d’argent du commerce en question et essayer de comprendre les sources de financement de Franklin.

De son côté, John Cédric Flore, en détention depuis son inculpation provisoire pour blanchiment d’argent en début de semaine, était de retour au Reduit Triangle hier. Cet autre prête-nom présumé de Franklin, propriétaire du bateau White Bird, n’était pas en mesure de donner de détails sur cette acquisition, évaluée à Rs 7,5 M. Ce jeune de 28 ans n’a en effet aucun emploi fixe et, selon l’ICAC, ses sources de revenus ne pouvaient lui permettre de faire l’acquisition de ce luxueux bateau de plaisance.

Contrairement à l’homme d’affaires Rikesh Sumboo, qui a décidé de collaborer avec la commission anti-corruption, John Cédric Flore a adopté une autre posture. Ainsi, il ne compte donner de détails sur le White Bird qu’aussitôt en possession de ses papiers. Néanmoins, les enquêteurs ont appris que le White Bird était connu dans la région Ouest, ayant en effet pris part à plusieurs compétitions de Big Game Fishing.

De son côté, Jérémy Décidé, alias Nono, condamné par contumace à sept ans de prison par le tribunal de Saint-Denis (La Réunion) en 2021 pour son implication dans un trafic de stupéfiants entre les deux îles, a été plus loquace dans les locaux de l’ICAC, même si ses réponses n’ont pas convaincu les enquêteurs.

Assisté de Me Sanjeev Molaye, il est ainsi revenu sur les Rs 600 000 saisies sur lui en 2020 à l’aéroport international SSR, alors qu’il était en partance pour Madagascar.
Il a expliqué avoir déclaré cet argent à la douane, mais que les officiers avaient noté qu’il n’avait pas annoncé le montant total de la somme qu’il transportait, des devises étant en effet cachées dans un de ses sacs. Nono a ajouté travailler comme skipper depuis plusieurs années, et que l’argent retrouvé était ses « économies ». Interrogé quant à savoir comment et pourquoi il avait changé son argent contre des devises étrangères, le suspect a lancé : « Touris ti pe pay mwa an deviz ! »
Nono a par ailleurs prétendu ne pas connaître Franklin, précisant qu’il n’avait jamais eu affaire à lui dans le passé. Les enquêteurs lui ont alors rappelé qu’il avait été condamné avec Jean Hubert Célérine dans une même affaire de trafic de zamal entre La Réunion et Maurice.

Mais le dénommé Nono a maintenu sa position, disant ne rien savoir de ce que lui reprochent les autorités réunionnaises. « Mo pa al La Réunion mwa ! » s’est-il évertué de faire comprendre.

Son avocat confirme qu’il a reçu des convocations de La Réunion pour que son client se présente devant la justice, mais que Nono les aurait ignorées, car les autorités de l’île sœur « inn fer enn erer lor dimounn ». Le skipper confirme qu’il a donné sa version en Cour à Maurice dans le sillage d’une demande pour une commission rogatoire. Il avait tenu le même discours en disant ne rien savoir des faits qui lui sont reprochés.
Le suspect a néanmoins été traduit au tribunal de Mahébourg hier, où une accusation provisoire de blanchiment d’argent, sous les dispositions de la Financial Intelligence Anti Money Laundering Act (FIAMLA), a été retenue contre lui. La police a objecté à sa remise en liberté conditionnelle en évoquant le risque qu’il puisse interférer avec d’éventuels témoins et preuves. Il sera de retour en Cour mercredi prochain.
En attendant le mystère de l’énigme Franklin rend les protagonistes de plus en plus nerveux, notamment avec l’opération The Colour of Money…

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