Meurtre à La Bastille : Le sort de Permes scellé dès son arrivée à la prison

Dans un rapport de 90 pages, Me Valayden établit des dessous du transfert de ce détenu de Beau-Bassin à La Bastille pour une « séance de torture »

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Deux hauts gradés de la Prison « Singled Out » pour leur intérêt autour du prisonnier Permes, l’un d’eux ayant réclamé une photo le 18 mars pour vérification

La MCIT acculée à consigner la version des faits de quatre enquêteurs de la CID se trouvant à La Bastille au moment des faits le mardi 5 mai

Le sort, soit l’exécution sommaire, du détenu Caël Permes, âgé de 29 ans, à La Bastille de Phoenix, aurait été scellé dès son incarcération à la prison de Beau-Bassin le 17 mars dernier. C’est ce qui découle d’un rapport de 90 pages, rédigé par le Penal Counsel, Me Rama Valayden, sur cette sinistre affaire de torture en milieu carcéral, et soumis aux autorités à toutes fins utiles. Certes, sur la base des informations collectées, l’homme de loi réclame la démission du commissaire de la Prison, Vinod Appadoo, mais aussi celle d’un autre haut gradé, dont le nom est cité avec persistance par rapport aux événements se déroulant « Intra Muros » à la prison du 17 mars au 5 mai, littéralement les « dessous d’une exécution pour règlement de comptes ». Sur la base des éléments devant faire l’objet d’une enquête des autorités compétentes, deux Top Guns de la Prison sont « Singled Out » dans cette affaire alors que des questions se posent sur des procédures accélérées de mise à la retraite d’officiers de la Prison depuis le meurtre de La Bastille.
L’un des premiers points soulevés dans la reconstitution des éléments élaborée par Rama Valayden porte sur l’intérêt d’un haut gradé de la Prison pour Caël Permes, dès son incarcération à la prison de Beau-Bassin le 17 mars. Effectivement, dès le 29 juillet de l’année dernière, à la suite d’un défilé en marge des Jeux des Iles de l’océan Indien, ce haut gradé de la Prison aurait promis à Caël Permes que « mo pou gagn twa kan to vinn Bo-Basin ». Mais lors de sa mise en détention à la New Wing le 17 mars, Caël Permes ne se doutait pas de l’issue de la menace alléguée datant de huit mois déjà. En effet, dès le lendemain, ce haut gradé de la Prison avait réclamé à la section photographie de lui soumettre les Mugshots du détenu de la veille. Pour mieux situer l’urgence de sa démarche, il était parti à la rencontre du Lead Officer Chunnoo, dont le bureau est situé au QG de Beau-Bassin.
Cet épisode pousse Me Valayden à dresser une liste de questions, dont les éléments de réponse pourraient jeter un nouvel éclairage sur des pratiques de violation de droits humains et d’abus à la prison. « Is it the practice of the most senior officers at the prisons to request from the official photographer photos of detainees ? When was the last time this prison officer requested photograph(s) of detainee(s) ?  Why did Mr Hanumantadhu request the photograph ? What use did Mr Hanumantadhu make of the photograph of Cael Permes ? Was the photograph(s) distributed to CERT officers and some detainees ? »
L’autre épisode, qui pourrait s’avérer aussi explosif que la demande de photos du détenu Permes dans la thèse du complot prémédité de torture, a pour témoin un homme de loi, en l’occurrence Me Monique, dont les services avaient été retenus par le détenu. Lors d’une conversation téléphonique avec un autre Top Gun de la Prison se déroulant vers le 30 avril et le 1er mai au sujet de la déposition du détenu fixée pour le 7 mai, le responsable de la prison aurait commis l’imprudence de demander à l’homme de loi si le dénommé est le même Permes, qui avait eu des problèmes avec l’autre haut gradé. Mais « at the material time », cette curiosité malsaine de ce Top Gun, qui avait paru « bizarre », n’avait pas déclenché de signal d’alarme mais a posteriori, un plus un pourrait facilement faire deux.
Mais il semblerait que vingt jours depuis ce meurtre en cellule C 1 de La Bastille, l’enquête de la police n’aurait pas amorcé ces pistes pour tenter d’élucider le mystère de cette « vengeance en milieu carcéral ». D’ailleurs, un volet du rapport Valayden est consacré « aux lacunes » notées jusqu’ici au sujet de l’évolution de l’enquête.
L’autre piste, qui est remontée à la surface, est que ce mardi 5 mai, quatre enquêteurs de la CID se trouvaient dans l’enceinte de la prison de haute sécurité de La Bastille en vue de procéder à l’interrogatoire d’un autre détenu. La version des faits de ces officiers de police est considérée comme étant « cruciale » pour mettre à nu le complot allégué pour torture, d’autant que la thèse du Black Out avait été avancée pour justifier l’absence d’enregistrement de vidéo-surveillance dans certaines parties de La Bastille.
Le rapport, qui a été rédigé en vue de soutenir la demande soumise à la Commission nationale des Droits de l’Homme pour une enquête approfondie sur le meurtre de Caël Permes et, par extension, la situation, qui prévaut à la prison, retrace également la chronologie des événements dans cette affaire.
Ainsi, il était vers 11h30, quand l’escouade de la CERT a débarqué dans la cellule occupée par Caël Permes conjointement avec un autre détenu, qui n’était que son beau-frère, Govinden Renghen. À son départ de la cellule, le détenu portait un boxer, un bermuda de couleur gris-bleu, de marque Fila, que lui avait remis son beau-frère.
« At the time of leaving, Mr Permes was saying that he is being brought to La Bastille to be tortured and killed. Mr Permes was also hooded but with no aperture and was forced to sit in between two passenger seats. According to some witnesses he was between third and fourth row of seats », écrit Me Valayden dans son rapport, en ajoutant que le van de la prison était arrivé à La Bastille vers 13h. Les recoupements d’informations sont que le détenu avait été agressé physiquement à différentes étapes de ce transfert, soit dans l’enceinte de la prison, « outside Central Prison but in the yard »; dans les parages du QG de la Prison et du Training Centre de la Prison, dans la Search Area de La Bastille et entre les murs de La Bastille avec des chiens « used to snarl at him ».
« Before entering the PSU cell, he was wearing the yellow-fluo t-shirt as remitted to detainee by prison authorities, a grey Bermuda short but was no longer wearing any slippers. He was hooded with a black polo. There was spatter of blood on the fluo t-shirt. And the hood was dripping with brownish substance », poursuit Me Valayden dans le récit des événements, en soulignant que les coups ont continué à pleuvoir une fois à l’intérieur de la cellule.
« Pardonn mwa ! Sap mo lavi ! Mo pou mor ! Tir mo menot » étaient entendus en même temps. Le détenu Permes devait continuer à appeler au secours jusqu’à 16h30. « At around 6.30 pm, Mr Permes was heard muttering words of pain or words indicating that a person is suffering heavily », lit-on encore alors que cinq minutes après, ce fut le silence total de cette cellule de la mort.
Puis vers 20h30, un vent de panique se soulevait à La Bastille, avec des officiers de la Prison courant dans tous les sens en attendant l’arrivée du médecin de la Prison, le Dr Maudarbacus, confirmant le décès de Permes. Les proches de ce dernier furent informés de la situation au téléphone à 22h34.
Affaire à suivre au cas où les étapes préconisées dans le rapport sont adoptées ou même rejetées dans cette exécution sommaire avec impunité à La Bastille…

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