LE VIGILE RESPONSABLE DU TUNNEL SUD : « J’étais le dernier à sortir du tunnel »

L’enquête judiciaire sur les inondations meurtrières du 30 mars 2013 s’est poursuivie hier avec l’audition de Brodick Caleea, le vigile qui était responsable du tunnel Sud du Caudan, où six personnes ont trouvé la mort. Ce dernier a maintenu avoir procédé à l’évacuation de toutes les personnes se trouvant dans le tunnel, ajoutant qu’il était le dernier à en sortir. Mais le visionnage des vidéosurveillances à l’entrée du tunnel lui a prouvé le contraire.
L’enquête judiciaire, pour faire la lumière sur les inondations du 30 mars 2013, a été marquée par le témoignage de Brodick Caleea. Ce dernier a été interrogé en premier lieu par Me Anuradha Puryag-Ramful, représentant la Poursuite. Le vigile a maintenu avoir été le dernier à sortir du tunnel reliant le Harbour Front au Caudan Waterfront, où six personnes ont perdu la vie ce jour-là.
Me Puryag-Ramful : « M. Caleea, depuis quand travaillez-vous chez Rapid Security ? »
M. Caleea : « Depuis le 20 décembre 2012. »
Me Puryag-Ramful : « Êtes-vous enregistré comme vigile chez Rapid Security ? »
M. Caleea : « Non. »
Me Puryag-Ramful : « Portez-vous l’uniforme ? »
M. Caleea : « Oui. »
Me Puryag-Ramful : « Avez-vous reçu un “training” avec Rapid Security ? »
M. Caleea : « Jamais. »
Me Puryag-Ramful : « Les vigiles étaient-ils supposés faire une parade tous les matins au moment où ont leur remettaient leur équipement ? »
M. Caleea : « Oui. Là, nous recevions nos radios et on nous plaçait dans les différents endroits du Caudan. Ma radio fonctionnait tout le temps et je travaillais tout le temps sur le terrain, pas dans la Control Room. »
Me Puryag-Ramful : « Vous travailliez le 30 mars 2013 ? Où étiez-vous posté ? »
M.Caleea : « Oui, je travaillais. J’étais au tunnel Sud et je devais faire la ronde à l’intérieur jusqu’à la partie près de la Rogers House. »
Me Puryag-Ramful : « Quelles instructions recevez-vous en tant que vigile dans le tunnel ? »
M. Caleea : « Je devais veiller à ce qu’il n’y ait pas de vols et de violences, ainsi qu’aider les personnes en difficulté. »
Me Puryag-Ramful : « Donc, s’il y avait des problèmes dans le tunnel, c’est vous qui deviez faire évacuer les personnes à l’intérieur ? »
M.Caleea : « Oui ! »
Me Puryag-Ramful : « Que s’est-il passé ce 30 mars 2013 ? »
M.Caleea : « Ce jour-là, vers 13h, il commençait à pleuvoir et l’eau pénétrait dans le tunnel par les escaliers. »
Me Puryag-Ramful : « Où étiez-vous à ce moment-là ? »
M. Caleea : « Dans le tunnel. Les personnes continuaient à emprunter ce passage et les propriétaires des tabagies continuaient de travailler. J’ai regardé si l’indicateur de la pompe marchait, et c’était le cas. J’ai appelé la Control Room pour informer mon supérieur de la situation vers 13h40. »
Me Puryag-Ramful : « Quelle quantité d’eau y avait-il dans le tunnel ? »
M. Caleea : « Je dirais à hauteur des chevilles. À ce moment précis, j’ai fait savoir aux propriétaires des tabagies que l’eau continuait à entrer dans le tunnel et qu’ils devaient fermer leur boutique. C’est moi qui les ai fait évacuer. »
Me Puryag-Ramful : « Quand vous leur avez demandé de sortir, l’ont-ils fait ? »
M. Caleea : « Oui. Quelques-uns sont sortis du côté de Rogers, et d’autres du côté du Caudan Waterfront. »
Me Puryag-Ramful : « Vous dites donc que tous les propriétaires étaient sortis de leur tabagie ? »
M. Caleea : « Ils étaient tous sortis. Tous les propriétaires avaient quitté leur tabagie ! »
Me Puryag-Ramful : « Aviez-vous informé votre supérieur de l’évacuation ? »
M. Caleea : « Non. Je suis sorti le dernier du tunnel et j’ai vu que l’eau continuait d’y entrer violemment. Un ami m’a aidé à sortir. »
Me Puryag-Ramful : « Il y a des portails aux deux extrémités du tunnel. Pourquoi ne pas les avoir fermés quand vous êtes sortis ? »
M. Caleea : « De peur qu’il y ait des gens qui se cachent dans le tunnel et qu’ils restent bloqués à l’intérieur. »
Me Puryag-Ramful : « Vous dites donc que même Mme Wright, qui tenait une tabagie, est sortie avant que l’eau n’engloutisse le tunnel ? »
M. Caleea : « Oui. Je l’ai vue sortir du côté de Rogers, moi je suis sorti du côté du Caudan. J’ai fait une ronde dans le tunnel et personne ne s’y trouvait. L’eau dans le tunnel était arrivée à hauteur de mes genoux. »
Me Puryag-Ramful : «  C’était donc vous le dernier à être sorti du tunnel ? »
M. Caleea : « Oui, j’étais le dernier. »
Me Puryag-Ramful : « Alors, comment se fait-il que six personnes aient perdu la vie dans ce tunnel ce jour-là ? »
M. Caleea : « Il n’y avait personne dans le tunnel. Je ne peux pas expliquer comment ils étaient à l’intérieur. »
Me Puryag-Ramful : « M. Caleea, savez-vous qu’il y a des enregistrements vidéos des caméras de surveillance près du tunnel Sud ? »
M. Caleea : « Non, je ne savais pas. »
Me Puryag-Ramful : « Avez-vous vu des personnes entrer dans le tunnel quand vous en êtes sorti pour la dernière fois ? »
M. Caleea : « Non, je n’ai vu personne. »
À ce stade, la Cour a procédé au visionnage des enregistrements des caméras de surveillance près du tunnel Sud. Ceux-ci ont démontré que des personnes continuaient à emprunter le tunnel lorsque l’eau était entrée et… aucun signe du vigile sortant du tunnel. Le vigile devait de plus déclarer qu’il n’avait pas vu ces personnes, martelant qu’il était le dernier à sortir du tunnel ce jour-là. Se basant sur les enregistrements, la Poursuite lui a demandé s’il était toujours à l’intérieur quand des personnes continuaient à entrer dans le tunnel alors qu’il se remplissait d’eau. Le témoin devait signifier qu’il était « peut-être déjà sorti ».
Me Puryag-Ramful : « M. Caleea, à aucun moment vous n’étiez dans le tunnel. Si vous aviez évacué ces six personnes, il n’y aurait pas eu mort d’homme. Qu’avez-vous à dire ? »
M. Caleea : « J’ai procédé à l’évacuation des personnes se trouvant dans le tunnel puis je suis sorti. »
Un des directeurs de Rapid Security, en l’occurrence Vishnu Appadoo, est par ailleurs venu témoigner hier. Il devait indiquer ne pas être au courant que plusieurs des vigiles sur le terrain n’avaient pas leur permis de travail et n’avaient pas reçu de “training”. Il a soutenu que ceux qui attendaient leur permis faisaient leur “training” sur le terrain avec un vigile accrédité selon le Board of Directors.

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