Eid Mubarak, mais pour qui ?

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La photo ci-jointe montre Ibrahim distribuant des présents à des enfants de Gaza dans une mosquée. C’était lundi, trois jours avant la fête de l’Eid. Trois heures plus tard, à l’heure de la rupture du jeûne, Ibrahim sera tué sous les bombes d’une attaque de l’occupant israélien. Neuf des vingt-deux victimes seront des enfants. Comment donc souhaiter Eid Mubarak à leurs familles ?

Ici aussi, certains parmi nous ont perdu des proches durant l’année écoulée, sinon font face à maintes difficultés liées à la pandémie. Mais nos douleurs ne sont que peu face à ce que subit la population de Gaza.

Que ce soit également au Yémen, en Afghanistan, en Libye, en Syrie, au Myanmar ou en Chine, Eid Mubarak n’est pas un souhait facile à prononcer envers celles et ceux qui souffrent au sein de l’oumma. Ajoutons à ces pays, l’Inde avec la souffrance de tout un peuple face à la pandémie. Hier, c’était surtout au Cachemire qu’il était difficile de dire ‘Eid Mubarak’, aujourd’hui c’est tout un pays qui est affligé.

Eid à Gaza

Malgré cela, nous essayerons quand même de fêter. Cependant, avant même de finir la lecture de cette page, nous aurions oublié, peut-être, ceux qui souffrent. Combien de temps dure le sort des opprimés dans nos pensées et nos

invocations ? Pas trop longtemps, mais il peut y avoir encore pire. Ce qui est absolument inhumain, c’est qu’il y a des gens qui disent ‘Eid Mubarak’ et refusent de condamner la tuerie d’enfants innocents comme ceux de Gaza. Que le coupable soit juif, musulman ou autre, nous ne pouvons être complices de ce qu’ils font par notre silence. Or certains parlent de paix et diront ‘Eid Mubarak’, mais n’ont pas le courage de dire que tuer des enfants de la sorte est un crime abominable.

Ils n’ont pas le courage de dire ‘STOP’ au massacre d’innocents civils, en particulier des enfants. Alors, comment peut-on espérer qu’ils ne confondent pas Ibrahim avec un ‘terroriste’ ? Qu’ils puissent trouver injuste l’expulsion des habitants de Jérusalem de leurs maisons ? Ou encore qu’ils soient indignés par la violation de

l’enceinte sacrée de la Mosquée Al Aqsa par les soldats israéliens ? Même le gouvernement mauricien, historiquement un soutien de la cause palestinienne, a émis un communiqué ne portant aucune condamnation du massacre d’innocents enfants !

Si les forces de résistance à l’occupation israélienne ont une part de responsabilité, comment peut-on quand même fermer les yeux devant la disproportion de la riposte de Tsahal ? Finalement, ceux qui tuent des innocents, quels qu’ils soient, ne sont-ils pas des alliés conjoncturels ? L’embrasement actuel n’arrange-t-il pas les affaires de Netanyahu comme celles de ces dirigeants palestiniens qui avaient tous failli et n’inspiraient plus confiance ? Toute démarche citoyenne non violente afin de libérer la Palestine sera désormais encore plus pénible, à l’instar du

mouvement qui visait à empêcher l’expropriation des maisons palestiniennes à Jérusalem. Rien ne justifie la violation du droit international, mais nous savons qu’Israël, comme les USA et la Grande-Bretagne dans le cas des Chagos, aussi, n’ont que faire de cela.

Toutefois, le présent conflit comporte deux dimensions sans précédent. Sur les réseaux sociaux, il y a une vraie guerre qui se livre entre ceux qui sont indignés par l’occupation israélienne et ceux qui la défendent. Il y a aussi un début d’intifada des Arabes d’Israël, trop longtemps réduits aussi à des citoyens de second ordre. À cela ajoutons les appels tant de chefs rabbins que de forces vives en Israël, repris jusqu’aux États-Unis par les proches de l’administration Biden, à arrêter la violence. Peut-il y avoir une fin heureuse à ce qui se passe ?

Choix difficiles

Que Dieu nous pardonne nos oublis, nos négligences et nos trahisons vis-à-vis du peuple meurtri de la Palestine. Il ne s’agit pas d’une cause musulmane en soi, mais d’un déni du droit d’un peuple qui comprend des chrétiens et des gens d’autres ou sans confession(s), pas seulement des musulmans. Il n’empêche que le statut de Jérusalem, Terre Sainte aux trois grandes religions monothéistes, est étroitement lié à toute la question aussi.

Choisir d’aller prier à Al Aqsa sous occupation israélienne est une décision audacieuse, mais beaucoup décident de le faire. Pourra-t-on encore s’y rendre à l’avenir ? Désormais, la pandémie de

COVID-19 peut présenter un empêchement additionnel à tout déplacement. Certains nous rassureront qu’Israël a contrôlé la pandémie, mais peut-elle assurer la sécurité et la paix ? Israël s’est vacciné, mais pas les territoires qu’il occupe. Avec la violence qui y flambe, nous imaginons mal le quotidien de leurs habitants. Une crise humanitaire est à craindre avec le blocus de Gaza. Mais ce conflit n’est pas nouveau. Comme le coronavirus, il ne fait que nous demander de nous réveiller de notre sommeil, notre démission même.

Comme le confinement avec la COVID-19 aussi nous oblige, espérons-le, à prendre conscience, ici, de ce que vivent les peuples opprimés d’ailleurs de manière amplifiée. Choix difficile que de décider de sortir de chez soi. Non parce qu’il y a des bombes qui pleuvent, mais parce que

nous risquons de nous faire contaminer. Avec la fête de l’Eid, y aura-t-il un relâchement ? Aller prier à la mosquée à Maurice n’est pas possible à l’heure actuelle. Légalement, nous ne pouvons le faire, jusqu’à nouvel ordre, mais nous voyons que des personnes arrivent à contourner la loi. Les autorités ferment-elles les yeux ? Certains ne tarderont pas à blâmer les récalcitrants, et leur religion, si cela déclenche une troisième vague. Il faut tout faire pour éviter ce piège, surtout avec l’Eid-ul-Fitr.

Eid à Maurice

Dans plusieurs articles, ici même, l’année dernière et plus récemment, nous rappelions l’obligation de porter un masque en public, la nécessité de garder

la distanciation physique et le respect des autres gestes barrières. L’hygiène et la propreté font la moitié de la foi, comprenant largement les mesures sanitaires face à la COVID-19. Lorsque le nombre de cas était tombé à zéro et que le pays était entré en déconfinement partiel, une réouverture partielle des lieux de culte sous de strictes conditions était possible. Mais faute de dialogue constructif, d’engagement mutuel et de discipline de la part de certains, cette éventualité est bien derrière nous aujourd’hui.

Dans la rue ou dans la boulangerie en passant par le transport public, nous avons fait preuve de laisser-aller. Le coronavirus est là et il faut désormais hausser de vigilance au plus haut niveau. Comment peut-on s’attendre à éviter la transmission lorsque nous sommes

coupables de ne pas porter le masque sur la bouche et le nez ou de ne pas respecter la distanciation ? Ces écarts, encore une fois trop tolérés par les autorités, sont des pièges qui nous sont tendus. Il ne faut pas que les célébrations de l’Eid soient pointées du doigt comme la cause d’une éventuelle troisième vague.

Les rassemblements en famille sont inévitables, mais sachons les limiter à une dizaine de personnes tout en observant les gestes barrières. Nous savons que ce sera impraticable, voire impossible presque, surtout lorsque nous sommes heureux de nous retrouver dans une ambiance de joie après un mois de jeûne. Mais soyons patients et persévérants dans nos efforts, même si nous ne serons jamais des êtres parfaits.

Ce n’est qu’ainsi que nous pourrons faire face à notre avenir, que ce soit sou

forme d’une troisième vague ou d’un déconfinement, avec la réouverture des mosquées avec des conditions sanitaires à respecter. Souvenons-nous qu’il fut un temps où certains interdisaient le port du niqaab. Aujourd’hui, ce n’est pas si grave si nous devons porter un masque pour notre bien commun. Ce “niqaab” est le meilleur vaccin jusqu’ici, surtout lorsque nous voyons la guerre des vaccins qui se livre au niveau global. C’est un sacrifice infime qui nous est demandé. Rien par rapport à ce que vivent les opprimés de Gaza, et d’ailleurs. Malgré l’épreuve, ils ont, des fois, gardé et partagé le sourire. C’est ce que témoigne Ibrahim dans cette photo avec ces enfants dans une mosquée à Gaza. Eid Mubarak

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