APRÈS SA 100E VICTOIRE AU CHAMP DE MARS : Je me donne toujours à fond, a déclaré Cédric Ségéon

Ça y est! Cédric Ségéon a finalement remporté sa 100e victoire au Champ de Mars. Attendu une semaine plus tôt, le Français a signé sa 100e réussite avec Keep Walking dans la deuxième épreuve de samedi. S’il préfère parler d’accomplissement plutôt que d’exploit, la cravache de l’écurie Merven est tout de même d’avis que c’est un privilège de piloter cent gagnants au Champ de Mars. Dans l’entretien qui suit, il nous parle de son parcours à Maurice, son association avec l’écurie Merven et son après-carrière.
Cédric Ségéon quel est votre sentiment après avoir remporté votre 100e victoire au Champ de Mars?
Ça fait vraiment très plaisir de remporter 100 courses à Maurice. Je ne suis pas le premier à le faire et je ne serai pas le dernier non plus. C’est la raison pour laquelle je préfère parler d’accomplissement que d’exploit. Comme je l’ai toujours dit, nous jockeys, nous sommes le dernier maillon de la chaîne. Il y a tout un travail d’équipe derrière. Sans ce travail je n’aurais jamais pu atteindre ce chiffre symbolique. Je suis dans une écurie où tout se passe bien et où il y règne une bonne entente que ce soit au niveau des palefreniers ou celui des membres. Tout le monde s’entend bien et cela facilite grandement mon travail. J’espère que ces cent victoires vont en appeler beaucoup d’autres.
De ces 100 victoires, quelle est, pour vous, la plus mémorable?
C’est difficile à dire car qui dit victoire mémorable dit aussi victoire de prestige. A ce chapitre, je dois reconnaître que je n’ai pas eu l’occasion de monter beaucoup de classiques avec de premières chances à Maurice. Mais je désignerai quand même la victoire de Royal Chalon dans la Duchesse 2011 car ce fut ma première monte dans une Duchesse. Mais je dois dire que chacune de ces cent victoires fait plaisir car chaque cheval a sa particularité et remporter une course avec un cheval avec lequel on a pris pas mal de patience ne peut qu’être gratifiant.
Quel regard portez-vous sur votre parcours à Maurice jusqu’ici?
Ecoutez, je suis un des rares jockeys à avoir fait seulement deux écuries en quatre ans et demi de compétition chez vous. Ce qui est assez exceptionnel je pense. J’ai fait deux ans et demi chez Ricky Maingard et pense que je mérite une médaille si on tient en ligne de compte que M. Maingard ne garde pas longtemps ses jockeys (rires). Avec l’écurie Merven ça se passe très bien. Je ne sais pas combien de temps cela durera mais je sais que j’ai une grande envie de rester et de continuer le bon travail qu’on a débuté il y a maintenant deux ans. Les gens peuvent critiquer, dire ce qu’ils veulent sur moi mais c’est un fait que je me donne toujours à fond dans mon métier.
Justement, depuis West Bar None, votre première victoire, pensiez-vous que vous alliez vivre une aussi longue aventure mauricienne?
J’ai eu la chance de monter dans plusieurs pays, notamment en Europe, à Macau, en Australie, à Singapour et même en Afrique du Sud. Quand je commence quelque chose, j’y vais toujours jusqu’au bout. Tout le monde sait que lorsqu’on vient à Maurice, ça peut durer une année comme ça peut durer deux semaines. Je suis venu ici avec en tête de rester le plus longtemps possible en partant, bien entendu, du postulat que tout se passe bien. Jusqu’à présent tout s’est bien passé.
Justement, on vous sent comme un poisson dans l’eau chez l’écurie Merven…
Exact. L’entente est parfaite avec Patrick et Denis. Je suis entouré de gens très compréhensifs qui ne me mettent pas la pression. Je fais partie d’une équipe formidable, je suis content d’aller travailler le matin et les membres de l’écurie sont satisfaits de mon travail. Pour l’instant je suis très heureux de ma situation et je ne peux me plaindre.
Mais votre limogeage par l’écurie Maingard est quelque part venu entacher votre parcours mauricien …
On n’est jamais content de se faire renvoyer mais je vais vous faire une confidence. Arrivé à un moment à l’écurie Maingard, ça n’allait plus. L’état d’esprit n’était plus le même. Cette séparation c’était presque un soulagement pour moi. Le même jour, si ma mémoire ne me fait pas défaut, il y a trois écuries qui ont pris contact avec moi. Comme je l’ai dit, ce n’est pas plaisant de se faire renvoyer mais dans mon cas, ça a été bénéfique et cela m’a permis de rebondir et de prouver à mon ancien employeur qu’il avait eu tort de se séparer de moi.
Au départ, qu’est-ce qui vous a poussé à tenter l’aventure mauricienne?   
Je suis venu pour la première fois il y a dix ans et j’ai tout de suite aimé l’atmosphère du Champ de Mars. C’est un hippodrome unique en son genre où à toutes les réunions on est acclamé. Je me suis donc dit que s’il y avait une écurie assez compétitive qui voudrait retenir mes services, je serais partant pour faire le saut. Quand Ricky Maingard m’a appelé, je n’ai pas hésité car c’est un entraîneur qui jouit d’une bonne réputation et qui avait déjà fait ses preuves en Afrique du Sud. A Maurice, il y a de l’enthousiasme dans les courses et une fois qu’on y a goûté, on ne peut plus s’en passer.
Mais vous conviendrez qu’à Maurice il y a aussi beaucoup de pression car c’est un secret de polichinelle qu’un des fondamentaux du système est le betting. Il y a donc une obligation de résultats. Comment faites-vous pour gérer la pression qu’il y a ici?
Ecoutez, pour chaque jockey c’est différent. Je ne peux que parler que de mon cas. Je n’ai jamais monté sous pression depuis que je suis à Maurice. J’ai mené à la victoire de gros outsiders et j’ai aussi gagné avec de gros favoris. J’ai aussi été battu avec des chevaux bien cotés. Juste pour vous dire que quand je sors en piste, c’est pour gagner. On a pu le constater avec Legal Maxim samedi. C’est un cheval que j’ai monté à maintes reprises et jamais, au grand jamais, j’ai pensé qu’un jour il allait dicter son propre train. Vu que ça n’allait pas devant, c’est mon instinct qui m’a fait bouger. Des fois il faut monter les chevaux au feeling et s’adapter aux conditions de course. Legal Maxim, même s’il n’a pas gagné, a couru sa meilleure course depuis le début de la saison.
Vous êtes ici depuis plusieurs années. Quel regard critique jetez-vous sur les courses mauriciennes?
Personnellement, je trouve que les courses ici sont très bien organisées. Bien entendu, il y a des choses qui peuvent être améliorées mais dans l’ensemble c’est bien fait. La seule chose qui me fâche des fois c’est que le public turfiste a tendance à faire des critiques gratuites à l’égard des jockeys. Si ce sont des critiques constructives, basées sur des faits, ça peut se comprendre mais lorsque la critique est sans fondement, c’est vraiment dérangeant. A Maurice, il y a aussi cette tendance à l’effet que lorsque vous remportez des courses vous êtes un dieu et quand vous perdez vous êtes un moins que rien. Les insultes fusent de toutes part et on met même votre intégrité en question.
Ne croyez-vous que pour l’avancement des courses à Maurice, un nouvel hippodrome serait d’une grande aide ?
Ecoutez, c’est sûr qu’un hippdrome moderne aiderait beaucoup mais vu que le Champ de Mars est là depuis 200 ans, c’est un hippodrome unique en son genre. Avec sa piste circulaire et le fait que les gens sont tout près des chevaux lui donnent un cachet assez particulier. Peut-être il y a des travaux à faire, des améliorations à apporter pour le rendre plus moderne, mais personnellement je pense que vous devez garder le Champ de Mars, même si vous envisagez de bouger vers un autre hippodrome. Un champ de course vieux de 200 ans, ça ne court pas les rues. Le Champ de Mars fait partie du patrimoine mauricien et le laisser disparaître équivaudrait à mettre aux oubliettes tout un pan de l’histoire de l’île Maurice.
C’est du domaine public que vous avez un problème de poids. A 30 ans, comment envisagez-vous le reste de votre carrière?
C’est sûr que mon problème de poids n’est pas pour arranger les choses, mais je fais de mon mieux pour le maintenir au standard requis. Personnellement, je pense que j’ai encore dix ans de carrière devant moi. Ce n’est certainement pas à 30 ans que je vais exploser, mais si je parviens à rester dans les normes, je continuerai car j’aime bien mon métier. Maintenant si je peux continuer au delà de 40 ans, ce sera que du bonus (rires).
Envisagez-vous une carrière d’entraîneur après celle de jockey?
Pour l’instant ce n’est pas d’actualité. J’aime beaucoup mon métier et je respecte aussi beaucoup le métier d’entraîneur. Je crois que chacun a son travail à faire. Je suis jockey depuis l’âge de 14 ans. J’aimais, j’aime et j’aimerai toujours les courses mais je ne sais pas si je resterai dans le domaine hippique pour continuer à travailler. Je me donne encore quelques années pour réfléchir à une éventuelle sortie qui me portera vers un nouveau challenge.
Cédric Ségéon envisage-t-il de s’établir à l’île Maurice un jour?
J’aime bien l’île Maurice mais s’y établir est un grand mot. J’ai toujours vécu au jour le jour. Si demain ça se passe mal, je serai le premier à prendre ma valise et partir. Pour revenir à votre question, je préférerais dire: si c’est pour monter au Champ de Mars le plus longtemps possible, je n’y vois aucun inconvénient.

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