Libérez-vous de la peur !

La Birmane Aung San Suu Kyi, jadis icône mondiale de la Liberté qui lui a valu le Prix Nobel de la Paix en 1991, accusée ensuite une fois au pouvoir d’avoir été coupablement passive sur le massacre de la minorité des Rohingyas — contraints de fuir leur pays pour trouver refuge au Bangladesh — est la brillante auteure d’un essai et d’un livre publié en 1991 nommé Freedom from Fear, qui parle de la peur en politique. Ses écrits sont éternels : « Ce n’est pas le pouvoir qui corrompt, mais la peur : la peur de perdre le pouvoir pour ceux qui l’exercent, et la peur des matraques pour ceux que le pouvoir opprime. »

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Notre pays, Maurice, qualifié récemment par l’institution suédoise V-Dem Institute de pays autocratique, dérive rapidement aussi vers un pays où la peur du politique domine la vie de la Cité. Nos compatriotes ont pu ces derniers temps assister à ces véritables chasses à l’homme et lynchage politique public de tous ceux qui s’opposent clairement au pouvoir en place, au point de mourir étrangement ou de finir en cellule policière pour des délits les uns les plus farfelus que les autres.

Au niveau hippique, ce syndrome de la peur politique est omniprésent depuis plusieurs années. Le Mauritius Turf Club en a clairement été une victime expiatoire et, soyons réalistes pour dire, un peu consentante ces dernières années avec des présidents propulsés pour asseoir cette descente aux enfers, en cédant au moindre caprice du PMO ou de la GRA et de son grand manitou, Dev Beekhary, qui vient lui-même de recevoir une claque cinglante avec le retrait, toujours pas motivé officiellement, de l’Agence française de développement pour la nouvelle piste d’atterrissage de l’aéroport de Plaine Corail à Rodrigues. EIA, trafic d’influence, ou un autre de bloquage, les paris sont lancés et tout le monde a une petite idée de qui a gagné la course.

Cette peur de perdre le pouvoir, la peur des matraques, a conduit le MTC, à l’insu de son plein gré — comme dirait le cycliste Richard Virenque — à perdre son pouvoir et le partager aujourd’hui pour ce qui concerne l’organisation des courses avec autrui, née de la peur du pouvoir politique en place de perdre ce pouvoir et qui va profiter par ce biais du soutien financier nécessaire pour qu’il reste en place. Dans cette optique, l’étranglement financier du MTC est la pierre angulaire de cette stratégie basée sur la peur. La priorité des priorités, s’il en fallait encore une preuve, c’est l’hallali lancé par les organismes de l’État, mais aussi de toutes les institutions sous son contrôle, à l’encontre de ceux qui seraient tentés de soutenir celui qui est devenu l’ennemi juré, le MTC, surtout quand il tente de résister.

Chacun se souviendra comment le président élu du MTC, Jean-Michel Giraud, a été privé de sa PML par une GRA scélérate et interdit dans un premier temps de se rendre aux courses par une police soumise. Chacun se rappellera comment il s’est fait nommément — à l’encontre des Standing Orders — vilipendé par Pravind Jugnauth, le PM lui-même, au Parlement, comment il a été vainement poursuivi par la police pour avoir dénoncé des bookmakers véreux et illégaux, et pire, comment la MRA s’est soudainement mise en marche pour passer en revue, en vain, les dossiers de M. Giraud et sa famille ! L’ex-président du MTC a eu le courage de défier ce pouvoir qui opprime ceux qui lui résistent avec cette flopée de mesures, pour ne pas dire ces véritables coups de matraque, bien qu’il ait finalement jeté l’éponge lorsque la peur de tout perdre a envahi ses propres collègues et sujets qui l’ont lamentablement abandonné !

Mais il semblerait que le MTC boira la coupe jusqu’à la lie. Non seulement il a dû, dans le sillage des conséquences de l’étranglement financier étatique exercé jusqu’ici comme matraque suprême, être contraint de vendre un espace vert qui lui est cher, à Floréal, où trônait un centre d’hébergement de chevaux et piste d’entraînement, centre d’entraînement, mais aussi le cœur du Club hippique et donc de l’équitation. Et ce, dans le contexte où l’objectif final du pouvoir politique, qui comprend l’État, et à ses ordres les institutions, qui s’évertue à mettre le dernier clou au cercueil du MTC le plus vite possible pour libérer la voie royale…

Et cela passe par l’assassinat de ce qui représente la plus grande réussite hippique du MTC lors de ces 210 dernières années : la Maiden Cup et sa fabuleuse journée. Pour cela, la Horse Racing Division a ajouté une double journée une semaine avant celle du Maiden, sur une piste déjà à la limite du raisonnable, pour la tenue d’une journée hippique d’une telle importance dans l’imaginaire de l’ensemble de la population mauricienne. Pour tenter de saboter une telle journée, on ne pouvait mieux faire. Mais il y a eu pire, tout a été fait dans les coulisses pour priver le MTC de tout sponsor pour cette journée. La compagnie qui avait donné son accord a dû se rétracter sur pression politique. Avant elle, une autre compagnie qui avait osé sponsoriser une émission télévisuelle du MTC a eu la visite de la MRA et des tracasseries administratives qui l’ont poussé à se rétracter. Toutes les autres compagnies locales qui ont les moyens et qui ont été contactées par le MTC ont répondu par la négative à cause de la peur politique, celle des matraques administratives qui sonneront s’ils n’obéissent pas à l’ordre venu d’en haut.

À l’heure où ce papier est écrit, le MTC ne dispose d’aucun support financier exogène pour faire de la journée hippique de l’année, la Maiden Day, depuis plus de deux siècles, une fête qui réunit les Mauriciens dans leur diversité avec le même amour du cheval et des courses hippiques. Parce qu’aujourd’hui, les sponsors éventuels ne veulent pas se retrouver parmi les opprimés du pouvoir et ceux qui vont recevoir leur coup de matraque pour avoir sponsorisé des courses. Quelle honte, que de capons ! OUI, aujourd’hui dans notre pays, la peur politique paralyse tout, car c’est elle qui corrompt les esprits.

La peur, c’est aussi cela qui vaut à Taslima Valayden, la téméraire, une convocation devant ses pairs du MTC pour avoir dit tout haut ce que tout le monde pense tout bas, mais mieux encore, ce que tous savent pertinemment bien, mais lâchement se taisent. Par peur encore de cette matraque politique ! Que feront ses juges, l’arbitraire de la Weimar, ou le courage et la compréhension de ceux du siècle des Lumières qui croient qu’il faut raison garder ?

En fait, pour tous ceux qui se sentent opprimés et cèdent à la peur de la matraque, dans ses écrits dans Freedom for Fear, Aung San Suu Kyi fait appel au courage de chacun pour la refuser, la réfuter : « Dans sa forme la plus insidieuse, la peur prend le masque du bon sens, voire de la sagesse, en condamnant comme insensés, imprudents, inefficaces ou inutiles les petits gestes quotidiens de courage qui aident à préserver respect de soi et dignité humaine. […] Dans un système qui dénie l’existence des droits humains fondamentaux, la peur tend à faire partie de l’ordre des choses. Mais aucune machinerie d’État, fut-elle la plus écrasante, ne peut empêcher le courage de ressurgir encore et toujours, car la peur n’est pas l’élément naturel de l’homme civilisé. »

Plus que jamais dans cette conjoncture pesante dans notre vie quotidienne, mais aussi pour l’hippisme mauricien à la croisée des chemins, l’heure a sonné pour que les Mauriciens se libèrent enfin de la peur qui pèse sur leurs épaules, la peur de dire, la peur de dire NON. Le temps est de se retrousser les manches et dire non à l’arbitraire, à la matraque et agir dans le sens de ce qui est juste !

Le temps du Freedom from Fear a sonné. Libérez-vous tous de la peur de l’opprimé !

 

ACCROCHE :

« Dans un système qui dénie l’existence des droits humains fondamentaux, la peur tend à faire partie de l’ordre des choses. Mais aucune machinerie d’État, fut-elle la plus écrasante, ne peut empêcher le courage de ressurgir encore et toujours, car la peur n’est pas l’élément naturel de l’homme civilisé »

 

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