Assemblée nationale : La campagne électorale s’intensifie

Les meetings continuent de plus belle, avec pour résultats des suspensions     de séance, des expulsions et un walk-out

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Les rares interventions à la hauteur d’un débat budgétaire ont été celles de Paul Bérenger et de Nando Bodha

SAJ : entre les mises au point et confirmation du retrait de la course à la             députation

La campagne électorale s’est intensifiée cette semaine. Et oui, ce n’est pas sur le terrain, mais à l’Assemblée nationale, où les interventions ont été au ras des pâquerettes. Vendredi soir a été le point culminant de cette foire d’empoigne. Après les premières interventions de Nando Bodha et de Paul Bérenger qui ont été à la hauteur des débats sur un budget, il y a eu celle du ministre Mentor, qui a effectué quelques mises au point personnelles et réitéré sa décision de quitter la scène parlementaire, tout en se livrant à son sport préféré, qui est de critiquer Navin Ramgoolam. Les autres élus ont, eux, vite repris leur ton de caisse de savon, provoquant, comme vendredi soir, des suspensions de séance, des expulsions et un walk-out.

Pour démarrer la séance de vendredi, une déclaration du Premier ministre adjoint qui est venu clarifier sa position sur le dossier CEB/Alteo qui, la veille, l’avait opposé au chef de file du PTr, Shakeel Mohamed, qui a été jusqu’à l’accuser d’avoir favorisé la compagnie sucrière avec qui, selon lui, Ivan Collendavelloo aurait eu des liens professionnels avant d’être ministre. C’est Nando Bodha qui a ouvert la tranche des débats sur le budget avec une intervention sobre comme à son habitude. Il a philosophé sur la démocratie, la notion de l’intérêt public illustré, a-t-il soutenu, par les dossiers de Betamax et City Power, et sur la vigueur retrouvée de la diplomatie mauricienne.

Le ministre des Infrastructures publiques a aussi évoqué les grands chantiers en cours, le Metro Express, présenté sous son meilleur jour, pendant que les opposants s’attarderaient, eux, sur les menus détails pour annoncer qu’il organisera un tour du tracé pour l’ensemble des parlementaires. Nando Bodha a également parlé de la route Terre Rouge-Verdun et des projets du rond-point de Jumbo, qui ne causaient pas de gros inconvénients aux automobilistes, et les nouveaux aménagements qui seront effectués à Ébène et Hillcrest pour fluidifier le trafic dense dans cette région.

L’appel au PM

Pour lui succéder, le leader du MMM, Paul Bérenger, qui a lui aussi fait dans la mesure et l’argumentation chiffrée. Après avoir brossé un tableau pas très reluisant de la situation économique, il a lancé un appel au Premier ministre pour qu’il abandonne son projet de puiser des réserves de la Banque de Maurice pour diminuer la dette publique. L’ancien Premier ministre a aussi dit sa fierté que son parti n’ait pas été associé aux scandales de MedPoint, de Betamax et de CT Power. Il a mis en garde contre ce qu’il a appelé le « money politics » et a, à cet effet, demandé que le texte sur le financement des partis politiques soit adopté avant les prochaines élections générales. Même souhait que les déclarations de patrimoine des élus soient rendues publiques avant les prochaines consultations populaires. Paul Bérenger a a aussi souhaité que le pays aille directement aux élections générales et faire l’économie d’une partielle.

Sir Anerood Jugnauth, pris par des quintes de toux lorsqu’il a élevé la voix contre ses adversaires politiques, est longuement revenu sur son premier mandat de Premier ministre et l’affaire du riz de Taïwan qu’il avait demandé et reçu en 1983, sur l’affaire MedPoint en expliquant que la première évaluation de Rs 75 millions avait été considérée trop basse par les vendeurs, dont sa fille et son gendre le Dr Malhotra. C’est ainsi que, lors d’un second exercice d’évaluation par le Valuation Office, le chiffre de Rs 144 millions a finalement été agréé.

Il a également parlé des Chagos et des victoires remportées par Maurice devant la Cour pénale internationale et l’assemblée générale de l’ONU, alors que certains s’étaient montrés très sceptiques quant à l’issue de ces démarches. SAJ a aussi dit que c’était la dernière fois qu’il s’adressait à la chambre pour commenter un budget et qu’il ne briguera pas les suffrages, mais qu’il restera sur le terrain.

Les « stimulants »  de Navin Ramgoolam

S’il a été tout éloge pour son fils Pravind, il n’a pas pu s’empêcher de s’en prendre au PTr et au PMSD, accusés d’avoir ruiné le pays à chaque fois qu’ils se sont retrouvés aux affaires. Il a concentré ses attaques sur la personne de Navin Ramgoolam, a évoqué les stimulants retrouvés dans son coffre et les confidences que lui avait faite SSR à l’effet que « Navin Ramgoolam ne devrait pas faire de la politique parce que ce serait un malheur pour la pays ». Arvin Boolell a bien essayé de recourir à un point de procédure pour défendre son leader, mais il a été rabroué par la Speaker, qui a statué que les propos du ministre Mentor étaient tout à fait acceptables. Pour lui succéder, le député du PMSD Thierry Henry, qui a critiqué autant le budget que l’absence de projets réalisés dans sa circonscription de Mahébourg/Plaine Magnien.

Plus animée l’intervention d’Anil Gayan, qui a raconté ses débuts au State Law Office, avant de revendiquer de très bons chiffres pour le secteur du tourisme. Le ministre s’est ensuite embarqué dans des attaques contre la gestion du PMSD, qui aurait accordé un contrat très généreux à un de ses activistes Cader Hosenally. Le ministre a aussi évoqué le passage de Xavier Duval à l’île Plate, et du reportage fait dans l’émission Thalassa et des étapes qui ont précédé le départ du PMSD du gouvernement en décembre 2016, provoquant une vive réaction de la députée bleue Aurore Perraud, qui a soutenu que le ministre ne rapportait pas les faits tels qu’ils se sont produits. La speaker a décidé de l’expulser. Elle n’a pas été suivie de ses collègues de l’opposition.

Anil Gayan n’a pas non plus manqué de venir s’expliquer sur l’affaire du « honour killing » pour dénoncer un montage et une cabale politicienne dans l’intention de lui nuire. Il a ensuite allégué que des candidats de l’alliance PTr-MMM avaient côtoyé des trafiquants de drogue lors de la campagne électorale.

Les « constipated cats »  de Ravi Rutnah

Ses propos ont fait bondir les députés du MMM, qui lui ont demandé de venir avec des preuves de ce qu’il avance. Il a alors fait circuler une photo déjà publiée dans la presse montrant Navin Ramgoolam et Osman Mahomed en compagnie de Dade Azaree, épinglé dans le rapport Lam Shang Leen, et a dit détenir aussi de clichés de Navind Kisnah avec les candidats PTr-MMM. Devant les vives protestations des députés de l’opposition, Maya Hanoomanjee a suspendu la séance. À la reprise des travaux, elle a statué que les photos, de mauvaise qualité — un genre de montage en fait pour ceux qui les ont consultées — n’étaient pas recevables.

Rajesh Bhagwan a exigé de la présidence qu’elle ordonne au ministre de retirer ses propos, mais la Speaker n’a pas bronché, ce qui a poussé tous les députés de l’opposition à effectuer un walk-out. C’est avec l’intervention de Ravi Rutnah devant ses collègues ensommeillés qui n’attendaient qu’une chose qu’ils terminent au plus vite que la séance s’est achevée hier matin. Le Deputy Whip du gouvernement et député du N°7 a commencé par parler de lui-même, avant de faire le procès de l’opposition, dont les membres ont été qualifiés de « constipated cats ». Il s’est aussi souvent référé aux « politiciens-journalistes ». Enfin, une intervention du pur cru de Ravi Rutnah.

Les débats avaient repris depuis lundi et se sont prolongés tous les jours de la semaine avec des interventions les unes plus surprenantes que les autres.

La caresse qui met Jean-François Chaumière en joue

C’est Toolsiraj Benydin qui était à la tribune pour commenter le budget. La caméra est donc braquée sur le PPS du ML. On voit alors le conseiller du Premier ministre Jean-François Chaumière quitter son siège derrière les travées de la majorité et s’arrêter un moment auprès de la PPS Sandhya Boygah et lui caresser la joue.  Les images sont tout de suite devenues virales, d’autres petits malins profitant pour juxtaposer ces images avec les discours de la députée lors de la dernière campagne électorale invitant les hommes à garder leur mère et leur sœur en sécurité lorsqu’ils croisent la route de Navin Ramgoolam.

Sandhya Boygah a rapporté l’incident à la Speaker et a même fondu en larmes sur une radio privée, qui a décidément le don de provoquer des explosions lacrymales chez ses interlocuteurs, le précédent étant Ravi Yerrigadoo et son affaire Bet 365. Dans une déclaration faite à la chambre le même jour, Maya Hanoomanjee a déploré la manière d’agir du conseiller. Étant considéré dans le jargon parlementaire comme un “étranger”, c’est-à-dire tout ce qui ne relève pas d’une position élective, Jean-François Chaumière a été interdit d’accès à l’hémicycle et à l’enceinte du Parlement jusqu’à la fin de la session. Voilà une caresse qui met le conseiller de Pravind Jugnauth en joue.

Sandhya Boygah et Jean-François Chaumière se connaissent depuis qu’ils étaient tous deux au PTr. Les deux ont rejoint le MSM lors de la dernière campagne électorale.

L’examen en comité débute demain

Les amendements à la Declaration of Assets Act, votés à la fin de l’année dernière, présentés en première lecture

Trois séances fixées au début de la semaine prochaine. C’est en fin d’après-midi demain que débute l’examen en comité des dotations budgétaires de chaque ministère et organisme public. Cet exercice interviendra après le résumé des débats budgétaires du Premier ministre et ministre des Finances, Pravind Jugnauth, et les interventions du Premier ministre adjoint et celui du dernier orateur de l’opposition, un membre du backbench du PMSD, Adrien Duval. Est également prévue demain la présentation en première lecture seulement de la Declaration of Assets, texte voté en décembre dernier. Cet amendement vise à redéfinir le terme « assets » pour y inclure les placements faits dans des instruments financiers autres que les banques.

L’exercice d’examen des dotations budgétaires se poursuivra mardi et se terminera mercredi. Il n’y aura pas de questions ni de PNQ lors de ces trois séances, les Standing Orders les interdisant les jours de la présentation d’un budget, d’un budget supplémentaire et l’examen en comité des dotations.

PNQ: l’ouvrier chinois décédé à Côte d’Or était en situation irrégulière

Trois PNQ cette semaine de la part du leader de l’opposition Xavier Duval. La première lundi sur l’utilisation des réserves de la Banque centrale pour le remboursement de la dette publique a été le prétexte pour le Premier ministre de jouer sur la confusion pour dire qu’en octobre 2011, alors qu’il était ministre des Finances, Xavier Duval avait reçu Rs 1 milliard de la BoM, tout en omettant de dire que c’est un exercice récurrent, contrairement à ce qu’il entreprend et qui l’oblige à modifier la loi pour le faire. Tout ce que Pravind Jugnauth a eu à dire pour justifier sa décision très largement contestée est qu’il ne fera rien qui soit contre l’intérêt du pays. Il n’a pas réagi à l’appel du leader de l’opposition de renoncer à ce projet.

Plus instructive, la Private Notice Question de mercredi sur le décès accidentel d’un travailleur chinois sur le chantier de construction de Côte d’Or dans la circonscription de Pravind Jugnauth, celui du complexe sportif au coût de Rs 4,7 milliards. Très approximatif dans ses réponses, le ministre Soodesh Callychurn a bien dû pourtant admettre que la victime était en situation irrégulière sur le territoire mauricien puisque l’ouvrier était venu avec un visa d’affaires pour quelques semaines et qu’il était toujours sur le sol mauricien bien après l’expiration de son titre de séjour. Comme c’est la troisième victime enregistrée sur ce chantier, le leader de l’opposition a carrément demandé qu’il soit fermé en attendant que les conditions de travail et d’hébergement sur le site soient améliorées, mais le ministre Callychurn a vite fait de passer la boule à ses collègues dont celui de la Santé pour ce qui est de la qualité des dortoirs.

La dernière PNQ de Xavier Duval remonte à jeudi. Elle portait sur l’utilisation du CSR et a donné lieu à de vifs échanges entre anciens colistiers et potes de partis que sont Alain Wong et Patrice Armance. Le ministre a accusé le député de s’être rendu à Rodrigues avec les fonds alloués à l’ONG Faith, ce qu’a démenti le principal visé, qui a traité son ancien collègue du PMSD de « menteur ». Il a dû, à l’invitation de la Speaker, retirer ses propos.

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