Chagos — Post-Advisory Opinion de la CIJ : Nouvelle séquence du dialogue de sourds

une majorité de 13 contre 1, soit le Dissenting Pronounment de la juge américaine Joan Donoghue, la Cour internationale de La Haye somme la Grande-Bretagne de mettre un terme “dans les meilleurs délais” son occupation illégale de l’archipel des Chagos. Une opération “Lev Pake! Alle”. L’injonction du panel des juges des Nations unies, présidée par le Somalien Abdulqawi Yusuf, est sans appel contre Londres à ce sujet, même si dans l’immédiat, le dialogue de sourds de ces dernières années semble connaître une reconduction tacite. L’Advisory Opinion sur le démantèlement du territoire de la République de Maurice, énoncée en 182 paragraphes, souligne avec force par cette même majorité que “le processus de décolonisation de Maurice n’avait pas été complété légalement quand le pays avait accédé à l’indépendance en 1968 avec l’excision unilatérale de l’archipel des Chagos”. Le Bench de la Cour internationale de justice va encore plus loin en lançant un appel solennel selon lequel, “all Member States (of the United Nations) are under an obligation to co-operate with the United Nations in order to complete the decolonization of Mauritius”. Ce Pronouncement du Tribunal de La Haye représente une “grande victoire pour la persévérance de Maurice et des Chagossiens” aussi bien qu’un coup de chapeau historique au Minister Mentor sir Anerood Jugnauth pour son entêtement. Les observateurs anglais, qu’ils soient de la classe politique ou de la presse, ne peuvent que concéder que le lundi 23 février, la Grande-Bretagne s’est vu infliger “a huge blow” à sa réputation.

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L’une des conséquences logiques à la lecture de l’Advisory Opinion est que tôt au tard Maurice devrait se prévaloir de la présentation devant les instances compétentes des Nations unies d’une nouvelle résolution pour traduire dans la réalité la sommation à la Grande-Bretagne d’abandonner l’administration unilatérale de l’archipel des Chagos. Les premières consultations ont déjà été initiées par la Chagos Cell au Prime Minister’s Office en vue d’établir la feuille de route menant à cette prochaine étape.

Aussitôt de retour à Maurice en fin de semaine, les membres de la délégation mauricienne s’étant rendus à La Haye en présence du Premier ministre, Pravind Jugnauth. En Europe, ils ont également eu des premières discussions avec des membres du Legal Panel, dirigé par sir Philippe Sands, QC, avec des Inputs diplomatiques venant également de la Mission permanente de Maurice à New-York. Jusqu’à la mi-mars, l’Hôtel du gouvernement, qui continuera à multiplier les contacts à différents niveaux, ne prévoit pas de développements majeurs dans le dossier de l’Advisory Opinion sur les Chagos.

Et pour cause ! Au cours de ces deux semaines, Port-Lous s’attend à prendre connaissance des prises de position officielles de la Grande-Bretagne sur le Pronouncement de la Cour internationale de justice. “Jusqu’ici, les autorités britanniques ont tenté une parade avec la thèse que l’Advisory Opinion is not a judgment. Ou encore se cantonnant au réflexe que cette affaire relève d’un différend bilatéral en faisant accroire que c’est a misuse of powers which sets a dangerous precedent for other bilateral disputes. Dans les prochains jour, le gouvernement britannique devra se montrer plus explicite”, avance-t-on du côté de l’Hôtel du gouvernement en fin de semaine.

Même avec le paragraphe 178, soit “dès lors, le Royaume-Uni est tenu, dans le plus bref  délai, de mettre fin à son administration de l’archipel des Chagos, ce qui permettra à Maurice d’achever la décolonisation de son territoire dans le respect des peuples à l’autodétermination”, Londres continue à faire la sourde oreille, au cours de la semaine écoulée, que ce soit à la House of Lords ou à la Chambre des communes, les représentants du gouvernement de Theresa May ont rabâché la même rengaine.

“Nou pou all Chagos pou netway tom nou ban fami”

En pas moins de trois reprises à la Chambre des communes, jeudi, sir Alan Duncan, au nom du Secretary of State for Foreign and Commonwealth Affairs, a répété en réponse à des Parliamentay Questions que, “on 25 February the International Court of Justice (ICJ) issued an Advisory Opinion on the Legal Consequences of the Separation of the Chagos Archipelago from Mauritius in 1965. An Advisory Opinion is not a judgment. We are considering the detail carefully, including consulting cross-Whitehall and with our overseas posts. The defence facilities on the British Indian Ocean Territory (BIOT) help to protect people here in Britain and around the world from terrorist threats, organised crime and piracy. The UK has a long-standing commitment to cede sovereignty over BIOT when we no longer need the territory to help keep us and others safe”.

Après la première quinzaine de ce mois consacrée en majeure partie aux célébrations de la fête  nationale  du 12 mars, le gouvernement procédera à une évaluation de la situation par rapport à la Grande-Bretagne et en collaboration avec ses alliés de l’Union africaine, de l’Inde ou encore de la République populaire de Chine et d’autres pays amis et décidera de la Main Diplomatic Course of Action. “Nous pensons que d’ici à fin de ces deux prochaines semaines, nous devrons être en mesure de mieux apprécier les intentions de la Grande-Bretagne, qui n’a cessé de rappeler que l’Advisory Opnion est actuellement à l’étude avec ses Stakeholders à elle”, ajoute-t-on.

Ces mêmes milieux n’ont rien voulu dévoiler des détails des prochaines initiatives de Maurice. Ils n’ont pas voulu commenter ou apporter de précisions à la dernière déclaration d’Olivier Bancoult, le leader du Groupement des réfugiés des Chagos (GRC). A son retour de La Haye, mercredi matin, il avait déclaré “nou premyer etape ansam ek gouvernma Moris nou pou all Chagos pou netway tom nou ban fami. Gete si angle pou touye nou. Pou ena enn bato pou amen nou biento”.

Entre-temps, du côté de Lakwizinn du Prime Minister’s Office, l’on fait comprendre que “le Focal Point sur ce dossier demeure la Chagos Cell”. C’est en réponse à la montée en première ligne dès mercredi dernier du ministère des Affaires étrangères. Dans un communiqué faisant état d’une séance de travail post-Advisory Opinion de la CIJ en présence des cadres diplomatiques et administratifs, le ministre des Affaires étrangères, Vishnu Lutchmeenaraidoo, avait déclaré qu’«il faut éviter tout ego trip dans nos démarches ». Tout en s’évertuant de ne pas susciter de polémique au sein du gouvernement, les Top Chefs de Lakwizinn avancent qu’une coordination à toute épreuve, que ce soit par rapport aux initiatives diplomatiques ou encore de commentaires publics, s’impose en vue de s’assurer que “les dirigeants politiques puissent bâtir un héritage et léguer aux autres, et ce, sans orgueil, mais dans l’intérêt supérieur du pays”, reprenant ainsi les mots du communiqué officiel du ministère des Affaires étrangères.

Avec l’accueil unanime réservé à l’Advisory Opinion sur les Chagos en faveur de Maurice, un point semble ne pas vouloir faire l’unanimité. L’Hôtel du gouvernement réitère sa garantie que Maurice ne compte nullement remettre en cause la présence de la base militaire des Américains à Diego Garcia. Mais des voix dissidentes se font entendre. Ainsi, l’ancien président de la République, Cassam Uteem, a indiqué en des termes catégoriques qu’il est “résolument contre cette présence militaire américaine au coeur de l’océan Indien”.

Trois propositionsde Lalit

De leur côté, les militants de Lalit se mêlent de la partie en mettant en garde le gouvernement en des termes à peine voilés, réclamant la fermeture de la base de Diego Garcia : “Lalit calls on the Mauritian Government to beware of its strategy of trying to make money out of renting Diego Garcia to the USA, instead of calling for the decision to dismantle the base in the interests of peace”, qui soumet trois propositions à cet effet, dont l’affrètement d’un bateau pour une “official state visit” dans l’archipel des Chagos avec à bord des représentants du gouvernement, de l’opposition, de la communauté des Chagos et de la presse locale et internationale, l’acquisition par le gouvernement d’un bateau pour des opérations de pêche et de prospection de pétrole et autres ressources dans les eaux des Chagos et décréter une 22 e circonscription aux Chagos avec un représentant siégeant à l’Assemblée nationale.

Lalit ne manquera pas de souligner que le recours à la Cour internationale de justice a été un de ses chevaux de bataille de ces 40 dernières années. “This judgment vindicates 40 years of Lalit’s struggle. It was finally, first a Mauritian Labour Government that took a case to the UN Tribunal under the law of the sea and won it in 2015, and then the present MSM Government with Sir Anerood Jugnauth taking the lead, that finally went to the General Assembly via the African union and in its own right, for the ICJ case. This was what LALIT called for from the 1980’s”, devait s’enorgueillir Alain Ahvee au nom de Lalit.

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