Le PM agacé par le barrage de questions visant  Rakesh Goolaury et Ravi Yerrigadoo

En toile de fond, les commissions de Rs 84 millions payées à Nandanee Soornack et son partenaire dans l’affaire Dufry/Frydu et l’enquête BET 365

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Informations contradictoires sur les cinq derniers féminicides : Xavier Duval réclame une enquête par un magistrat en vue d’établir la vérité

Le Question Time n’a pas été de tout de repos pour le Premier ministre ce mardi. Il faut dire que les thèmes avaient matière à fâcher, les affaires Dufry/Frydu, BET 365 et le rôle de Ravi Yerrigadoo au sein de la Gambling Regulatory Authority. Si, initialement, en réponse à la question de Reza Uteem, Pravind Jugnauth a voulu frapper un grand coup en revenant sur les aspects croustillants du dossier Dufry et les commissions de Rs 84 millions payées à une compagnie du nom de Frydu du tandem Nandanee Soornack et Rajesh Gooljaury, les questions supplémentaires qui ont suivi sur ce dernier l’ont visiblement agacé.

Dans sa réponse liminaire, le Premier ministre a expliqué que l’actionnariat de Frydu avait à un moment changé pour inclure un certain Laurent Obadia — un partenaire d’affaires de Dawood Rawat, recruté d’ailleurs comme conseiller économique à l’ambassade de Maurice à Paris en 2007 et qui, de temps en temps, a fait les grands titres des journaux d’investigation dans des transactions pas très nettes — et Wigan Holdings. Qu’importe le mouvement des actionnaires, les commissions étaient toujours versées à une banque domiciliée en Suisse, a indiqué le chef du gouvernement.
Pour ce qui est de l’enquête dans cette affaire, qui a démarré en 2015, alors même que des alertes aux irrégularités avaient été lancées dès 2013, précise-t-il, et que Mauritius Duty Free Paradise était passée sous la tutelle du Premier ministre la même année — après avoir été sous le contrôle du ministère des Finances —, Pravind Jugnauth a dit qu’elle se poursuit toujours étant donné ses ramifications internationales.
Reza Uteem a alors voulu savoir si Rakesh Gooljaury a été interrogé et arrêté dans le cadre de cette enquête. Réponse du Premier ministre : une déposition a été prise du partenaire de Nandanee Soornack. Ahuri, le député du MMM lui demande pourquoi Rakesh Gooljaury n’a pas été arrêté, alors même qu’il a été établi que des commissions illégales avaient été payées. S’il y a un prima facile case, « I would have expected M. Gooljaury to be behind bars » a-t-il lancé.
Pravind Jugnauth a dit ne pas comprendre l’attitude du député et a insisté sur le fait que l’enquête prend du temps en raison de son volet international. Plus perfide encore, Ritesh Ramful demande alors pourquoi si tous ces paiements de commissions sont illégaux et qu’un des principaux protagonistes impliqués est Rakesh Gooljaury, ce dernier a été vu avec le Premier ministre lors des derniers Jeux des îles.
Pas content du tout, le Premier ministre a dit que ce n’est pas lui qui conduit les enquêtes et qu’il ne peut dire pourquoi un tel ou un autre n’a pas été arrêté. Après avoir répété qu’il s’agit d’une enquête qui implique d’autres pays, Pravind Jugnauth a ajouté que le député travailliste « must be aware that the former Prime Minister has a number of his friends abroad. I do not want to say more than that because the inquiry will reveal, in fact, who are the people who are involved in this case ».
Autre dossier, objet d’une question de Franco Quirin, qui a irrité le Premier ministre, l’affaire du jockey Holland, suspendu, impossible à remplacer, suspendu à nouveau, avec pour résultat qu’un comité a été institué par la Gambling Regulatory Authority pour faire la lumière sur toute cette affaire. À une question supplémentaire du député du MMM, Pravind Jugnauth a dit que ce comité est composé d’Anil Kumar Kokil, un ancien cadre des Finances et ex-CEO de la GRA, de Naresh Gujadhur, un simple membre du MTC, et Ravi Yerrigadoo. Aussitôt le nom de l’ancien Attorney General prononcé, il y a eu des ricanements venant des bancs de l’opposition. Avec un Veda Baloomoody particulièrement hilare.

«Pe met lisien vey sosis ! »

« Pe met lisien vey sosis ! » a murmuré le député du MMM, au grand dam du Premier ministre, qui commente « ki arrivé, to pé gagne riyé ? » Ce qui n’a pas atténué les ricanements sonores des députés de l’opposition. Franco Quirin a alors rebondi et a demandé au Premier ministre s’il trouve approprié que l’ancien Attorney General, qui lui-même est impliqué dans le scandale BET 365, dans les paris, puisse faire partie d’un tel comité d’enquête. Il n’y a rien contre lui, aucune charge provisoire, a répliqué le chef du gouvernement, ce qui n’a pas empêché Franco Quirin de relancer ses questions sur Ravi Yerrigadoo et demander s’il n’a pas paru comme avocat de la GRA en cour en avril dernier dans l’affaire de « off-course » et qui a conseillé le même organisme dans un conflit qui l’opposait au MTC et que ce n’est pas éthique qu’il fasse partie de ce comité.
Pas content du tout, le Premier ministre lance au député mauve qu’il ne sait rien de l’éthique et qu’il devrait aller rechercher des avis à ce sujet. Paul Bérenger, outré par l’attitude de Pravind Jugnauth, lui lance des remarques pendant que, lui, réplique « allé do rekin moustas ». La Speaker interviendra alors pour dire que la tranche des questions au Premier ministre est terminée.
Le même thème reviendra pourtant sur le tapis un peu plus tard avec Reza Uteem, toujours, qui demandera cette fois au ministre Mentor de dire ce qu’il est advenu de l’enquête initiée en 2017 sur les allégations formulées contre Ravi Yerrigadoo alors qu’il était Attorney General, le nombre d’arrestations effectuées et celui des poursuites engagées. Laconique et cassant comme à son habitude, sir Anerood Jugnauth dira qu’il y a deux cas dans lesquels le nom de Ravi Yerrigadoo est mentionné et que le CCID enquête toujours. Jusqu’ici, a-t-il indiqué, point d’arrestation ou de poursuite. Lorsque le député a, à juste titre, demandé pour quelle raison les enquêtes prennent autant de temps, le ministre Mentor a demandé si c’est lui qui est censé entreprendre des enquêtes.
Nullement intimidé, Reza Uteem rappellera que le Ravi Yerrigadoo dont on parle était un Attorney General et, donc, pas une personne ordinaire, qui a siégé au Conseil des ministres avant de devoir démissionner et que l’on ne peut pas se contenter de dire que l’enquête continue. Réponse de SAJ : il n’y a jusqu’ici aucun délit qui lui est reproché et l’enquête continue.
Le député a ensuite évoqué le cas de Hussein Abdool Rahim, qui avait changé de position face à l’ancien Attorney General. Reza Uteem a voulu savoir s’il a été, lui, poursuivi pour parjure, mais SAJ a soutenu que pour qu’il y ait enquête, il faut qu’il y ait eu une plainte. À Ravi Rutnah qui l’interrogeait sur une enquête initiée sur Hussein Abdool Rahim pour dénonciation fausse et malicieuse en écrit après qu’il s’est rétracté, là aussi, le ministre Mentor a dit ne pas être au courant de ces informations.
À part les sujets à scandale impliquant les proches du pouvoir et les enquêtes qui, comme par hasard, piétinent et n’aboutissent pas, c’est également les cas récents de féminicides et de violences domestiques qui ont dominé la première partie de la séance. Avec, d’abord, la Private Notice Question du leader de l’opposition sur les cas des cinq femmes mortes récemment sous les coups de leur mari ou de leur concubin. Dans sa réponse, la vice-Première ministre et ministre des Droits de la Femme a mis l’accent sur les mesures prises par les autorités pour mieux protéger les femmes, mais Fazila Jeewa-Daureeawoo a aussi insisté sur un problème de société difficile qui relève de situations personnelles complexes et qui, souvent, empêchent les victimes devenir de l’avant pour dénoncer leurs agresseurs.
Un gouvernement « au coeur de pierre »
Xavier Duval a dénoncé un gouvernement au « coeur de pierre » qui reste indifférent à la détresse des femmes battues et a déploré que celles qui sont décédées n’aient pas obtenu la protection de la police et des autorités, ce qui aurait pu éviter de tels drames. La vice-Première ministre a, elle, maintenu q’il n’y a pas eu plaintes formelles antérieures faites à la police ou à son ministère, sinon les actions nécessaires auraient été prises pour prévenir de telles agressions.
Dans un commentaire ultérieur suivant cet échange contradictoire, le leader de l’opposition a maintenu que les familles des victimes ont soutenu avoir alerté la police contre ces conjoints violents, mais que rien n’a été fait. Il a, en conséquence, demandé que ce soit un magistrat qui enquête afin d’établir la vérité sur ces tristes cas. Sur le même sujet, suite à des interpellations d’Aadil Ameer Meea et de Malini Sewocksingh sur le cas spécifique de Shabneez Muhammad, le ministre Mentor a indiqué qu’une enquête a été ouverte sur les policiers qui auraient pris du temps pour se rendre sur le lieu du drame après l’appel au secours formulé par les deux fils de la victime.
Après les questions, le Statement Time, avec le Premier ministre qui a utilisé cet item pour revenir sur une question qui lui avait été posée par le député travailliste Osman Mahomed plus tôt dans la matinée sur les conditions d’emprunt du Metro Express qui auraient été, selon lui, bien plus favorables sous l’ancien gouvernement. Pravind Jugnauth a cité des chiffres pour démontrer que c’est le contraire qui est vrai. Tant sur le montant à emprunter qui était de $ 830 millions contre $ 535 millions pour l’actuel gouvernement et que, sur le taux d’intérêt appliqué aussi, le deal est plus favorable avec une moyenne 0,87%, contre 2,57% sous l’ancien gouvernement.
Cette déclaration a été ponctuée de protestations venant des bancs de l’opposition. Shakeel Mohamed a voulu évoquer un problème de procédure, mais il en a été empêché par la Speaker, qui lui a demandé d’attendre la fin de la déclaration pour pouvoir intervenir. Elle a maintenu la même position malgré l’insistance du chef de file du PTr. Le Premier ministre a poursuivi en disant qu’il peut montrer le document du Conseil des ministres pour le prouver. Mais Shakeel Mohamed a estimé que Maya Hanoomanjee ne respectait pas les procédures qui autorisent un député à soulever un point d’ordre à n’importe quel moment. La Speaker a alors menacé de prendre des actions à son encontre.

Paul Bérenger s’est alors mis de la partie pour dire à Pravind Jugnauth « to pe fané koma to ti fané lot mardi », référence faite à son attaque contre Sushil Khushiram sur le traité de non-double imposition avec l’Indonésie. Le leader du MMM poursuit : « To enn ti lespri, to enn imitation Premier ministre. » Piqué au vif, Pravind Jugnauth sort son refrain préféré, « eta reste tranquille do moustass, requin moustass. » Et alors que le Premier ministre continuait avec sa déclaration sur les conditions des emprunts pour réaliser le projet Metro Express, Ravi Rutnah s’est, à son tour, mis debout pour évoquer un problème de procédure.
Ravi Rutnah “out”

La Speaker lui a dit qu’il ne pouvait intervenir et que la décision qui s’est appliquée à Shakeel Mohamed le concernait aussi. Le député est resté debout et a semblé dire qu’il voulait revenir sur les remarques formulées par le leader du MMM à l’encontre du Premier ministre. Comme le député du ML n’a pas obtempéré à ses appels répétés pour qu’il reprenne son siège, Maya Hanoomanjee l’a expulsé de l’hémicycle.

À noter que la Speaker a, après avoir écouté les enregistrements, invité le député Shakeel Mohamed à retirer ses propos visant Étienne Sinatambou, prononcés la semaine dernière lors des échanges sur les irrégularités notées lors du transfert des déchets à Mare Chicose. Le député qui avait parlé de « cover-up » a retiré ses propos.

Il n’y a eu qu’un seul texte voté ce mardi, celui de Nando Bodha qui modifie le Road Traffic Bill pour permettre l’introduction du permis de conduire digital et le paiement des amendes routières dans n’importe quelle cour de justice du pays et par une personne tierce et pas seulement le contrevenant. Le Children’s Bill, lui, n’a pas été débattu et ne le sera que le 8 octobre.

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