Minable

Ils étaient vraiment fatigués. Avec l’avalanche de tuiles et de mauvaises nouvelles qui leur tombent sur la tête, ils n’en pouvaient visiblement plus. Et ils ont donc décidé de mettre le parlement en veilleuse jusqu’au 18 octobre.

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Le temps de souffler et d’aller tâter le pouls, non pas de la population dont on connait déjà le sentiment et le ressentiment, mais de leur propre électorat, désemparé depuis l’accumulation des affaires et qui culminent avec le sniffing, les drôles d’installations qui se produisent à Agaléga et de la rétrogradation du pays par Moody’s.

Les communicants du gouvernement viendront rabâcher que cela a toujours été le cas. Que le Parlement aille toujours en vacances fin juillet/début août, mais doit-on rester prisonnier du passé à l’ère du numérique, du système voice-to-text et de la retransmission directe et intégrale des débats ?

Faut avancer avec son temps. Nous ne sommes plus à l’époque où les dactylographes devaient tout noter et retranscrire juste après et faire des imprimés à l’intention des députés et pour les besoins du Hansard et de l’archivage en général. Et qu’elles aient légitimement besoin de repos.

Tout cela fait qu’une révision des Standing Orders datant de 1995 est devenue impérative voire urgente. Le temps imparti aux questions, deux séances par semaine étalées sur toute l’année avec des pauses de 15 jours et des dates prédéfinies pour le calendrier parlementaire.

Dans d’autres juridictions qui s’inspirent du modèle de Westminster et au House of Commons lui-même, les pauses entre séances, généralement courtes, sauf pour les vacances estivales, le « summer recess », sont connues bien à l’avance.

Rien n’empêche que l’on revisite le déroulement pratique des délibérations de l’Assemblée nationale. Pour plus de démocratie et surtout plus de transparence. Il y a aussi les critères pour désigner un Speaker qui doivent être revus. On a vu les dégâts que des agents politiques débridés pouvaient causer à la réputation d’une institution.

Si, pour la direction de l’ICAC, le législateur avait bien fait de créer, en 2002, un Appointments Committee, Président/Premier ministre/leader de l’opposition-qui fut malheureusement sabordé en 2006 au lieu d’être simplement réaménagé- pourquoi, dans un esprit vraiment démocratique et un souci d’équité ne pas rendre un tel comité pérenne pour entendre et choisir éventuellement le Speaker, le commissaire électoral, le commissaire de police, le trio directeur de l’ICAC et le gouverneur de la Banque de Maurice.

Avec la publication du résultat des choix respectifs des trois membres de l’Appointements Committee et les raisons des réserves, s’il y en a eu, le vote majoritaire étant entendu comme étant le choix définitif.

Cet Appointments Committee pourrait éventuellement les convoquer si, d’aventure, leur organisme déraillait et qu’ils étaient eux-mêmes impliqués dans des affaires pas très orthodoxes.

Cette réforme s’impose parce qu’on sait comment les consultations pré-nominations de quelques directeurs et présidents d’organismes publics, prévues par la loi avec le leader de l’opposition, sont effectuées. Le président ou le Premier ministre, par le biais de leurs services, écrivent ou téléphonent au leader de l’opposition pour dire qu’ils proposent X. Si le leader de l’opposition dit non à X, ses objections sont tout simplement ignorées et X est nommé.

Et s’il faut aller plus loin, pourquoi pas ? Que les directeurs désignés par l’Appointements Committee puissent être entendus sur leur mission et leur vision pour des commissions parlementaires. Elles existent dans tous les pays démocratiques sauf à Maurice.

A part les comités de fonctionnement interne qui relève de l’intendance, il n’y a que le Public Accounts Committee qui a une vraie vocation démocratique puisqu’elle est présidée par un élu de l’opposition. Mais ce n’est pas suffisant.

Les décisions litigieuses et contestées du Speaker, comme les suspensions des députés auraient dû être soumises à un arbitrage indépendant, une instance de premier recours avant celui ultime de la cour suprême. Pour un gain de temps et pour que justice soit faite sans délai.

On peut imaginer aussi qu’un Immigration Bill soit soumis à un sénat pour arbitrage. Mais ne rêvons pas. Si l’on veut appliquer le grand chambardement que réclame la population, il n’y a pas 36 solutions. La rupture avec 54 ans d’un régime qui nous a bien servi, lorsqu’il y avait des hommes d’honneur aux commandes, est une nécessité absolue.

Sinon on est condamné au triste spectacle de mardi dernier avec un Premier ministre indélicat invitant Veena Ramgoolam dans un litige. Il a entrainé l’épouse de l’ancien Premier ministre dans un débat qui était censé s’arrêter à une enquête policière sur les allégations de commission autour de la réclamation des frais de déplacement médical de Navin Ramgoolam. Il a choisi de faire une chronologie que personne ne lui avait demandé.

Ce ne fut pas la seule veulerie non sanctionnée de celui qui fait tout pour rester un petit chef de parti en oubliant trop souvent qu’il est Premier ministre de la république. Lui qui respecte les codes lorsqu’il s’agit de répondre aux questions et qu’il désigne Prakash Maunthrooa comme Mr P.M. et même pour Sherry Singh comme Mr S.S. a, mardi, étalé le nom de Daneshwar Damree en entier sans que son Loudspeaker ne le rappelle à l’ordre.

Et comme si tout cela n’était pas déjà assez petit, Pravind Jugnauth a fait encore mieux en fin de soirée ce même mardi. Les députés de l’opposition se sont retirés sans fracas ni vociférations lorsqu’il a entamé le résumé des débats sur l’Immigration Bill.

Au lieu d’ignorer leur geste et de passer à sa synthèse, il s’est comporté comme ses back benchers voyous en lançant toutes sortes de remarques en leur direction. Il y a eu le « al manz bondié aster », qui, selon les critères du MSM, pourrait constituer un « blasphème » vis à vis de ceux qui prennent la communion, les « al dans Macarena » en passant par les « lions, coq, requin moustache et corbeaux ». Plus minable que ça tu meurs !

 

JOSIE LEBRASSE

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