Covid : Arvind Nursamah, 44 ans, 
doublement vacciné, emporté à l’hôpital ENT

Il fait partie des 197 morts du Covid annoncés officiellement par le ministre de la Santé, Kailesh Jagutpal. Et notamment parmi 14 personnes âgées de moins de 60 ans des 42 décès recensés durant la semaine écoulée.

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Et plus particulièrement parmi les six patients (des 42 décédés) sans comorbidités que le Covid a malheureusement emportés. Pour sa famille, outre la douleur de cette disparition subite, c’est l’incompréhension totale. D’autant qu’Arvind Nursamah, un homme costaud, à la santé solide, sans aucune hospitalisation de son vécu, était doublement vacciné contre le Covid. Et cela, depuis plusieurs mois. Que s’est-il passé ? Comment n’a-t-il pas survécu ? A-t-il reçu les soins nécessaires à l’hôpital ENT où il a été transféré ? Autant de questions sans réponse pour sa famille, qui pleure un homme formidable, un père de famille dévoué, un mari exemplaire, qui laisse derrière lui une veuve et trois enfants âgés de 13 ans, trois ans et demi et un petit dernier d’un an et demi.

Il y a près d’un mois, Arvind Nursamah a fêté ses 44 ans. Ce père de famille officiant comme chauffeur privé pour une famille des hautes Plaines Wilhems avait de nombreux rêves pour ses trois fils. Raison pour laquelle il ne rechignait pas à travailler pour pouvoir subvenir à leurs besoins, pour que ses petits hommes grandissent confortablement. « Sa famille, c’était son tout. Il ne jurait que par elle », dit péniblement son épouse Jessy Nursamah. Il y a deux semaines, à la mi-octobre, les enfants sont tombés malades. Ils ont fait chacun à tour de rôle un peu de fièvre, raconte la veuve. Par la suite, c’est Arvind lui-même qui a été contaminé. Mais il n’aimait pas rester à la maison pour rien, il est aller à son travail, comme d’habitude, après s’être soigné avec des antalgiques.
Test antigène négatif

La maisonnée étant guérie, la routine a repris. « Le dimanche, comme à son habitude, il a été faire des courses pour la maison et surtout pour les enfants », se souvient Jessy Nursamah. « Il était en forme. Il a cuisiné pour nous et il était fier d’avoir fait manger les petits avec ses mains ce jour-là », dit-elle. Le lundi 24, il s’est rendu comme d’habitude à son travail. Mardi, néanmoins, au réveil, Arvind confie à son épouse qu’il se sent un peu fatigué. Si elle lui demande de rester à la maison pour se reposer, lui insiste qu’il allait se sentir mieux plus tard et part travailler. Il rentre néanmoins plus tôt que d’habitude, car il ne se sent pas en forme. Il demande d’ailleurs à son épouse de récupérer les enfants à la garderie, car il préfère se reposer un peu. Au retour de Jessy à la maison, elle le retrouve au lit. Lorsqu’elle l’approche, elle constate que son front est bouillant. Elle prend sa température, qui se révèle fiévreuse, avec 39°C au compteur. Opérant dans le domaine médical pour le compte d’une clinique privée, elle prend rapidement l’initiative de faire faire un test antigène à son époux. Le résultat est négatif.

Soulagée, Jessy Nursamah met alors cette poussée de fièvre de son mari sur le compte d’une grosse fatigue cumulée et écarte donc la thèse qu’il aurait contracté le Covid. Elle lui met tout de même des compresses pour faire baisser la température qui, une heure plus tard, avait effectivement chuté à 37°C. Son mari lui confie d’ailleurs qu’il se sent mieux. S’il part prendre sa douche, il n’arrive toutefois pas à s’alimenter.

Le mercredi matin, aux alentours de 5h, alors que sa femme se prépare pour se rendre au travail, Arvind l’assure qu’il se sent mieux et avance même qu’il ira travailler. « Je lui ai dit qu’il fallait qu’il se repose, mais lui, il voulait aller travailler. J’ai continué à vaquer à mes occupations, pensant que plus tard j’allais à nouveau insister pour qu’il reste à la maison », dit Jessy. Mais voilà qu’alors qu’elle prépare ses enfants pour la garderie, elle note que son mari a dû mal à parler. « Il n’arrivait pas à articuler. Je n’arrivais pas à comprendre ce qu’il voulait me dire », relate Jessy, qui se hâte d’aller quitter ses enfants à la garderie non loin de leur domicile.

Prenant conseil auprès de ses collègues dans la clinique où elle travaille, Jessy Nursamah décide d’y conduire rapidement son époux pour une consultation aux urgences. Si Arvind Nursamah avait du mal à parler, il réussit tout de même à marcher du parking à la consultation du médecin à la clinique. Après un premier examen, le médecin annonce qu’Arvind a contracté une méningite — une inflammation des méninges, les membranes qui protègent le cerveau et la moelle épinière, et recommande des examens plus poussés, dont un CT-Scan. Le père de famille doit aussi être hospitalisé en raison du traitement par intraveineuse prescrit par le médecin. Dans l’attente de son admission, la clinique procède aux examens recommandés, dont un test PCR, selon le protocole de la clinique.

Mais pendant qu’il effectue son CT-Scan, Arvind Nursamah convulse. Conduit immédiatement aux urgences à nouveau, il est placé en observation, mais fait plusieurs autres crises de convulsion, avant de sombrer dans le coma. Entre-temps, les résultats de son test PCR tombent : il est positif au Covid-19.

Il n’arrivait pas à articuler
Un choc pour sa femme car, la veille, le test était négatif. Le cas d’Arvind Nursamah atteint de Covid et de méningite est considéré comme une première pour les médecins, qui lui administrent rapidement un traitement. Cependant, le protocole sanitaire oblige — ce n’est qu’une semaine après que les autorités ont donné l’aval aux cliniques privées pour prendre en charge les patients symptomatiques du Covid —, Arvind Nursamah doit être transféré à l’hôpital ENT. Chose que son épouse ne souhaite absolument pas. « Mo pa ti anvi li ale labatwar. Li pa ti pou dakor li mem. Nou tou kone kouma ENT ete laba », dit-elle. D’autant qu’il y a un mois à peine, un cousin d’Arvind, un habitant du Nord, atteint de Covid, y est décédé de la maladie.

Après plusieurs démarches, Arvind Nursamah est finalement transféré dans l’ambulance de la clinique au Covid Ward de l’hôpital Victoria. En raison du virus, aucun membre de sa famille ne peut l’y accompagner. Les maints appels effectués par Jessy et d’autres proches d’Arvind au Ward 18 pour avoir des nouvelles du patient sont vains. « Telefonn-la rest sone mem, personn pa pran », se remémore Jessy Nursamah. Le lendemain, grâce à un membre du personnel de l’hôpital avec qui ils sont en contact, les proches d’Arvind apprennent qu’il est sur le point d’être transféré à l’hôpital ENT. Cela, sans que sa famille n’ait été averti et donné son consentement.

« C’était un stress total pour nous tous, car nous savons que l’ENT c’est l’abattoir. Nous craignions pour sa survie », dit l’épouse d’Arvind Nursamah. Des informations que la famille arrivent à glaner auprès du personnel de l’hôpital ENT, ils apprennent que son état ne s’est ni amélioré ni détérioré. « Le médecin nous a dit qu’il fallait attendre quatre jours », dit Jessy, ajoutant : « Nous avions l’espoir qu’il se réveille de ce coma et rentre à la maison. » Cependant, vendredi matin, à 6h35, un appel téléphonique de l’hôpital apprendra à la famille la mauvaise nouvelle : Arvind Nursamah avait succombé.

« Il n’a jamais été malade »
Jessy, son épouse, n’en revient pas. « Pourtant, à la clinique, il a été pris en charge par les médecins et infirmiers envers qui nous sommes très reconnaissants », dit-elle. « Arvind est sorti de la maison en marchant et il n’est jamais retourné. Il était pourtant plein de vie. Il était costaud. Jamais il n’a été malade », dit-elle. En 19 ans de vie commune, pas une fois il ne s’est plaint d’être malade. « C’était un bon vivant qui avait des projets de vie pour ses trois fils. Il était un père de famille exemplaire. Son départ est difficile à accepter. Dans ces conditions surtout », pleure-t-elle. La seule chose que la famille sait, c’est qu’il a contracté une méningite et le Covid. Et le CT-Scan effectué en clinique n’a rien révélé, les médecins de l’hôpital ENT ont fait comprendre à la famille d’Arvind Nursamah qu’il avait eu un blood clot.

« Comment attrape-t-on une méningite ? Est-ce le Covid qui lui a donné cette méningite ? Quels soins lui ont été prodigués à l’ENT Hospital ? A-t-il été pris en charge comme il faut ? » Autant de questions qui demeurent sans réponse pour sa famille, qui arrive difficilement à comprendre la disparition subite d’un homme fort et en bonne santé.

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