Comme un feu d’artifice

Voici venu le moment de la dernière chronique de l’année. Le temps de passer en revue une actualité climatique une fois encore dominée par son lot de catastrophes, mais aussi de prévisions des moins réjouissantes pour les années à venir. Entre températures extrêmes, feux de forêts et vagues de sécheresse, en passant par des précipitations démesurées et des inondations dévastatrices, le tout entrecoupé par une COP aussi futile que prévisible et des séismes meurtriers – bien que n’ayant pour le coup aucun lien anthropique –, 2023 aura définitivement marqué un tournant dans l’histoire de l’humanité, et du vivant en général.
Ainsi, cette année, aucun continent n’aura été épargné. Du côté de l’Amérique, les intempéries auront frappé les États-Unis en mars, laissant un triste bilan dans quelques États, où une vingtaine de vies auront été emportées. Tandis que quelques mois plus tard, plus au nord, au Canada, des méga-feux, parmi plus de 6 000 recensés dans le pays en quelques semaines, auront réduit en cendres plus de 15 millions d’hectares de forêts. Des incendies qui n’auront pas non plus épargné l’île de Maui, à Hawaï, faisant 100 morts et 1 000 disparus. Pendant qu’en région méditerranéenne, des feux violents dévastaient le sud de l’Europe et l’Afrique du Nord, faisant un lourd tribut humain, comme en Algérie, où une quarantaine d’âmes ont été fauchées par les flammes. Ou encore en Grèce et en Italie, où les incendies auront aussi fait des victimes.
En Asie, ce sont d’autres phénomènes qui auront diversement frappé, à commencer par les tempêtes et les inondations. En Chine, des pluies records se seront ainsi abattues, occasionnant des crues soudaines et la perte de dizaines de vies. Avec, en août, du côté de Pékin, des précipitations atteignant 745 mm, constituant ainsi un record depuis… 1883. Bilan : une cinquantaine de morts, notamment dans des glissements de terrain. Et ce n’est pas tout, puisqu’une semaine après seulement, la province de Xinjiang établissait elle aussi un record, celui de température, avec 52,2 °C. Du jamais vu en Chine, mais que le Tadjikistan et le Pakistan auront cette année aussi connu, causant cette fois la perte de dizaines de vies.
Si la Tunisie a connu une longue période de sécheresse, situation qui perdure depuis cinq ans déjà, avec un flagrant déficit en pluies, la Libye voisine, elle, aura connu son exact contraire, avec des inondations dévastatrices causées par la tempête Daniel, faisant officiellement plus de 5 000 morts, et officieusement plus de 10 000. Une situation qu’aura également connue, beaucoup plus loin et un plus tard, l’Australie, bien qu’avec un bilan humain moindre.
Mais le pire n’est pas là. Cette année pourrait en effet marquer un tournant majeur en termes de surchauffe de la planète. L’organisation américaine indépendante Berkeley Earth, composée d’experts en matière de climat, estimait il y a quelques jours à peine à 99% le risque que 2023 dépasse les +1,5 °C de réchauffement par rapport à l’ère préindustrielle. Soit le niveau maximal à ne pas franchir, d’après les termes de l’Accord de Paris. Sous peine, sinon, d’assister à une cascade d’événements catastrophiques. En principales causes : le réchauffement climatique dû aux activités humaines et l’arrivée d’El Niño.
Mais cette année se sera aussi terminée par la COP de Dubaï, censée dégager un accord fort sur la question climatique, mais qui, en réalité, n’aura été qu’un pétard mouillé. Une déception de plus, serait-on tenté de dire, tant ces conférences se seront transformées, au fil des ans, en plateforme politique, pour ne pas dire économique. Certes, les intentions y auront toujours été majoritairement louables, mais les freins n’auront inversement jamais été aussi puissants lors du passage à l’acte. Avec, aux manettes cette année, un tout aussi puissant lobby des pays producteurs d’énergie fossile, qui n’entendent pas tuer la poule aux œufs d’or tant qu’elle pourra en pondre.
Au final, si l’on devait résumer l’année écoulée, 2023 aura connu le pire et… le pire. Le pire en matière de cataclysmes, naturels pour les séismes et anthropiques pour les autres, et le pire en termes de mesures que nous nous serons refusé de prendre. À ce rythme, la probabilité que l’homme finisse sur la liste des espèces disparues n’aura jamais été aussi forte. Avec le risque de ne laisser comme témoin de notre passage qu’une courte évolution épisodiquement éclairée par quelques éphémères lueurs d’esprit, avant qu’elle ne fonde dans la nuit éternelle après une bruyante explosion.

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Michel Jourdan

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