Le temps d’avant

Depuis vendredi, l’île Maurice est sous le coup d’un avis de « pluies torrentielles » qui a été rétrogradé, samedi, à un avertissement de « fortes pluies » par la météo. Ces « pluies torrentielles » ou « fortes averses », provoquées par « des nuages actifs » qui rendent des « routes impraticables », font que les ruisseaux se transforment en rivières « sortant de leurs lits » pour provoquer des « accumulations d’eau » et des « inondations locales » et parfois « soudaines » dans les « zones inondables » déjà saturées. Dans les villes et les villages, les canaux et autres les voies d’évacuation naturelles — sur et autour desquels des permis de construire ont été délivrés par les autorités dites responsables — se transforment en fleuves emportant tout sur leur passage vers la mer. Tous les creux sur leur route sont transformés en bassins où s’embourbent les voitures, au risque de noyer leurs moteurs. Les intempéries ont déjà transformé certains quartiers de nos villes et nos villages en lagunes vénitiennes. Avec la persistance du mauvais temps, un petit entrepreneur aurait intérêt à se lancer dans un business de gondoles en demandant de l’aide à la Banque de Développement. Par ailleurs, cette climatologie provoque des brouillards, réduit la visibilité, rend plus difficile la conduite et augmente considérablement les embouteillages.

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Ce qui précède n’est pas le pitch du dernier film catastrophe hollywoodien ou sud-coréen, mais un résumé du temps qu’il fait à Maurice ces dernières semaines. Ce mauvais temps est devenu le temps normal et au lieu de regretter, avec nostalgie, celui d’avant, il faut apprendre à vivre avec. À s’adapter en changeant notre mode de vie. Il va falloir faire comprendre à nos dirigeants qu’il faut apprendre à vivre avec le climat et mettre fin à la politique de congés scolaires et de fermetures des bureaux de l’administration pour cause de mauvais temps. Il faut mettre fin à ce traitement de faveur qui autorise les fonctionnaires à rentrer chez eux plus tôt, alors que cette même “facilité” n’est pas accordée aux employés du secteur privé et aux self-employed. Jusqu’à preuve du contraire, le mauvais temps handicape tous les Mauriciens de la même manière, qu’ils soient fonctionnaires ou pas ! Il va falloir apprendre à profiter des accalmies pour nettoyer son jardin, étendre sa lessive ou aller faire ses commissions de la semaine. Tout comme ailleurs dans le monde, la vie s’est organisée, malgré la neige, la canicule, les moussons, les grandes sécheresses, les inondations, les grandes chaleurs ou les périodes de froid extrême. Il y a encore quelques mois, les alertes aux pluies diluviennes, déclenchées par des précipitations ayant dépassés les 100 mm, étaient l’exception à Maurice. Aujourd’hui, elles sont aujourd’hui la règle. Le parapluie et le pardessus ne sont plus une option, mais une nécessité. Nous sommes obligés d’admettre que nous subissons déjà le climate change prédit depuis belle lurette. Au lieu de regretter le temps d’avant, nous sommes obligés de nous adapter à celui du temps présent.

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Dimanche dernier, j’ai oublié d’inclure dans la caraye politique des actions des partis d’opposition la dernière déclaration de Nando Bodha, l’ex-SG du MSM passé à l’opposition, qui dit vouloir faire la politique autrement. Lors d’une réunion de son parti, le leader du Rassemblement Mauricien a déclaré « que ni Navin Ramgoolam ni Pravind Jugnauth ne pourront sauver le pays. » Poussant plus loin son analyse, il a affirmé que « Navin ne changera pas ». Ce qui a poussé les ténors du PTr, scandalisés qu’on puisse critiquer leur leader bien-aimé, à réclamer une réunion de leur BP pour répondre à l’attaque. Encore une crise au sein de… l’Entente de l’Espoir qui semble les collectionner. Encore une “initiative” qui va démontrer les faiblesses de l’opposition, faire le jeu du MSM et augmenter les chances de réélection de son leader pour 2024. Les mauvaises langues politiques affirment qu’en disant que ni Navin Ramgoolam ni Pravind Jugnauth ne peuvent sauver le pays, Nando Bodha se pose en sauveur potentiel. D’autant que selon la règle non écrite mais respectée de la politique — ce que Pravind Jugnauth qualifie de « réalités électorales » — Bodha a le pedigree nécessaire pour candidater au poste de Premier ministre. Mais emprunter cette voie, tout en affirmant vouloir faire la politique autrement, c’est suivre les recettes d’avant. De ce temps politique qui, comme celui de la météo, est bel et bien fini. Il faut tout au moins l’espérer.

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