AVEC 7 UNITÉS AU SC : Les espoirs de Martine

Avec ses 7 unités, Martine (prénom fictif) a été l’une des meilleures de son collège lors des derniers examens de SC. Depuis, elle s’est remise au travail avec sérieux, souhaitant terminer ses études secondaires brillamment. Vivant dans un village du nord, l’adolescente craint cependant que la précarité dans laquelle elle vit soit un obstacle. Issue d’une famille brisée où les moyens sont limités, et après une enfance difficile marquée par la violence, elle veut aujourd’hui garder espoir.
Il y a quelques semaines, lorsqu’elle a eu ses résultats sous les yeux, Martine a ressenti un grand bonheur. “Je savais que j’avais fait de mon mieux lors des examens. Je m’attendais à décrocher environ 15 unités.” C’est aussi ce qu’espérait sa mère : une note raisonnable qui lui permettrait de passer à l’étape suivante. À un point près, elle obtenait l’excellence, mais les 7 unités ramenées ont amplement fait la fierté et la joie des siens. Pour y arriver, Martine a travaillé très dur : “Comme je n’avais pris aucune leçon, j’ai dû travailler deux fois plus que les autres élèves.”
Précarité.
Les conditions étaient loin d’être en sa faveur. La collégienne a dû composer avec les moyens financiers très limités de sa famille et la situation de précarité où elle se trouve. Dans la journée, en guise de bureau, elle s’était contentée de la petite table placée dans l’étroit couloir menant à l’arrière-cour de sa maison pour travailler. Le soir, elle faisait ses devoirs et révisait sur le buffet cassé bricolé en table et placé dans sa chambre à coucher. Une petite pièce sans fenêtre, souvent inconfortablement réchauffée par la toiture en tôle de la maison, alors que les murs en briques, blancs et non crépis, suintent lorsqu’il pleut.
Sa mère n’ayant pu remplacer son lit cassé, Martine dort sur un matelas posé à même le sol. Ses affaires ont été rangées dans la vieille armoire abîmée offerte par le grand-père. Quelques petites babioles d’adolescents apportent un peu de couleur à ce monde sombre. Sur la table sont rangés ses biens les plus précieux : ses cahiers, ses livres et manuels scolaires, ainsi que ses dictionnaires de poche. Terminée l’euphorie créée par ses excellents résultats, elle s’est déjà remise au travail avec autant de rigueur que l’année dernière.
Motivée.
Plus tard, elle sera peut-être enseignante ou s’engagera dans un domaine requérant une bonne maîtrise des langues. Elle a choisi l’anglais, le français et la sociologie comme matières principales. Martine n’a pas encore vraiment réfléchi sur ce que sera sa carrière. Actuellement en Lower Six, elle préfère se concentrer sur ses études pour obtenir des résultats qui lui permettront d’accéder à une université lorsqu’elle quittera le collège. Mais elle espère ardemment un avenir différent de ce qu’est son présent et de ce qu’a été son passé. Un seul voeu, pour tout dire : “Je souhaite plus tard vivre dans un cadre confortable.”
Martine est toutefois inquiète. Motivée et déterminée, la collégienne a le potentiel pour briller. Depuis peu, elle prête une oreille attentive à ceux qui, à l’école et à la maison, lui rappellent qu’elle pourrait même être lauréate. “Mais j’ai peur de ne pas pouvoir continuer. Qu’adviendra-t-il si ma mère n’arrivait plus à se débrouiller pour me soutenir ?” Recevant une pension d’un peu plus de Rs 2,000 jusqu’ici, cette dernière s’arrange “kouma mo kapav”, et compte sur le peu de soutien d’un proche pour veiller aux besoins de sa fille et de ses deux fils aînés. Mais dans les conditions précaires où vit la famille, rien n’est certain. Martine a raison de penser que tout peut basculer et que ses rêves finissent par se briser.
Battante.
Déjà, les moyens lui manquent. “Quand j’ai débuté la Lower, je me suis rendu compte que les choses sont un peu plus difficiles. J’ai compris qu’il me fallait être aidée dans mes études. J’ai décidé de prendre des leçons.” Deux de ces cours lui sont offerts par ses enseignants. La leçon supplémentaire que lui paye sa mère est de trop pour le budget familial : “Si j’avais eu la possibilité, j’aurais pris des leçons dans la quatrième matière également. Mais ma famille ne peut se permettre cela.”
Ayant eu une unité en Computeur Studies au School Certificate, Martine a choisi cette matière au niveau subsidiaire, mais se rend compte désormais du gros handicap qui la ralentit. Sa famille ne peut lui offrir l’ordinateur qui l’aurait aidée à travailler, un outil indispensable pour ses recherches et ses révisions.
Entre des sourires timides et des silences, Martine laisse pourtant comprendre qu’elle ne baissera pas les bras. Elle donnera le meilleur d’elle-même dans son travail. Sous son apparence d’adolescente sans histoire, la collégienne s’est forgée un caractère de battante pour surmonter l’adversité à laquelle elle doit faire face depuis l’enfance. “Elle n’en parle pas souvent, mais je sais qu’elle n’a rien oublié. Il y a quelque temps, elle m’a dit qu’elle se souvenait très bien de la fois où nous avions dû fuir la maison à cause de son père”, nous confie sa mère. Porté sur la bouteille, l’homme se souciait à peine des besoins de ses enfants et de son épouse.
Réussir sa vie.
Femme battue, cette dernière passait régulièrement ses nuits dehors. Jusqu’à ce qu’elle se décide d’extraire ses enfants de cet enfer, elle aura vainement frappé à toutes les portes pour trouver de l’aide. “Depuis cette époque, je me débrouille pour subvenir à leurs besoins. Je demande de l’aide où je peux, même si mes enfants n’aiment pas que je sollicite le soutien d’autres personnes. Mais je n’ai pas le choix et je veux qu’ils ne manquent de rien.”
Les portes et fenêtres en bois brut de la maison ont été largement ouvertes pour rafraîchir la pièce qui sert de salon. Une cuisine rudimentaire partage l’espace où une chambre a été improvisée derrière une autre vieille armoire. Martine aide parfois sa mère pour le ménage. Mais cette dernière évite que sa fille ne soit distraite par autre chose que ses études et préfère faire le maximum pour elle. “Mon souhait serait qu’elle réussisse sa vie. Qu’elle apprenne à se débrouiller d’elle-même et qu’elle ait un foyer où elle pourra vivre heureuse, loin de tout cela. Ma fille est une bonne enfant; elle mérite amplement ce bonheur.”

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