Cancer du sein : le CDM contraint de fermer son centre de conseil et de thérapie

C’est non sans tristesse que certains ont appris la décision du Centre des Dames Mourides (CDM) de mettre un terme à son service de dépistage de cancer du sein et de fermer son centre de conseil et de thérapie. Cela fait suite au refus de la National Social Inclusion Foundation (NSIF) de reconnaître l’association comme un Ongoing Service Provider . La directrice du CDM, Allia Syed Hossen-Gooljar, lance un appel à la NSIF pour qu’elle « donne une explication et revoie sa décision. Qu’elle vienne voir ce qui se passe sur le terrain pour comprendre le travail crucial que l’on fait », plaide-t-elle.

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Le Breast Cancer Detection du CDM, centre de conseil et de thérapie, a été contraint de fermer ses portes. La décision, prise par l’exécutif en novembre dernier, prend effet en ce mois de janvier. Le CDM se voyant privé de fonds nécessaires pour la continuité de ce service – le budget estimé pour 2022 est de Rs 3 millions, n’a eu d’autre choix que d’y mettre un terme. Sur les réseaux sociaux, plusieurs internautes expriment leur incompréhension et leur tristesse.

Le CDM fait comprendre que durant les deux dernières années, le centre a reçu seulement Rs 500 000 par année de la NSIF et a donc accusé des pertes de près de Rs 2millions annuellement. Pour combler ce déficit, le CDM a réduit ses services et son personnel au minimum. Finalement, l’association a été contrainte de fermer après que tous ses appels envers la NSIF sont restés vains.

L’association souligne qu’elle offrait jusqu’ici des tests de dépistage du cancer du sein, un service de conseil et de thérapie aux femmes vulnérables des régions de Mesnil, Castel, Palmerstone, Clairfonds, Riverside, Phoenix et les endroits alentours. De plus, le CDM a été un partenaire privilégié du ministère de l’Egalité des Genres en 2017-2018 dans le dépistage du cancer du sein auprès de plus de 1500 femmes à travers l’île.

« C’est avec un grand regret que le CDM met un terme à un service aussi crucial pour les femmes les plus vulnérables à Maurice et à Rodrigues. C’est avec beaucoup de peine que nous avons pris cette décision car c’est un projet que nous avons commencé depuis 2007. Presque tous les jours des femmes viennent vers nous pour le problème de cancer du sein qui est en hausse. Au CDM, nous avons une approche différente : nous allons vers les femmes, à la prison, dans les centres sociaux, dans les maisons de retraite », confie Allia Syed Hossen-Gooljar.

Elle explique que dans la culture mauricienne, les femmes ne sont pas habituées à regarder leur corps. « Elles ne veulent surtout pas entendre parler de cancer. Il faut donc aller vers elles, les encourager à faire ce dépistage. C’est toute une approche… C’est pourquoi, pour moi, la fermeture de ce service a été une décision très difficile à prendre », ajoute-t-elle.

Avant la pandémie, l’association organisait des activités de levées de fonds. Mais, cette année, à cause du contexte sanitaire, elle a dû annuler deux levées de fonds et s’est retrouvée ainsi en vraie difficulté financière. Elle dit ne pas comprendre pourquoi « notre demande auprès de la NSIF est restée lettre morte ». Elle poursuit : « Il y a les appels à projets pour des Small Scale Initiatives à hauteur de Rs 1M. Quand nous nous sommes lancés dans cet appel à projets, on nous a donné seulement Rs 500 000 pendant une année. Nous avons alors demandé d’être reconnus comme un Ongoing Service Provider, comme d’autres ONG. À plusieurs reprises, j’ai envoyé une correspondance pour demander deux choses : 1) les raisons pour lesquelles on refuse de nous reconnaître comme un Ongoing Service Provider et 2) les critères pour être reconnu comme tel puisque d’autres ONG sont reconnues comme tel. Mais, on n’a jamais eu de réponse, même pas un accusé de réception », déplore-t-elle.

Pour toute réponse, en décembre 2021, lors d’un Zoom Meeting, on lui aurait fait comprendre qu’en juillet 2022, la NSIF considérera si le CDM peut être un Ongoing Service Provider. « Il y a un an, on m’avait dit verbalement : on va attendre une année et on va vous donner. Nous avons pensé que nous allions être reconnus en juin 2022 mais en décembre on nous a dit qu’on va considérer… », ajoute-t-elle.

Allia Syed Hossen-Gooljar dit ne pas comprendre la position du NSIF. « Nous sommes là depuis trente ans. Je suis directrice à titre bénévole. Je ne reçois aucun salaire pour cela. La plupart des personnes qui font du social ont un travail. À la fin du mois, elles ont un salaire. Moi, j’ai travaillé pendant trente ans, j’ai donné ma jeunesse à cette société et je n’ai ni salaire, ni pension, rien ! Pourtant, je travaille. Je demande de l’argent pour les bénéficiaires, je ne demande pas pour moi ! ».

De l’autre côté, fait-elle voir, FEMNET (African Women’s Development and Communications Network), a confié au CDM un projet de l’Union européenne. Ce qui l’amène à s’interroger : « Comment l’UE a-t-elle pu trouver que le CDM peut gérer un projet de cette envergure alors que notre pays, lui, ne nous aide pas ? Comment expliquer cela ? FEMNET n’a pas décidé cela comme ça, ils ont envoyé des personnes de l’Afrique venir passer une journée au CDM pour voir comment nous travaillons. Ce n’est qu’après qu’on nous a confié ce projet ».

Le financement de Rs 500 000 que le CDM a reçu du NSIF pour le Breast Cancer Project a pris fin en juillet 2021. Le projet avait débuté en août 2020. Depuis août 2021, le CDM n’a donc pas de financement. « On a eu beaucoup de difficultés à payer le Boni d’un employé. Nous avons une location à payer. D’autres associations reçoivent Rs 1M pour une année et des ONG reçoivent plus de Rs 800 000 par mois ! Nous, nous avons reçu pendant deux ans Rs 500 000 du NSIF par an ».

Fondé en 1992, le CDM est affilié au Development and Communication Network of African Women (FEMNET) et détient un statut consultatif auprès de l’Economic and Social Council of the United Nations (ECOSOC/UN).

La directrice du CDM lance un plaidoyer à la NSIF pour que la fondation « nous donne une explication et revoie sa décision. Qu’elle vienne voir ce qui se passe sur le terrain. Je fais aussi un plaidoyer à la NSIF pour qu’il parle avec respect aux ONG ».

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