Commission des thons de l’OI : Londres persiste et signe sur le BIOT face à Maurice

Paris rejette les objections de Port-Louis au sujet de la souveraineté française de Tromelin

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Entente Maurice/Madagascar/Comores/Seychelles pour faire échec à la réduction de quotas de pêche au thon dans cette partie de l’océan Indien

Maurice joue gros sur les plans diplomatique et économique avec les délibérations de la 26e séance plénière de la Commission des thons de l’océan Indien (CTOI), qui se déroule dans l’archipel des Seychelles du 16 au 20 mai. Toutefois, au niveau des différentes instances de ce regroupement régional des États riverains de l’océan Indien, se réunissant actuellement aux Seychelles pour préparer le sommet de la semaine prochaine, le ton est monté d’un cran. Déjà, la délégation mauricienne a donné la charge face au Royaume-Uni au sujet du British Indian Ocean Territory (BIOT), expression contestée diplomatiquement pour identifier l’archipel des Chagos. Toujours sur le plan des revendications, Port-Louis a transmis un message à Paris au sujet de la souveraineté française sur Tromelin. Par contre, au tableau économique, Maurice a fait alliance avec les Seychelles, Madagascar et les Comores en vue de contrer les velléités de réduction drastique des quotas de pêche au thon dans l’océan Indien, dans un souci de préserver cette espèce de poisson en situation de surpêche, avec des risques potentiels pour l’avenir.

Avant même l’ouverture de cette nouvelle session au sommet de la CTOI, les hostilités anglo-mauriciennes sur les Chagos ont pris les devants de la scène. Ainsi, dans une note verbale, annexée au rapport de différentes instances, notamment la 19e session de l’Indian Ocean Tuna Commission Compliance Committee se déroulant du 8 au 12 mai, Maurice a objecté formellement au rapport soumis par le Royaume-Uni portant sur le Reporting of Vessels in Transit through BIOT Waters au titre des infractions aux IOTC Conservation and Management Measures (IOTC-2021-CoC19-07a).

Port-Louis soutient que la réception de ce document par le secrétariat de la CTOI est « inconsistent with UN General Assembly Resolution 73/295 which has recognised, in accordance with the Advisory Opinion of the International Court of Justice of 25 February 2019, that as a matter of international law, the Chagos Archipelago forms an integral part of the territory of Mauritius ». Dans cette perspective, Maurice demande à cette instance régionale de ne pas accuser formellement réception de ces documents « since the United Kingdom is not a coastal state in relation to the Chagos archipelago and cannot lawfully take any action in respect of the Chagos archipelago, including reporting on vessels in transit through the waters of the Chagos archipelago ». Cette prise de position de Maurice a été réitérée de manière formelle en pas moins de trois occasions fin de semaine dernière.

La décision de la CTOI en séance plénière pourrait se révéler décisive dans la conjoncture. De son côté, l’Overseas Territories Directorate du Foreign Commonwealth and Development Office a réagi pour la forme en répétant : « The IOTC is not a formula to discuss issues of sovereignty. The United Kingdom regrets the continued use of this important multilateral forum by Mauritius to address a bilteral latter. »

Pour ce qui est du fond de la question de l’exercice de souveraineté sur cette partie du territoire de la République de Maurice, Londres rejette de manière catégorique la teneur de l’Advisory Opinion de la Cour internationale de justice ou encore la Résolution adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies. « Neither the non-binding Advisory Opinion nor the non-binding General Assembly resolution alter the legal situation of a sovereignty dispute between the United Kingdom and Mauritius », note le Royaume-Uni, qui se défend de l’accusation que « it does not respect the international rule of law ».

Dans la même foulée, Maurice conteste la démarche de la France d’utiliser la dénomination France (OU) et France (Territoires) pour présenter Tromelin comme faisant partie du territoire de la République française dans des documents soumis à la CTOI pour le sommet de la semaine prochaine. « The Republic of Mauritius reaffirms that it has full and complete sovereignty over the island of Tromelin, including its maritime zones. »

La France est intervenue par voie de note verbale en guise de riposte diplomatique, soulignant que « France does not recognise any legal value of the registration of this objection by the Republic of Mauritius submitted to the IOTC secretariat, which fails to consider that the island of Tromelin is a French territory over which France has constantly exercised full and total sovereignty ». Par ailleurs, Paris ajoute que ces instances régionales engagées dans la gestion de la pêche au thon ne constituent nullement la plateforme appropriée et compétente pour discuter des questions d’ordre de souveraineté territoriale.
Sur un autre plan, Maurice, de concert avec trois autres États riverains de l’océan Indien, s’apprête à défendre l’industrie de la pêche et de la conserverie de thon. En avant-première aux délibérations de la 26e session de la CTOI, devant se prononcer sur des réductions drastiques de quota de pêches au thon, ces quatre pays se sont concertés et ont eu des consultations avec des représentants de l’Europêche Tuna Group (AGAC/OPAGAC, Orthongel et ANABAC) pour souligner l’importance de ces opérations au sein de ces différentes économies, surtout dans un contexte post-Covid-19, où l’industrie du tourisme arrive difficilement à retrouver ses marques.

Maurice, les Seychelles, les Comores et Madagascar ont ainsi déjà signé une déclaration commune pour « recognising the importance of strengthening cooperation amongst Indian Ocean Commission countries dependent on the purse seiner fishery for their canneries through coherence and coordinated approach for safegarding their economic dependency and in the management of tuna fisheries ».

Cette déclaration commune rappelle que depuis 2014, ces États riverains et membres de la COI ont enregistré des réductions de l’ordre de 24% de leurs prises de thon. Par contre, le cas d’Oman, avec des prises passant de 7 000 tonnes de Yellowfin Tuna en 2014 à 70 000 tonnes en 2020, est cité pour faire remonter à la surface le préjudice subi par ces quatre pays susmentionnés.

« If we need to reduce our catches other countries need to do it proportionately. Unfortunately, it hasn’t happened as there are other countries increasing their catches while we have decreased ours. We feel that this is not fair. We have an industry and canning factory to supply and jobs to maintain, as such it is important that this fishery continues », déclare de son côté le ministre de la Pêche des Seychelles, Jean-François Ferrari, à la Seychelles News Agency, comme pour bien résumer l’équation pour les États membres de la COI. En tout cas, la 26e session de la CTOI s’annonce nullement de tout repos pour Maurice, tout au moins sur ces trois fronts…

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