PARLEMENT : La State House au coeur de la galaxie Alvaro Sobrinho

Véritable réquisitoire de l’opposition contre Alvaro Sobrinho mardi dernier à l’Assemblée nationale puisqu’en plus de la Private Notice Question (PNQ) du leader de l’opposition sur ce scandale, deux autres questions de Rajesh Bhagwan et de Reza Uteem ont permis de confirmer que la State House est au coeur de la galaxie Alvaro Sobrinho. Ce qui a poussé Xavier Duval à conclure sa PNQ sur ces propos : « this gentleman has seen Mauritius as a soft target, has used the subterfuge of charity to enter the highest echelons in the State to launder his money and ruin the reputation of Mauritius ! » Les faits qui confirment cet axe puissant actionné depuis la State House sont que c’est le secrétariat de la présidence de la République, assuré par Dass Appadoo, qui a, en 31 occasions, formulé des demandes auprès du Prime Minister’s Office pour que l’Angolais, sa famille et ses plus proches collaborateurs aient accès au salon VIP de l’aéroport, que ce même fonctionnaire, aujourd’hui en congé, a effectué 21 déplacements à l’étranger au coût de Rs 2 millions entre juin 2015 et novembre 2016, dont deux partiellement financés par Planet Earth Institute, fondé par le tandem Ameena Gurib-Fakim et Alvaro Sobrinho.
Alors que tout le monde sait maintenant que Dass Appadoo a pris un congé sans solde depuis le mois dernier pour devenir le directeur de la compagnie immobilière Vango dont le seul actionnaire n’est autre qu’Alvaro Sobrinho, le Premier ministre, Pravind Jugnauth, interrogé par Rajesh Bhagwan sur le fait que le « pigeon voyageur » est devenu un employé de celui pour lequel il réclamait des facilités VIP, a dit ne pas être au courant de ce fait.
Le leader de l’opposition a pointé du doigt le Premier ministre adjoint Ivan Collendavelloo et a dit voir dans ses déclarations — selon lesquelles, qu’après avoir regardé l’Angolais dans les yeux, il pouvait affirmer que l’argent de l’Angolais était propre et qu’il n’y avait aucun blanchiment d’argent sale — une manière de faire pression sur les autorités, ce qu’a vigoureusement rejeté le chef du gouvernement MSM/ML.
Dans sa longue réponse initiale à la PNQ de Xavier Duval, le PM a fait l’historique des activités de Sobrinho sur notre sol précisant que l’Angolais a fait l’acquisition de propriétés à Royal Park et de terrains pour un montant total de Rs 95 millions. Il a dit ne pas être au courant de son investissement de Rs 1 milliard dans 131 villas dans le même complexe en vente en état futur d’achèvement (VEFA). Et malgré la volée de questions supplémentaires les unes plus directes que les autres, Pravind Jugnauth a déclaré qu’il ne voit pas la pertinence d’une commission d’enquête étant donné qu’il y a déjà plusieurs investigations initiées sur cette affaire.
Egalement interrogé sur l’affaire Sobrinho, l’actuel ministre des Services financiers, Sudhir Sesungkur, qui, après des réponses approximatives, a dû battre en retraite sous les coups de boutoir du député du MMM, Reza Uteem, lequel insistait sur le caractère d’un « arrestable offence » commise par M. Pinto, un des directeurs de Sobrinho, qui aurait omis de révéler à la FSC ses démêlés avec la justice.
Surdité sélective
L’autre gros morceau de la séance de mardi a été évidemment la motion de blâme de Shakeel Mohamed contre la Speaker Maya Hanoomanjee. Le chef de file du PTr, dont l’intervention a été restreinte par le Speaker, a pu s’en sortir grâce à son talent oratoire, son sens de la répartie et ses petites piques bien envoyées.
Bien qu’ayant été empêché, le député a pu, tour à tour, évoquer, la « selective deafness » de Maya Hanoomanjee, sa participation à Clarisse House à une fête de SAJ et du MSM qualifiée de « privée » et « familiale », le fait de bénéficier d’une allocation pour un logement qui sert aussi d’adresse pour les activités commerciales de sa fille en insistant que lorsqu’on est Speaker, on l’est partout.
Si le seul orateur de l’opposition a été Dan Baboo, walk-out ou pas, le gouvernement a maintenu sa liste d’intervenants, à commencer par le ministre mentor qui, comme il fallait s’y attendre, a pris la défense de la Speaker et des activités de la fille de cette dernière. Sont aussi intervenus, Etienne Sinatambou, qui a observé que Maya Hanoomanjee est trop indulgente avec l’opposition et qu’elle aurait dû faire preuve de plus de fermeté à son égard.
Anil Gayan a, de sa part, attendu presque deux ans pour venir s’expliquer sur les propos outrageants qu’il avait tenus sur le fait que c’est la première fois qu’un non-hindou menait le groupe parlementaire du PTr et qu’il avait jugé déplacées ses questions sur Vijaya Sumputh. Le ministre du Tourisme, qui se voulait sérieux, a affirmé que c’était juste pour souligner la démarche « progressiste » du PTr.
Autres orateurs que le Deputy Speaker a permis de dire n’importe quoi sans rapport avec la motion, Sudesh Rughoobur. Ce dernier est rentré dans les rangs depuis le redémarrage de ses petites affaires. Lui a pu citer Nehru sans être rabroué par Sanjeev Teeluckdharry. Et d’autres encore de ces orateurs qui se piquent d’être de grands spécialistes des Standing Orders et des us et coutumes parlementaires comme Showkutally Soodhun, Mahen Jhugroo, celui qui a été affublé du sobriquet « kitchen boy », le transfuge Zouberr Joomaye, Ravi Rutnah, qui a essuyé un nouveau camouflet en soutenant que la motion de Shakeel Mohamed n’avait pas été secondée alors qu’elle l’a positivement été par le leader de l’opposition ; Ivan Collendavelloo, qui s’est embarqué dans une interprétation du walk-out et enfin, Pravind Jugnauth, qui a déclaré qu’on lui lance « l’imposte » par jalousie.
Mis au vote à 1 h 30 mercredi matin, en l’absence de l’opposition, la motion a été rejetée.
En direct : la première complètement ratée de Sanjeev  Teeluckdharry
C’était son premier grand test en tant que nouveau Deputy Speaker et le moins que l’on puisse dire, c’est que c’est une première complètement ratée pour Sanjeev Teeluckdharry, le député du MSM qui est également avocat. Sur la trentaine d’interruptions de l’intervention de Shakeel Mohamed, il a lui-même réalisé les trois quarts pour constamment rappeler au député les paramètres dans lesquels il devait intervenir. Et il ne s’est pas contenté de cela.
Son manque d’expérience, son parti pris et ses interventions inopinées ont braqué autant l’opposition que les téléspectateurs, ce qui lui a valu quelques rappels des provisions des Standing Orders de la part de son prédécesseur, Adrien Duval. Reprochant à Shakeel Mohamed ses références au grand Jawaharlal Nehru, le Deputy Speaker lui lancera : « We are not going on literature, be it Jawaharlal Nehru or others or Erskine May about the qualities… », ce qui lui a valu un très sonore « Shame of you » de la part du leader du MMM, Paul Bérenger.
Ce dernier aura aussi très peu apprécié l’argument de la ministre de l’Education, Leela Devi Dookun-Luchoomun, selon lequel, désignant l’opposition, « it is most probably they find it hard that a woman is in authority in this Parliament. Had it come from a man Speaker, no one would have anything to say ». Et Paul Bérenger de distribuer des «Shame on you » à la ronde pendant que Sanjeev Teeluckdharry sortait un « don’t make gestures with m » qui fera date dans les annales parlementaires.
Et alors que l’ancien leader de l’opposition, se tournant, lançait : « Li pire ki Maya », le Deputy Speaker, sans avertissement ni sommation intima à l’adresse de Paul Bérenger : « I order you out of the House.» Ce qui provoqua un véritable tollé dans les rangs de l’opposition, dont ceux du MMM, qui se mirent debout pour emboîter le pas à leur leader non sans avoir copieusement invectivé Sanjeev Teeluckdharry et rappelé ses démêlés avec le Bar Council. Il décide cette fois d’expulser Reza Uteem, Rajesh Bhagwan et Veda Baloomoody. C’est toute l’opposition qui finira par effectuer un walk-out. Ce faisant, il a réussi l’exploit de rassembler les forces dispersées de l’opposition.
Il était quelque part amusant de voir l’embarras de Sudhir Sesungkur, celui encore plus évident d’Alain Wong, les épithètes humoristiques de Rajesh Bhagwan sur « l’imposte », le « pigeon voyageur » ou le « Sun Trust Boy », le discours inaudible et décousu de Dan Baboo et l’inévitable ensommeillement de Nando Bodha et de Bebakur Rampoortab. Un petit café avant la séance aurait pu les tenir bien éveillés..

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