Le Conseil des Religions, ciment de l’Unité mauricienne

GEORGES-ANDRE KOENIG

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L’Île Maurice, creuset de quatre grandes cultures, est logiquement pluriconfessionnelle. Elle abrite donc ces grandes religions qui se nomment (je les cite par ordre alphabétique car aucune d’elle ne peut se prétendre supérieure aux autres) : le Bouddhisme (non théiste), le Christianisme (et ses différentes branches), l’Hindouisme (et sa diversité de cultes), l’Islam (et ses tendances) et la Foi bá’haie (reconnue à Maurice comme une religion au même titre que les autres).

La particularité religieuse mauricienne est que le nombre de pratiquants, toutes confessions confondues, est très élevé comparé à ceux des pays où, comme chez nous, la liberté des cultes est autorisée par la loi. À Maurice, qui plus est, le blasphème est passible de poursuite judiciaire. Même s’il n’existe pas de statistiques précises à ce sujet, on peut affirmer que bon nombre de Mauriciens pratiquent leur religion, et ce dans le respect de ceux d’autres confessions, d’autant plus que dans ces différentes croyances il existe deux dénominateurs communs : l’amour et la transcendance. Et cette transcendance, étant théiste pour la plupart de ces pratiquants (sauf les bouddhistes, pour qui elle est simplement celle de la vérité ultime qui est au-delà de toutes les fabrications mentales et des illusions trompeuses de la vérité conventionnelle, mais où Dieu est absent), fait que l’amour est d’autant plus motivant qu’il est adossé à une merveilleuse espérance : la survie de l’âme.

Aussi peut-on dire que l’on trouve chez nous, dans une certaine mesure et chez les classes moyennes et ouvrières en particulier, ce que Frédéric Lenoir, immense philosophe des religions, appelle « l’Ame du Monde », autrement dit la Sagesse Universelle.

Et c’est cette sagesse-là qui fait que les Mauriciens dans leur ensemble vivent harmonieusement les uns avec les autres. Il n’y a qu’à participer au pèlerinage de Maha Shivaratree ou visiter le tombeau du Bienheureux Père Laval le jour de l’anniversaire de sa mort pour constater cette entente cordiale entre les différentes communautés qui composent notre nation.

Mais dans tout troupeau, il y a toujours quelques brebis galeuses susceptibles d’en contaminer celles encore saines. Nous l’avons hélas constaté en juin 2018 quand des homosexuels ont été violemment menacés par une petite minorité, et que la riposte sur Facebook fut tout aussi totalement inacceptable. Ce qui aurait bien pu mettre le feu aux poudres et créer un grave conflit communautaire si le Conseil des Religions n’avait pas, par le biais d’une Lettre ouverte à toutes les parties prenantes dans cette affaire, analysé les incidents avec cette hauteur de vue qui lui est propre, et suggéré des lignes de conduite qui, au bout du compte, apaisèrent les esprits. Dieu merci !

Le Conseil des Religions, fondé en 2001 suite à un appel des Nations unies, a pour but, en effet, d’apaiser les conflits sociaux, d’ordre communautaire en particulier, en prodiguant ses conseils, d’autant plus fiables qu’ils émanent de personnalités dignes de respect parce qu’objectives et généreuses. Ce n’est pas pour rien, d’ailleurs, que le gouvernement a fait plusieurs fois appel à cette instance pour désamorcer certains conflits qui, autrement, auraient perturbé l’ordre social.

Mais le but de ce Conseil, heureusement, ne se limite pas seulement à apaiser les conflits sociaux. Il s’attelle aujourd’hui, Dieu merci, à répandre l’essence même de ces grandes religions, la seule valeur de laquelle découlent toutes les autres : l’Amour du prochain. Cet amour que décuple l’espérance d’une transcendance après la vie évoquée plus haut.

Et c’est pourquoi, pour ne citer qu’un exemple, ce Conseil a persuadé l’Université de Maurice d’inclure dans le cursus de la Faculté de Sociologie un cours sur l’interreligieux qui aboutira à un Diploma et plus tard à un Degree. Ainsi les jeunes pourront mieux connaître les fondamentaux des différentes religions pratiquées sur notre sol, et découvrir ainsi qu’elles partagent toutes, en définitive, les valeurs primordiales qui viennent juste d’être évoquées. Ils se rapprocheront encore plus alors les uns des autres, et l’harmonie sociale ne pourra ainsi qu’être renforcée.

Mais cette démarche auprès de la classe supérieure que sont les étudiants d’université devrait, à mon humble avis, s’étendre aussi aux « puissants » de chez nous (politiciens et hommes d’affaires). Car ceux-là, accaparés par leurs activités professionnelles, n’ont pas toujours le temps de penser aux problèmes sociaux qui sévissent dans le pays et qu’ils pourraient atténuer sinon résoudre. Comment les mobiliser ? Les sages du Conseil sont bien plus habilités que moi pour le savoir.

À la lueur de ce qui précède, on ne peut que constater combien cette ONG est indispensable au pays. Jusqu’à tout récemment, elle était financée par les Nations unies. Ne disposant plus aujourd’hui de cette manne, elle doit se tourner vers des mécènes susceptibles de l’aider à financer ses frais de fonctionnement, somme ô combien modeste par rapport au formidable travail qu’elle accomplit. Aussi, que ceux qui en ont les moyens accueillent favorablement les représentants du Conseil des Religions qui viendraient éventuellement frapper à leur porte. Ils en sortiront, sans aucun doute, grandis et heureux d’avoir contribué à une noble cause : la paix sociale de ce petit pays où il fait si bon vivre.

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