Le joug du stationnement sauvage

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TARIKH JUMEER

Dans sa contribution intitulée « Sécurité routière : qui veut la fin veut les moyens… », publiée le 12 août 2024 dans la page Forum du Mauricien, Jean-Michel Martial soulève des points pertinents concernant le comportement des conducteurs et leur non-respect du Code de la route.

Je rejoins l’avis de M. Martial lorsqu’il affirme que “le citoyen mauricien au volant – qui est devenu un danger non seulement pour lui-même mais aussi pour tous les autres automobilistes et piétons – se sent malheureusement invulnérable” mais j’aimerais aussi ajouter qu’à fortiori, ce citoyen mauricien est devenu un fléau pour l’ordre public, même lorsqu’il n’est pas au volant, notamment après s’être permis de se garer n’importe où et n’importe comment, en toute impunité.

Deux autres contributions dans les médias m’ont également interpellé.

Le premier est un éditorial publié le 31 juillet 2024, où le chef d’édition d’un groupe médiatique s’insurgeait contre l’incapacité de se rendre à ses obligations professionnelles, sa voiture ayant été bloquée pendant presque une heure par un van stationné sur une double ligne jaune. Le second cas est une vidéo diffusée le 17 août 2024 sur Facebook, dans laquelle M. Anarath, gérant d’une institution de funérailles musulmanes, déplorait l’impossibilité d’organiser des funérailles correctement à cause du stationnement sauvage, empêchant l’accès à son établissement pourtant signalé par une double ligne jaune. Ce dernier dénonçait aussi l’attitude des conducteurs fautifs qui, au lieu de s’excuser, persistaient dans leur mépris.

Monsieur Martial pointe du doigt trois principaux responsables de l’état déplorable de la circulation sur nos routes :

– Le nombre croissant de véhicules enregistrés.

– L’État.

– Nous, conducteurs et piétons.

Cependant, il serait tout aussi judicieux d’ajouter à cette liste les compagnies privées, particulièrement en ce qui concerne le stationnement illégal. En effet, ces entreprises ont un rôle crucial à jouer dans l’amélioration des conditions de circulation.

D’une part, elles pourraient offrir des formations supplémentaires à leurs employés, en leur inculquant des valeurs relatives au comportement responsable à adopter sur la route, notamment lorsqu’ils conduisent des véhicules de l’entreprise. Trop souvent, nous constatons que certains chauffeurs ternissent l’image de la société pour laquelle ils travaillent en adoptant des attitudes désinvoltes au volant. Par exemple, comme le montre la photo ci-dessous, un chauffeur de livraison d’une compagnie pharmaceutique, en pleine livraison de médicaments à une pharmacie située à La Chaussée, s’est stationné sur un passage pour piétons. Si on l’interpellait, il aurait probablement répondu par un banal « 2 minit, Boss ! ». Si la pharmacie en question avait réellement à cœur le respect du Code de la route, ses employés auraient dû exiger du chauffeur qu’il ne se gare pas sur un passage piéton, une infraction dont l’amende a récemment été augmentée pour envoyer un signal fort.

Par ailleurs, la municipalité aurait également pu intervenir en sanctionnant cette entreprise. En effet, dans de nombreux permis qu’elle délivre, des clauses exigent que les bénéficiaires prennent des mesures pour ne pas nuire à la sécurité routière, notamment en évitant l’obstruction des voies publiques ou même privées.

Je propose d’autre part que le comportement de certains conducteurs mauriciens pourrait être lié à des traits de personnalité problématiques, notamment ceux associés au trouble de la personnalité narcissique ou à d’autres troubles psychologiques.

Les individus atteints de narcissisme manifestent souvent un manque d’empathie, un besoin constant d’être admirés, et un sentiment de supériorité qui les amène à adopter des comportements imprudents et égoïstes au volant. Leur perception exagérée de leur propre importance peut les pousser à ignorer les règles de la route, pensant qu’elles ne s’appliquent pas à eux. Cela pourrait expliquer pourquoi certains modifient systématiquement leurs systèmes échappement pour produire des sons d’explosions, infligeant ainsi des nuisances sonores aux résidents des quartiers qu’ils traversent.

D’autres conducteurs se distinguent par leur impulsivité, leur irritabilité, et leur tendance à violer les normes sociales, montrant peu de considération pour les conséquences de leurs actes. Ces comportements sont caractéristiques du trouble de la personnalité antisociale.

Il existe également le trouble explosif intermittent, défini par des accès de colère impulsifs et disproportionnés, souvent en réponse à des provocations mineures. Les conducteurs disciplinés sont souvent victimes de ces individus, qui réagissent de manière excessive à des situations perçues comme des menaces à leur ego ou à leur statut. Les nombreuses agressions liées à des disputes de stationnement en sont des exemples frappants, comme les coups de poing mortels infligés le 28 décembre 2015 à Flacq, ou les rixes récentes à l’hôpital Jeetoo et à la Résidence Mare La Chaux en 2024.

Explorer la dimension psychologique du comportement des conducteurs mauriciens pourrait offrir des pistes pour réduire les accidents et les inconvénients causés par le stationnement sauvage. Malheureusement, le sujet de la sécurité routière demeure relativement négligé dans les manifestes des partis politiques en vue des élections imminentes.

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