Perversion extrême

Le MSM a tenu son 1er mai. Ses moyens colossaux le lui ont permis. On ne sait pas trop ce qu’il a voulu prouver alors qu’il n’y a aucune échéance annoncée et que le Premier ministre lui-même répète qu’il ira jusqu’au bout de son mandat, soit novembre 2024 et quelques mois de plus, selon les dispositions de la loi.
Est-ce que cette expédition stérile et coûteuse était pour se rassurer et se donner l’illusion que tout va très bien ? S’ils sont vraiment satisfaits, tant mieux pour eux, même s’ils savent pertinemment bien que jouer sans adversaire n’a rien de particulièrement stimulant ni de très mobilisateur.
Et s’avancer pour parler de la présence de 20,000 personnes comme étant le nombre s’étant bousculé pour être à Vacoas lundi dernier alors qu’il y avait moins d’un cinquième présent est tout autant risible que ridicule. Même si l’on compte les pauvres travailleurs du Bangladesh trop contents d’avoir un jour pour se balader et festoyer, le compte n’est toujours pas bon.
Ce jour de célébration des travailleurs a été, en version 2023 du Sun Trust, la perversion extrême de ce qui constitue l’essence même de cette grande date. Des autobus en nombre, certes, mais avec souvent moins d’une dizaine de personnes à bord, des passagers, une fois arrivés sur le lieu du rassemblement, qui ont vite fait de déguerpir. Les demandes formulées auprès des chauffeurs de bus pour aller directement à la plage n’étaient d’ailleurs pas isolées.
Et, au summum de cette perversion malsaine, il y a aussi eu ces pauvres enfants embarqués dans des bus pour ce pique-nique indécent et l’un d’eux, une fillette de trois ans seulement, a failli se noyer dans le lagon de Flic en Flac, alors qu’elle était sous la garde de sa grand-mère qui l’avait trimballée au meeting du MSM.
C’est pas que ce parti soit directement responsable de ce malheureux incident, mais c’est son rassemblement, organisé à coups de distributions d’argent, de briani, de bière et de promesse de bon temps à passer à la mer qui est à l’origine de ce qui aurait pu virer au drame. Ce genre de 1er mai est, en fait, une insulte aux travailleurs.
Sur l’estrade, un genre de ponton aménagé, qui a été abusivement désigné comme un “carré VIP” pour afficher les toutes dernières prises à coups de “bout” ou de tickets électoraux promis. Se sont ainsi joyeusement mélangés en tant que récents trophées : businessman gourmand et pressé se présentant comme politologue, au retournement de veste spectaculaire et docteur émérite en hypocrisie, frère de trafiquant de drogue synthétique ou vétérinaire qui croit que sa reconversion viendra peut-être à bout des chiens errants de Curepipe dont il déplorait la prolifération.
Ce sont, sans doute, de futurs candidats comme Avinash Teeluck, un ancien nominé politique du PTr, et Nilen Vencadasmy, qui avaient trusté la plateforme du 1er mai 2019 du MSM à quelques mois des échéances électorales. On dirait un rite de passage.
Comme il faut chaque année innover pour attirer du monde et essayer de capter l’attention, peut-être aurons-nous droit, le 1er mai 2024, à un vrai show avec Avinaash Munohur à la guitare acoustique, Sandra Mayotte au chant et Maneesh Gobin dans un déhanchement endiablé sur un air de Makalapo version flamenco ?
Ça, c’est pour l’affichage, qui se voulait un grand coup politique. Pour le contenu, la bonne vieille tradition des vociférations et des blagues qui n’amusent personne a été scrupuleusement respectée. Des attaques ciblées, un langage même pas codé, avec ou sans radar revendiqué cette fois, mais toujours avec la Special Striking Team, il y a eu la bande-annonce d’un développement sur le front des saisies de drogue. Le film est intervenu 48 heures après la réclame. Avec l’interpellation de quelqu’un qui a été de la garde rapprochée de Navin Ramgoolam.
L’Attorney Général et secrétaire général du MSM, qui conserve ses deux postes, malgré la gravité des accusations dont il est l’objet, a juste été privé de parole et prié de se faire discret. Cela ne l’a pas empêché de pousser la provocation jusqu’à danser sur le podium.
Comme un pied de nez à ceux qui, compte tenu des pots-de-vin évoqués dans l’affaire Franklin, de la drogue, du bail du ranch à proximité de Grand-Bassin, considéré comme sacré et la souillure de la stag party, mêlant alcool et alcôve, réclament son départ. C’est de l’indécence sans limites comme seul le MSM sait la pratiquer.
Quant aux laquais qui sont arrimés au MSM, il y a ceux qui se sont fait remarquer par leur lapsus révélateur et leur confusion entre SSR et SAJ, devenu tellement répétitif ces derniers temps qu’il peut donner des sueurs froides aux fanatiques de l’équipe soleil. Il y a aussi eu des aveux de malaise délibérément évoqués comme pour passer un message.
Et le révoqué, comme un dernier malpropre de Pravind Jugnauth, a osé justifier son inaction – devant ce que ses propres collègues considèrent comme une humiliation pour leur leader et pour leur parti, lorsque la comparaison est dressée avec le cas Gobin – par le fait que lui et son ML n’ont pas de “bout” à réclamer.
C’est vite dit pour faire joli, pour paraître politiquement correct sur une estrade publique après que tous /toutes les proches ont été déjà confortablement casés. Ce qui est certain, c’est que ce n’était pas le rendez-vous des discours qui font date.
Lorsqu’on additionne toutes les occurrences qui ont émaillé la sortie du 1er mai de l’équipe gouvernementale et lorsqu’on pense que certains ont tout pris de ce que le MSM pouvait bien offrir, tout en sachant qu’ils ne mettront jamais une croix auprès du nom d’un candidat du Sun Trust, il est évident que ce fut un exercice creux, malsain et trompeur sur toute la ligne
Si seulement cet argent, ce capital non-négligeable investi pour si peu de retour, avait été utilisé pour aider les organisations non-gouvernementales qui sont au plus près des familles pauvres, c’aurait été une œuvre bien plus utile qu’un tamtam sans résonance.

- Publicité -
EN CONTINU

l'édition du jour