Rama Poonosamy et Dharam Gokhool : « Le 60-0 est le résultat d’un ras-le -bol du gouvernement en place et des espoirs en une vie meilleure… »

Rama Poonosamy et Dharam Gokhool des militants de la première heure ont répondu hier, aux mêmes questions de  Week-End sur les trois 60-0 qu’ils ont connu et les raisons derrière une telle  victoire…

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À votre avis, comment cette victoire 60-0 de l’Alliance du Changement se compare-t-elle aux deux autres 60-0 passées, comme le succès de l’Alliance MMM/PSM en 1982 et celles du PTr/MMM en 1995 ? Quels sont les similitudes ou les différences dans l’atmosphère politique ?

Rama Poonoosamy: La victoire de 60-0 en 1982 quand l’Opposition remporte tous les sièges est une première dans l’histoire de la démocratie mondiale. C’était une vague qui avait pris son élan depuis des années avec un peuple d’abord inspiré par le MMM, les militants et des syndicalistes dans les quatre coins du pays, rejoint par le PSM dans son alliance avec le MMM. Le vendredi 11 juin 1982, le peuple exprima à la fois son ras-le-bol vis-à-vis du régime en place et ses espoirs en une vie meilleure. En 1995, la vague a pris son élan un an plus tôt avec la concrétisation de l’alliance PTr-MMM et sa victoire à l’élection partielle de Stanley-Rose Hill en janvier 1995 quand Paul Bérenger et Burty David sont élus.

Le dimanche 20 décembre 1995, le peuple exprima une fois de plus son ras-le-bol vis-à-vis du régime en place et ses espoirs en une vie meilleure. En 2024, cela faisait quelques années déjà que les scandales se succédaient alors que le régime en place essayait par tous les moyens à amadouer la population. Mais l’atmosphère à Maurice était devenue oppressante et l’Alliance du Changement, regroupant le PTr, le MMM, ND et ReA incarnait, au fil de la campagne, la ‘libération’ de tout un peuple. Le dimanche 10novembre 2024, le peuple a exprimé à nouveau le même sentiment d’il y a 42 ans.

Dharam Gokhool: Dans tous les trois cas, c’était plutôt des votes sanctions contre les différents gouvernements au pouvoir que des votes d’adhésion aux partis de l’opposition. La mauvaise gouvernance, accompagne d’un mécontentement généralise  des électeurs,   était la raison principale de ces victoires.Les campagnes électorales étaient généralement mieux organisées, plus efficaces et beaucoup plus centrées sur les préoccupations des électeurs. Il y avait une campagne électorale de proximité avec l’appui des média traditionnels tels que la radio, la télé et la presse écrite. Cependant pour l’Alliance 1982, les préoccupations majeures  étaient surtout le taux élevé du chômage parmi les jeunes aussi bien que les revendications salariales et les conditions d’emploi  de travailleurs dans les différents secteurs de l’économie. N’oublions pas les grèves qui avaient précédées ces élections. L’Alliance 1995 était beaucoup plus centrée  sur des problèmes de mauvaise gouvernance aussi bien sur des tensions d’ordre communal découlant des divergences linguistiques dans le secteur primaire de l’éducation.

 Pourquoi l’Alliance du Changement a obtenu cette victoire écrasante en 2024? Était-ce davantage liée à leurs propositions, aux controverses entourant le gouvernement sortant, ou à un mélange des deux ?
Rama Poonoosamy: Il y a d’abord eu une rare synergie entre les deux locataires de River Walk, Navin Ramgoolam et Paul Bérenger. Ensuite, il y a eu le départ du PMSD de l’alliance de l’Opposition et l’arrivée des Nouveaux Démocrates. Le premier Game Changer, c’est l’accord avec Rezistans ek Alternativ tout juste après l’annonce des élections. Ces jeunes hommes et jeunes femmes, formés dans l’esprit du mauricianisme et du service aux autres, avec intégrité et humanisme, ont apporté fraîcheur et enthousiasme à cet élan en faveur du changement.
Dharam Gokhool:Tout d’abord, à  cause du bilan catastrophique du  gouvernement MSM,surtout sur le plan de la corruption, le népotisme, le favoritisme, la prolifération de la drogue, atteinte à la démocratie et aux droits des citoyens, le dysfonctionnement du Parlement et l’ingérence politiques dans presque toutes les institutions du pays, telle la Police et même le Judiciaire. Les propositions du  gouvernement MSM ont été perçues comme des bribes électorales par la population, du « money politics » et non pas comme des mesures sérieuses pour consolider notre économie, attirer des investissements, créer des emplois et soulager la souffrance de la population. En contrepartie, les propositions de l’Alliance du Changement, orientées vers les priorités du pays, proposaient une nouvelle vision économique pour promouvoir des nouveaux pôles du développement, une transition énergétique pour faire face au changement climatique et une démocratie ou les droits et les libertés des citoyens seraient protégés.

 Dans quelle mesure pensez-vous que le scandale d’écoute téléphonique et l’interdiction des réseaux sociaux ont influencé l’opinion publique contre l’administration de Pravind Jugnauth ?
Rama Poonoosamy: En effet, le deuxième Game Changer, c’était les Moustass Leaks qui ont perduré jusqu’à la veille des élections. L’impact dans le contenu et la façon de distiller régulièrement des kozé ki pa kapav kozé, des complots sordides et des paroles choquantes de certaines ‘personnalités’ a fini par convaincre ceux et celles qui soutenaient encore le régime à une semaine des élections à basculer dans le camp du Changement.Le troisième Game Changer fut l’interdiction des réseaux sociaux et la colère des internautes, surtout des jeunes. Le Board de l’ICTA et le régime se ridiculisaient alors que la Presse et l’Opposition dénonçaient la dictature.

Dharam Gokhool:L’internet c’est l’oxygène des jeunes. L’interdiction des réseaux sociaux, c’était la goutte d’eau qui a fait à déborder le vase. C’était une atteinte flagrante à la liberté d’expression et aux droits civiques. Le scandale d’écoute téléphonique, ayant trait à l’ingérence dans les affaires d’état, a bouleverse et  traumatise toute la population.

 Que faut-il faire pour éviter toute fragilisation de l’Alliance du Changement, sachant que les alliances peuvent être fragiles au pouvoir en raison de conflits internes et d’ambitions divergentes, tout en tenant compte des erreurs du passé et des attentes de réformes des électeurs?
Rama Poonoosamy: Il faudrait que cette synergie entre les principaux dirigeants gagne les ministres, députés et membres des partis qui forment l’Alliance du Changement. Les différences d’opinion sont inévitables mais il faudrait éviter les conflits. La maturité des uns et des autres et les erreurs du passé devraient prévenir les dérapages. Je suis convaincu que cette alliance va durer mais il faudra qu’elle deliver selon les attentes de la population et son programme gouvernemental. Nous souhaitons un gouvernement qui devra faire ce qu’il dit et dire ce qu’il fait.

Dharam Gokhool: Pour éviter toute fragilisation de l’Alliance du Changement, il faut qu’il y ait, entre tous les partenaires un travail d’équipe dans le dialogue et des consultations  permanents, un respect mutuel, une cohésion dans toutes  les actions gouvernementales. Les partenaires de l’Alliance du Changement devraient rester focalise sur leurs  engagements envers la population  pour réussir.

Rama Poonoosamy: Il faudrait que cette synergie entre les principaux dirigeants gagne les ministres, députés et membres des partis qui forment l’Alliance du Changement. Les différences d’opinion sont inévitables mais il faudrait éviter les conflits. La maturité des uns et des autres et les erreurs du passé devraient prévenir les dérapages. Je suis convaincu que cette alliance va durer mais il faudra qu’elle deliver selon les attentes de la population et son programme gouvernemental. Nous souhaitons un gouvernement qui devra faire ce qu’il dit et dire ce qu’il fait.

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