Renganaden Padayachy, post-Budget : “Sans justice sociale, pas de justice économique”

—Le Consolidated Fund, la caisse du budget —Exportation : une amélioration de Rs 100 milliards —Baisse de la dette publique : “Notre  objectif est de 60%” —Grant de Rs 20,000 : 15,000 jeunes de 18 ans bénéficiaires

Un budget “labous dou” avec des réformes fiscales que profiteront à de nombreux foyers, une révision à la hausse des allocations sociales, un revenu minimum garanti qui passe à Rs 15 000, un cadeau au coût de Rs 20,000 à environ 15,000 (chiffre avancé par le ministre des Finances) jeunes ayant atteint 18 ans depuis janvier dernier, une baisse dans le prix de l’essence…

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Ces mesures ont un coût : au lendemain de son grand oral, le ministre des Finances, Renganaden Padyachy n’est pas passé par quatre chemins pour dire que le gouvernement a puisé dans le Consolidated Fund, “les fonds des finances”, a-t-il même précisé, pour les rendre possibles. 2022 a été une année de rattrapage économique et la croissance a permis au pays d’accélérer le développement. L’exportation a connu une amélioration de Rs 100 MD par rapport à 2019. La dette publique a baissé.

Il y aurait actuellement USD 7.2 Md dans les réserves. “Nous avons rebondi très vite”, disait le Grand Argentier à la presse à Ébène, hier matin. En somme, le pays est en meilleure santé économique. De ce fait, le gouvernement a décidé d’investir dans le potentiel humain pour accroître la productivité et faire grimper la croissance économique. Le budget ne serait pas un budget “labous dou”, mais aux dires du ministre, une juste redistribution pour une meilleure justice sociale.

Le budget 2023-2024 est un budget résolument humain, axé sur trois piliers : l’économie, le social et l’environnement, visant à augmenter la croissance économique, encourager la productivité et gommer les disparités. “Nou esay amenn lazistis sosial dan tou faz nou lavi. Sans la justice sociale, il n’y a pas de justice économique (…) En améliorant notre potentiel économique, nous gagnons en croissance”, a déclaré Renganaden Padayachy. Le revenu de Rs 1,500 est bel et bien chose du passé pour le ministre. “Ce qui est impardonnable ! Une personne ne peut pas toucher un salaire qui est cinq fois inférieur au seuil de pauvreté”, souligne le grand argentier, d’où l’élaboration depuis 2016, dit-il, d’un budget basé sur la résilience.

Répondant aux piques à l’effet que le présent budget est un “budget labous dou” avec, notamment, le revenu minimum garanti qui passe à Rs 15,000, le ministre des Finances apporte une clarification. “De tout temps, il y a eu le salaire minimum – dont le montant est de Rs 11,575 actuellement – auquel sont annexées des allocations des transferts d’argent donné par le gouvernement pour que l’employé touche un revenu minimum garanti. Les employeurs n’auront rien à décaisser”, a-t-il indiqué, pour éviter toute confusion entre salaire minimum et revenu minimum garanti. Celui-ci, à Rs 15,000 est une mesure fondamentale, insiste le ministre Padayachy, avant de concéder qu’en raison de la pandémie du Covid-19, le gouvernement n’a pu revoir le montant du revenu minimum garanti plus tôt. Quant à l’argent qui finance la révision des différentes allocations pour rehausser le revenu minimum garanti, il sort des finances publiques. “Kontribision bann pli la-o ki pou fer ki kapav pey bann allowances bann anplwaye ki pou tous minimum Rs 15,000”, déclare le ministre des Finances.

Quant à l’essence, qui est passé à Rs 69 le litre, Renganaden Padayachy indique que la révision du prix à la baisse ne pouvait se faire plus tôt. S’il concède que le prix de l’essence au baril sur le plan mondial a connu une baisse, “à Maurice, le léger déficit dans le fonds de stabilisation pour le carburant”, explique-t-il, ne permettait pas une révision. Mais “nous avons pu combler la négativité qu’il y avait dans le fonds de stabilisation pour l’essence”. D’autre part, la situation pour le diesel est différente. Malgré un déficit, son prix ne peut être augmenté, sinon, dit le ministre, ce sont plusieurs secteurs, notamment le transport, qui seront affectés.

Invité à se prononcer sur la santé économique du pays, le ministre des Finances vante les mérites de la politique de résilience mise en place depuis 2016. “Nous avons fait un pari osé en préservant notre structure économique telle qu’elle était avant le Covid. Nous avons travaillé pour augmenter une partie de nos réserves, afin de préserver notre économie, nous avons travaillé pour créer notre richesse nationale”.

Au passage, il souligne : “La Mauritius Investment Corporation a permis à la Banque de Maurice de générer des profitabilités et d’appliquer une politique de taux de change qui a aidé à garder la stabilité de la roupie.” Et poursuit : “Avec une contraction économique de moins 15%, nous avons tenu pendant plus de deux ans. Nous avons été félicités pour ce que nous avons accompli sans frapper aux portes du Fonds Monétaire International, de la Banque mondiale et d’aucun grand bailleur, contrairement à d’autres pays.

Et ce, parce que nous avons créé des conditions avec une amélioration conséquente de nos réserves officielles. Avant, nous n’avions que USD 3 milliards, maintenant 7.2 milliards de USD.”

Pour le ministre des Finances : “Nous avons rebondi très vite. Malgré un million de touristes en 2022, nous avons atteint un taux de croissance de 8,7%. Alors que toutes les projections étaient autour de 7%. Ce n’est pas avec un million de touristes que nous faisons partie des 20 pays au taux de croissance le plus élevé, mais grâce à la politique entamée depuis 2016 et qui a construit la résilience sociale de notre pays. Kan nou pe redonn konfians popilasion nou amelior potansiel krwasans ekonomik. Nous avons préservé les secteurs touchés par le Covid-19 et l’emploi. Nous avons fait en sorte de ne pas dévaluer la roupie.”

Renganaden Padayacchy précise que pour l’année fiscale 2023-2024, le gouvernement vise un taux de croissance de 8%. “Nou bizin ena sa kalité ambision-la.” Pour atteindre cet objectif, le gouvernement améliorera la politique de compétitivité fiscale, mettre en place et consolider plusieurs nouveaux secteurs, en particulier l’énergie renouvelable, l’économie grise, la pharmatech, tout en préservant les secteurs existants. “Notre exportation a connu une amélioration de Rs 100 milliards par rapport à 2019”, dit le ministre. Ce montant, laisse-t-il comprendre, ne pourra que grimper que lorsque Maurice atteindra 1,4 M de visiteurs.

“Avec un taux de croissance de 8,7% en 2022 et 8% en 2022-2023, la dette publique est en baisse. En juin 2022, elle avait atteint plus 8,6%. Notre déficit descendra à 3,9%, nous allons nous retrouver avec une dette publique sous notre ancrage fiscal fixé par le FMI. La dette publique passera à 79%. Nou pe al ankor pli lwin. Notre  objectif est de ramener la dette publique à 60% à moyen terme. Nous avons besoin d’une marge de manœuvre pour consolider un fonds de résilience, afin de contrer tout éventuel choc économique, de 30% de notre PIB”, déclare le ministre des Finances en qualifiant l’année 2022 de phénomène de rattrapage.

Poursuivant ses explications, le ministre des Finances indique que les agents économiques ont constaté que le pays a suffisamment de réserves et de devises. Ils se sont rendus compte que “la Banque centrale ne tolérera pas une politique spéculative sur la roupie” et que “l’inflation présente est une inflation importée. Le coût de production à l’extérieur a augmenté. La période d’inflation sévère est exceptionnelle sur le plan mondial. La Banque mondiale prévoit une inflation assez élevée cette année.”

Répondant à une question de la presse sur la réforme fiscale, Renganaden Padayachy avance que, selon les estimations, le coût direct sur l’Income Tax sera de Rs 4 milliards et apportera plus de Rs 3 milliards à l’État. “L’argent sera redistribué et créera un feel good factor”  dans la société, assure-t-il. Affirmant aussi que “tous les contribuables paieront moins de taxe à partir de juillet 2023” et qu’avec la réforme fiscale en onze tranches, “personn pa pou deszavantaze.” Le ministre déclare : “Nous avons pris en compte les critiques sur la Solidarity Levy et mis en place un sytème fiscal plus juste qui apportera plus d’équilibre social et fiscal.”

Le gouvernement “a voulu corriger les inégalités et enlever les injustices dans un système de taxation.” La Mauritius Revenue Authority, annonce le ministre, travaille sur ce nouveau système et publiera des explications sur son site en ligne.

“Le budget 2023-2024 a pour objectif de fermer le chapitre de la crise économique majeure du Covid-19”, fait ressortir Renganaden Padayachy. “Comme nous ne sommes pas à l’abri d’un événement malheureux, le gouvernement se doit de consolider la résilience économique, sociale et environnementale, les trois piliers de la vie et du pays”, souligne le ministre des Finances. Le budget a été articulé autour de ces 3 fondamentaux, dit-il. Et d’ajouter qu’aucun Mauricien n’a été laissé sur le pavé.

Encore moins les jeunes adultes qui vont débuter dans la vie active ou démarrer des études tertiaires. Ceux qui ont eu 18 ans à partir de janvier 2023 percevront Rs 20,000. Une mesure qui s’insère dans le cadre du 55e anniversaire de l’Indépendance du pays. Ils seraient au nombre de 15,000 bénéficiaires de ce cadeau one-off. Ils devront se faire enregistrer auprès de la MRA.

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