«…Lakoz sa mo dir bann dimounn ki kritike zot pa trouv pli lwin ki dan bout zot nene…», dixit le Premier ministre, Pravind Jugnauth. Le ton est alors donné mercredi après-midi à Beau-Vallon à l’heure de l’inauguration officielle d’un espace sportif en plein air (MUGA). Une cérémonie qui, comme à l’accoutumée, était teintée d’une forte couleur politique, le “koup riban” étant même appelé à devenir plus fréquents à l’approche des législatives.
À un moment, on se serait cru à un meeting du MSM où mieux, au lendemain de la proclamation des résultats. Les trois élus de la circonscription No.12 (Mahebourg/Plaine Magnien), dont le ministre des Sports, Stephan Toussaint, ont été portés en triomphe par des partisans.
Toutefois, on ne peut demeurer insensible aux critiques adressées par le Premier ministre, non seulement à l’égard de ses adversaires politiques, mais aussi contre la presse, désormais l’une de ses cibles préférées. Il était donc de notre devoir de réagir en mettant les points sur les i. Il était aussi très important de renforcer nos prises de position, notamment celle de dimanche dernier en faveur des para-athlètes.
Au moins, a-t-on fait notre devoir de patriote en dénonçant la décision absurde de son ministère des Sports, par le biais du ministre Stephan Toussaint. Celle d’avoir, dans un premier temps, pris la décision de financer le déplacement de six qualifiés seulement sur les 14 aux Mondiaux de Kobe au Japon (mai) !
Sauf que, sous la pression, le ministère a craqué et a décidé, mercredi après-midi, de faire machine arrière, pratiquement au même moment où le PM faisait son discours ! Aussi étrange soit-il, Pravind Jugnauth n’en a pas fait mention, alors que le ministère des Sports a parlé d’une intervention auprès celui des Finances. Est-ce à dire qu’il n’était pas au courant ? Sinon, comment louper une telle aubaine pour vanter davantage les mérites de son gouvernement ? Impensable, n’est-ce pas, pour le politicien d’expérience qu’il est ?
Nos critiques pour dénoncer cette décision inhumaine étaient largement justifiées, aussi bien que le cri du coeur du président du Mauritius Paralympics Committee (MPC), Jean-Marie Malepa et le coup de gueule de la para-athlète Noemi Alphonse sur un réseau social. Même qu’un appel à la solidarité nationale avait été lancé dans Week-End pour réunir quelque Rs 3M pour soutenir les huit para-athlètes « discriminés ».
Fallait-il cependant en arriver là ? Certainement pas, si ceux concernés avaient fait leur travail avec plus de professionnalisme. D’ailleurs, comment a-t-on pu négocier avec le ministère des Finances pour compléter le budget, mais pas avant ? Avait-on au moins pris en compte l’ampleur des conséquences psychologiques sur le mental de ces handicapés ?
Preuve qu’on peine toujours difficilement à comprendre, au ministère des Sports, les besoins et les aspirations d’un athlète de haut niveau. Contrairement au traitement princier qui est accordé au Mauritius Sports Council et au Mauritius Multisports Infrastructure Limited (MMIL), pourtant critiqués dans le dernier rapport de l’Audit.
Ce même MMIL — gestionnaire du complexe sportif de Côte d’Or — qui a largement dépassé son budget initiale de plusieurs millions de roupies! Et pourtant, Pravind Jugnauth n’a pas raté l’occasion de défendre la construction de ce complexe sportif d’être un éléphant blanc, tout en mettant en avant les facilités offertes au grand public !
Aussi, ne manque-t-il pas de louer les mérites du High Performance Center sis au même endroit et notamment la décision de ces athlètes britanniques de s’y préparer en vue des Jeux olympiques de Paris. L’objectif, selon lui, est d’attirer encore plus d’athlètes étrangers. Tant mieux si cela peut offrir au pays une meilleure visibilité mondiale !
Toutefois, combien sont-ils monsieur le Premier ministre les qualifiés mauriciens aux Jeux olympiques de Paris a avoir profité de ces facilités ? Si ce centre était aussi performant comme vous le dites, pourquoi Maurice n’a-t-elle pas été en mesure de battre son record régional de 92 médailles aux Jeux des Iles de l’année dernière à Madagascar ?
Les solutions, ce n’est pas à nous de les trouver, mais à vous en tant que Premier ministre de ce pays et à ces messieurs qui croient tout savoir. La critique est aisée, mais l’art est difficile. C’est la raison pour laquelle nous continuerons à assumer notre responsabilité sociale en jouant pleinement notre rôle de chien de garde en nous assurant que les droits d’aucun athlète ne soient lésés. Contrairement à d’autres qui, malheureusement, font de la politique sur leur dos comme ces
charognards avides de la moindre proie facile !
Jean-Michel Chelvan