Les vrais sujets…

Il est normal qu’on se passionne pour le feuilleton qui se déroule au sein de l’opposition, la politique ayant de tout temps été un thème éminemment populaire après le football. Que le feuilleton soit à suspense, avec de multiples rebondissements, ou connaisse un dénouement inattendu, les Mauriciens sont un public très friand des péripéties politiciennes. Et le plus croustillant, c’est que chacun y va de sa petite analyse et de son commentaire.

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Le feuilleton peut, parfois, propulser de manière spectaculaire des acteurs que l’on croyait disparus de l’affiche. À l’instar d’Adrien Duval, qui a subitement décidé de sortir de l’ombre et de ses déboires bitumés politico-judiciaires dont on croyait qu’ils mobilisaient toute son énergie, pour ravir la vedette au trio de tête de l’alliance de l’opposition.
Cela donne lieu à des situations plutôt paradoxales. Si le leader du PMSD insiste qu’il n’est pas dans ses habitudes de discuter des pourparlers au sein des alliances où il est engagé, son fils ne se gêne pas pour commenter en long et en large ces mêmes discussions.

Au nom probablement de son… nom! Qu’il prend pour un avantage particulier qui l’autorise à faire ce que des porte-parole habituels n’osent entreprendre.

Cela ne manque pas de susciter des interrogations au sein même de la basse-cour bleue, des élus notamment qui n’ont, eux, pas jugé utile de s’immiscer dans les négociations en cours entre les leaders du PTr, du MMM et du PMSD.

Lorsqu’il regrette que les Ganoo, Obeegadoo, Ramano et même Jagutpal n’aient pas été pris “on board”, selon la formule consacrée, au sein de l’alliance PTr/PMSD de 2019, Adrien Duval – dont l’absence était remarquée à la grande réunion des bleus, hier – critique et Navin Ramgoolam et son père, le leader du PMSD, activement engagés dans les négociations d’alors.

Entre celui qui venait tout juste d’être malmené par le papi, mardi dernier, sur les terres arrachées aux associations tamoules, Steve Obeegadoo et Kailash Jagutpal – que le leader de l’opposition avait terrassé avec sa PNQ sur le Molnupiravir –, Adrien Duval prend des libertés qui ont de quoi choquer les caciques du PMSD autant que ceux qui ont été élus lors du dernier scrutin.

Tout cet épisode n’est malheureusement qu’une énième manifestation de la problématique des pratiques dynastiques inhérentes à certains partis où le patronyme donne des droits que d’autres, bien plus légitimes, pourtant, n’osent exercer ni même revendiquer. S’il y a déjà eu passation de pouvoir de père en fils, autant la rendre publique, dès maintenant, pour que les choses soient parfaitement limpides.
Les alliances se feront ou ne se feront pas, certains assumeront leur responsabilité devant l’Histoire d’avoir favorisé la reconduction d’un régime dangereux, mais tout cela ne doit absolument pas occulter tous ces vrais sujets qui devraient davantage nous préoccuper.

À commencer par ce dernier rapport de l’audit qui, cette année encore, établit toute l’étendue du pillage éhonté commis avec l’argent des contribuables. Ce rapport a aussi ceci de particulier qu’il expose le bluff, la vacuité et la tromperie des discours officiels.

Pas étonnant que les partis participant au gouvernement n’aient que des palabres à offrir lors de leurs sorties publiques, au lieu de venir expliquer pourquoi ils gaspillent avec autant de désinvolture les fonds publics. D’autant que Pravind Jugnauth avait osé prétendre gérer l’argent public comme si c’était sa trésorerie personnelle.

Lui, qui a récemment repris la célèbre formule de feu Cardinal Jean Margéot qui s’élevait contre ses situations paradoxales où ce sont “lisien ki vey sosis”, devrait se pencher sur sa propre mission de “gardien de nos saucisses”, de notre argent des impôts directs, de la TVA, des taxes routières, est pris en flagrant délit de les dévorer sans vergogne. Comme en atteste le dernier diagnostic sévère de l’audit.

Les commentaires sur les dossiers dont le gouvernement revendique le succès sont particulièrement accablants. Après les épisodes d’inondations de ces dernières années et celui très spectaculaire du 15 janvier dans le sillage de Belal, on aurait pu croire que l’aménagement de drains allait tambour battant. Oh que non ! Rien que 4% réalisé !
Pour le logement, c’est pareil. Malgré l’existence de la NHDC et la création de la nouvelle obscure structure connue sous l’appellation de New Social Living Development, les réalisations sont nulles. Malgré tout le tamtam, les nombreuses poses de première pierre, les ridicules coups de pioche bien synchronisés avec casques de protection pour faire plus vrai que nature, zéro maison formellement livrée sur les 12,000 qui devaient toutes être sorties de terre en fin de mandat.

Le ministère de Kailash Jagutpal en prend aussi pour son grade et cela n’est guère étonnant, quoi qu’en pense Adrien Duval. C’est à Eshan Juman que ce rapport donne raison puisqu’il révèle les conditions déplorables des entrepôts du ministère de la Santé.

Et malgré les crises d’urticaire publiques du Premier ministre suivant les photos de boîtes de tomates rouillées retrouvées dans les entrepôts de l’hôpital Jeetoo, le directeur de l’audit a, lui, fait encore mieux, il a recensé des rats et des excréments de rongeurs dans des structures de la Santé.

L’Éducation n’est pas en reste. Là aussi, l’échec est patent. C’est un ministère rongé par l’incurie, le bricolage et le gaspillage, pendant que des milliers d’enfants sont jetés sur le pavé. Les statistiques étant particulièrement cruelles, seuls 4 sur 10 enfants qui intègrent le primaire atteindront la fin du cycle du secondaire.

On pourrait citer comme ça la longue litanie des procès de mauvaise gestion instruits par le directeur de l’audit, mais il y a tellement d’autres bizarreries qui interpellent. Comme le traitement dont a bénéficié Franklin pour son transfert à La Réunion. Avec son accès à la classe affaires depuis le tarmac directement, comment ne pas accréditer la thèse que le trafiquant de drogue est toujours protégé ?

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