Financement des partis politiques : une navigation en eaux troubles…

PADMA UTCHANAH
Présidente du Ralliement
Citoyen pour la Patrie

La transparence politique est un vain mot en notre démocratie. Une omerta consensuelle règne en toute impunité au sein des partis du système ou de l’Establishment. Notre loi en matière de transparence financière des formations politiques est complètement pervertie, ou tout au moins un leurre.

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Le mois de décembre 2019 a été le théâtre de ce qui s’apparente à une tartuferie. Lors de la déclaration des dépenses par les candidats au regard des législatives 2019, les montants pour la campagne électorale de la part des leaders politiques ne peuvent que nous laisser dubitatifs. La valse des chiffres est tout à fait risible, quand on constate que Pravind Jugnauth n’a dépensé que Rs 124 333, Navin Ramgoolam Rs 144 000, Xavier-Luc Duval et Ganoo caracolent en tête avec Rs 146 375 et Rs 148 550 respectivement. Quant à Paul Bérenger, il reste un petit joueur parmi ses camarades avec la modique somme de Rs 100 937. Le meilleur élève revient à Nando Bodha avec Rs 150 000. Un élève très assidu à tel point qu’il a obtenu exactement le montant autorisé légalement. Le compte est bon. Et à part ça ? Tout va très bien, Madame la Marquise !

Il faut poser des fondations solides afin de lutter contre la corruption et d’asseoir une démocratie saine. Il est temps que les partis politiques puissent se déclarer et s’enregistrer, de manière permanente, auprès de la Commission électorale (actuellement l’enregistrement a une durée limitée, le temps d’une élection seulement). L’enregistrement auprès de la Commission électorale doit alors leur conférer juridiquement la personnalité morale, ce qui leur donnera une existence juridique ou légale. Il faudrait, dans le même temps, poser un encadrement, pour une réelle démocratie, du fonctionnement des partis. Ainsi, tous les partis déclarés doivent obligatoirement détenir un compte bancaire. Les individus et entreprises ou autres organisations ne peuvent faire une donation de plus de Rs 20,000 par an à un parti. Les donations provenant d’une autorité publique étrangère sont interdites. Toute donation supérieure à Rs 2,000 doit obligatoirement se faire par virement bancaire ou chèque. Toute donation doit donner lieu à un reçu. Les partis politiques doivent établir et déclarer leurs comptes annuellement. Un candidat ne peut pas dépenser plus de Rs 300,000 pour sa campagne électorale. Les apports matériels du parti dans le cadre de l’élection sont pris en charge dans les dépenses du candidat. Chaque élu doit déclarer minutieusement ses dépenses dans le cadre de la campagne officielle. Les dépenses déclarées font l’objet d’un contrôle strict de la Commission électorale. Tout dépassement constaté au plafond des dépenses donne lieu à l’annulation de l’élection et l’inégalité de l’élu pour une certaine durée, disons de deux ans.

Outre le financement des partis politiques et des candidats, les avoirs de nos élus doivent être réellement et effectivement légiférés et encadrés. Il est impératif de vérifier les comptes bancaires, le patrimoine de nos élus et membres de l’Exécutif avant et après leurs mandats ainsi que ceux de leurs proches, ceux pouvant servir comme prête-nom. Cela a pour but de veiller à ce que ces dirigeants ne constituent pas un bas de laine occulte sur les derniers de l’État, et par voie de conséquence l’argent des contribuables.

Par ailleurs, notre parlement fonctionne au ralenti comme un air de vacances prolongées qui flotte avec insolence en ce lieu auguste. Le maître de l’horloge décide au gré de ses humeurs de figer le temps au grand dam de l’opposition. On se plaint de la suspension du Parlement par le Premier ministre parce qu’il doit voyager. Un seul parti, lors des dernières élections, a proposé de rendre autonome le Parlement et que les sessions parlementaires soient fixées par la Loi. C’est le Ralliement Citoyen pour la Patrie. Oui, le RCP avait posé de vraies questions et apporté de vraies réponses. Oui, il faut donner – et c’est un corollaire de la Démocratie – une véritable autonomie au Parlement, dans son fonctionnement. Le Premier ministre, ne peut pas, en sa qualité de chef de gouvernement, être le chef de l’assemblée (Leader of the House). Ce n’est plus le cas en Grande-Bretagne depuis très longtemps. L’Assemblée nationale doit être présidée par un Speaker qui est député.e et non, comme tel est le cas actuellement ou auparavant, par une personne extérieure, parfois même battue aux élections mais nommée Présidente de l’Assemblée par la suite. Pour l’autorité du Speaker, afin qu’il puisse commander le respect dans la police des débats, il doit être un élu. L’Assemblée doit comprendre en son sein 5 à 6 commissions permanentes afin de mieux contrôler, sur un plan technique, l’action du Gouvernement et du suivi du Budget : il s’agit des commissions économiques, de la Sécurité intérieure, Affaires sociales, Éducation et Culture, Affaires étrangères, des Industries et productions. Les périodes des sessions parlementaires doivent être fixées constitutionnellement ou du moins légalement et non laissées au bon vouloir du seul Premier ministre, ce qui conduit à des abus (suspensions prolongées du Parlement comme en 2014).

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