À nous la camisole de force !

On peut l’affirmer sans risquer de procès : la folie gagne le monde. Dans une société dominée par une perte graduelle des valeurs (humaines), où seul le profit fait loi, et pas uniquement en termes pécuniaires, Sapiens sera devenu en deux petits siècles seulement totalement insensible, impassible, inflexible… que ce soit face à la misère humaine ou à toute autre forme de détresse, environnementale et autres. Au point d’occulter – volontairement, faut-il le préciser – les plus gros enjeux auquel l’humanité aura été confrontée depuis son apparition, à commencer naturellement par le changement climatique. Pourtant, ce n’est pas faute de savoir… et même de voir. Car si la portée du phénomène pouvait encore paraître relativement abstraite à la fin du siècle dernier – faute de données, mais aussi de visibilité –, nous n’avons aujourd’hui plus aucune excuse pour l’ignorer.
Outre le fait d’avoir essuyé cette année – fait assez rare que pour le souligner – deux cyclones successifs, dont le fameux Belal, qui restera longtemps gravé dans la mémoire collective sous notre latitude, il n’aura en effet échappé à personne que cet été aura été, à Maurice, particulièrement chaud. Et notre pays n’est pas, à ce titre, le plus mal loti. Déjà, les experts avertissaient fin 2023 que cette année briserait probablement le mur des records de chaleurs. Et voilà que quelques mois plus tard, soit il y a quelques jours à peine, Berkeley Earth venait déjà avec un rapport pour le moins peu joyeux. La faute à une météo extrême constatée depuis le début de l’année.
Dans tous les cas, jamais prévisions n’auront été aussi rapides. Ainsi, notent les scientifiques de cet organisme, janvier aura été le plus chaud jamais enregistré dans le monde depuis que nous avons commencé à faire des relevés, soit depuis 1850. Quant au mois de février, il aura débuté avec une avalanche de records aux quatre coins de la planète. Ce qui n’est pas de très bon augure pour le reste de l’année, que Berkeley Earth prévoit d’ailleurs « historique », dans le mauvais sens du terme bien entendu. Ainsi 2024, disent les auteurs de l’étude, reprendra le titre « d’année la plus chaude » à 2023, et ce, avec 60% de certitude. Quant à la possibilité que l’année se solde par un seuil de réchauffement supérieur à +1,5 °C comparé au niveau préindustriel, elle est cette fois évaluée à… 75%.
Certes, El Niño n’est pas étranger à ce phénomène, même si l’on attend l’arrivée de son homologue « froid », La Niña, pour la deuxième partie de l’année (mais qui ne devrait pas être trop perceptible). Pour autant, le fait que les records de chaleur se succèdent à un rythme si soutenu – chaque nouvelle année chassant l’autre en cette matière –, le tout couplé à une multiplication de phénomènes extrêmes tous azimuts, devrait nous inciter à revoir rapidement nos priorités et à prendre le problème (enfin) à bras-le-corps.
Le souci, c’est que nous n’avons plus vraiment le temps. Il faut dire que la météo n’est pas un fléau comme les autres. Contre le dérèglement du climat, pas de vaccin, pas plus que d’espoir de voir la question réglée au lendemain de la signature de quelconque protocole. Le changement climatique aura pris des décennies pour s’installer, et, quand bien même l’on accélèrerait nos efforts, en prendra de toute manière tout autant pour retrouver un relatif équilibre. Si c’est encore possible, bien entendu. Et ça, on a tendance à l’oublier.
Chaque molécule de gaz à effet de serre émise vient en outre renforcer le problème, avec un effet dominos aux conséquences pour l’heure difficilement mesurables. À l’instar du jet-stream polaire qui, en l’espace de 30 ans à peine, sera passé d’une forme linéaire et stable à une forme ondulatoire, provoquant dès lors l’emprisonnement de masses tantôt d’air chaud, tantôt d’air froid. Phénomène dû, là encore, au changement climatique, et plus précisément à la différence de température entre le sol et les océans.
Oui, le monde est devenu fou. Le climat s’affole, le thermomètre explose de plus en plus vite, les épisodes climatiques catastrophiques se succèdent, sans épargner aucune région, le béton et les cultures remplacent nos forêts, nombre d’espèces animales et végétales rejoignent le clan des espèces en danger d’extinction… et la liste pourrait s’allonger quasi indéfiniment. Et rien ne semble vouloir être fait pour mettre à notre folie un gros coup de frein. Jusqu’à ce que nous nous mangions le mur… à défaut bien sûr d’être internés.

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