Deux âmes tourmentées, deux destins qui se croisent tandis que, tapis dans l’ombre, le faiseur de miracles guette. Chaque nuit, le faiseur de miracles apparaît à une âme en perdition et lui offre la réalisation d’un seul de ses souhaits. La personne choisie ne peut que choisir ou refuser mais n’a droit qu’à un seul miracle.
Cette pièce originale, écrite par Georges André Decotter, adaptée et mise en scène par Jon Rabaud, sera présentée du 6 au 8 juillet, au Caudan Arts Centre. Derrière cet ambitieux projet, un homme, Pierre-André Boullé qui lance les Productions Trois avec pour but de célébrer et accompagner la production théâtrale mauricienne en démarrant par l’œuvre de son grand-père, Le Faiseur de miracles.

Mercator le marin
Ils seront quatre talentueux comédiens sur la scène du Caudan Arts Centre, le 6 juillet prochain. Ils sont Guillaume Silavant, Edeen Bhugeloo, Clémence Soupe et Rachel de Spéville et sont dirigés par le metteur en scène Jon Rabaud pour la présentation théâtrale, Le Faiseur de Miracles. Cette idée revient à Pierre-André Boullé, petit-fils, de feu Georges André Decotter, dramaturge mauricien.
Cette pièce de théâtre, Le Faiseur de miracles, que lui a confié son grand-père qui l’avait écrite mais jamais mise en scène, sera dans le domaine du concret à partir du 6 juillet. L’idée, comme l’explique Pierre-André Boullé a germé en lui en mai 2022 lorsqu’il sortait du spectacle Un tramway nommé désir au Caudan Arts Centre.
« Je me suis engagé dans un projet de festival de théâtre au niveau du groupe Eclosia, entreprise où je travaille. » C’est ainsi que Les Productions Trois voit le jour et prévoit non pas une pièce, mais un cycle de trois pièces adaptées des œuvres de Georges André Decotter. La volonté est de mettre en place une entreprise qui réunira les talents locaux de la nouvelle génération en les aidant à trouver une structure et les moyens nécessaires pour la création, la réalisation et la production théâtrale.
« Un beau mélange »
En mettant en scène Le Faiseur des miracles, Pierre-André Boullé a voulu rendre hommage à son grand-père qui a milité pour l’art et la culture. Et qui mieux pouvait bien restituer l’ambiance propre à cette pièce que Jon Rabaud ? Un réalisateur et metteur en scène doué, qui a cartonné avec The Blue Penny et qui se lance pour la première fois dans le registre théâtral.
D’ailleurs, The Blue Penny, il l’a bien construit comme une pièce de théâtre, avec des unités de temps, de lieu et d’action. Jon Rabaud raconte avoir été contacté par Pierre-André Boullé et s’est dit impressionné par le récit Le Faiseur de miracles, pièce écrite en 1963 mais jamais jouée. « C’est très poétique, proche des racines littéraires du théâtre mauricien mais également moderne dans sa construction et son intrigue. »
Pourtant, Jon Rabaud a éprouvé le besoin d’apporter sa touche en la réécrivant, histoire de donner un coup de jeune à la pièce. Il s’est aussi attardé sur la mise en place des personnages avec Edeen Bhugeloo dans le rôle de Mercator le marin et Guillaume Silavant dans celui du Faiseur de miracles. Rachel de Spéville jouera le rôle de la femme que Mercator a connue et qui hante ses souvenirs et Clémence Soupe ; Hilde, la fille du port qui croisera le destin de Mercator.
« En termes de travail, c’est plus mon regard que je pose sur l’œuvre de Decotter. J’ai voulu conserver l’essence de la pièce qui date des années 60, mais pour la rendre plus moderne, j’ai raccourci certaines scènes, diviser des scènes en deux et rajouter des éléments qui viennent de moi. Très souvent ce que Mercator dit, ce sont des phrases inspirées de mon père qui était marin. Dans la pièce, je ramène aussi un peu ce côté cinématographique. Tout est pensé comme dans une œuvre au cinéma, mais je ne veux à aucun moment que le théâtre devienne spectacle. Les personnages comme Rachel et Clémence ont aussi été créés pour les besoins de la pièce. »
Jon Rabaud définit cette pièce théâtrale comme un beau mélange assorti au gothique, mais il n’en dira pas plus. « Il y a la poésie du texte de Decotter et de l’époque où se passe la trame. Nous, on travaille sur le décor, la mise en scène, les acteurs. La lumière jouera un rôle déterminant avec une atmosphère à la fois fantastique et gothique. »
Le réalisateur reconnaît au passage que la plus grosse difficulté rencontrée réside dans l’écriture. « Il m’a fallu décortiquer la pièce, ajouter les intrigues. L’idée de la réécriture m’est venue à travers une phrase d’un des personnages et cela m’a aidé à développer l’intrigue tout en respectant la plume de l’auteur et le sens de la pièce. »
Clémence Soupe parle de son personnage Hilde qui croise la route de Mercator, le marin. « Des destins bien entremêlés avec cette ombre noire au-dessus de nous qui est celle du faiseur des miracles. Ce qui est intéressant, c’est que mon personnage a été créé pour les besoins de la pièce, sans référence au regard du metteur en scène Jon Rabaud. À travers l’écriture de Georges André Decotter, il y a de la poésie qui émane. »
Selon Clémence Soupe, c’est la première fois qu’il se retrouve dans un registre poétique empreint de légèreté, dans un univers aussi noir. Pour elle, il est clair qu’il y a beaucoup de nuances dans cette pièce qui lui permet toutefois d’être à son aise pour mieux véhiculer l’image de son personnage de Hilde. « Ce qui me plaît aussi, c’est qu’on fait partie d’un projet de lancement à travers Les Productions Trois. C’est très valorisant et ça sonne comme une reconnaissance pour notre métier d’acteur. »
Edeen Bhugeloo sera dans la peau de Mercator, le marin qui ne veut plus reprendre la mer dont il a fait deux fois le tour. « Je me suis percé l’oreille, signe que j’ai franchi le cap Horn, un endroit dangereux considéré comme le cimetière des marins avec rien autour. Le Faiseur de miracles, après The Blue Penny de Jon Rabaud au cinéma, Simin Zetwal de David Constantin, est un projet d’envergure dont je suis fier de faire partie. Je suis heureux de voir qu’à travers Les Productions Trois, on pourra continuer le théâtre comme un professionnel. »
Guillaume Silavant, proche de son personnage tout de noir vêtu, trouve que c’est un honneur d’incarner le Faiseur de miracles qui, pour lui, « reste un travail de mémoire », un hommage rendu à Decotter qui a existé durant l’âge d’or du théâtre à Maurice. « Remettre au goût du jour une pièce écrite à l’époque et dont je suis fier d’endosser le rôle principal ! J’en comprends la valeur, cela reste très lyrique, poétique. »
Quant à Rachel de Spéville, elle se présente comme « une renaissance du passé » de Mercator, qu’elle a pris plaisir d’incarner. « Je suis reconnaissante de voir que les talents sont reconnus et qu’on pourrait vivre de notre art à Maurice. J’étais au Maroc il y a trois ans et où j’ai enchaîné des pièces. Et je me suis dit si à Maurice je trouverais le moyen de m’épanouir, que ce serait dans le domaine du possible. »
À noter que Le Faiseur de miracles est la première pièce du cycle de Georges André Decotter. Les représentations auront lieu les jeudi 6 juillet à 19h30, vendredi 7 juillet, à 14h et 19h30 et samedi 8 juillet à 14h et 19h30.

