Tic-tac !

Nous en parlions récemment : le point de bascule pourrait être bientôt franchi. Ce point imaginaire, car l’on ne peut le situer avec exactitude dans le temps, marque le début de l’emballement climatique. Autrement dit le moment où, quoi que l’on fasse, le climat continuera de se réchauffer, sans que l’on ne puisse plus de quelconque manière inverser la tendance. En d’autres termes, à partir de cet instant précis, plus de retour en arrière possible. Sans en être encore arrivé là, du moins le pense-t-on, certaines régions du monde sont d’ailleurs déjà soumises à des conditions nouvelles, extrêmes doit-on préciser, entre autres en termes de sécheresse.

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Serait-ce le début de la fin ? Pas forcément. Car face à cela, nous avons encore le choix, à commencer par réduire le plus drastiquement possible nos émissions de gaz à effet de serre. Pour autant, même si nous décidions de remettre un peu de lucidité dans la balance économique, que l’on ne pense pas que cela sera suffisant. Au mieux, nous éviterons d’aggraver le problème, mais en aucun cas nous ne le résoudrons dans un court laps de temps. Et encore moins par le biais de la technologie, toutes « solutions » confondues, y compris celle de la capture de dioxyde de carbone.

Autant dire qu’il y a urgence. Hélas, même si l’on s’accorde à reconnaître qu’il est temps d’agir, le monde n’en prend absolument pas le chemin. Le discours général est d’ailleurs on ne peut plus paradoxal puisque, d’un côté, nous nous présentons – à chaque occasion qui se présente – en ardents défenseurs de la cause climatique, allant jusqu’à proposer moult plans de réduction de nos émissions polluantes lors des traditionnelles grands-messes du climat, tandis que de l’autre, nous nous évertuons à maintenir le plus vivant (et vivace) possible notre système économique. Et donc de production. Et donc d’émissions carbone. Plus contradictoire que ça, tu meurs !

C’est que les enjeux, tant au niveau de l’appareil politique que des grands conglomérats, sont colossaux, bien qu’à des degrés divers. Aussi n’y a-t-il rien d’étonnant à voir les grandes compagnies pétrolières non seulement poursuivent leurs explorations, mais aller jusqu’à promettre une production accrue d’or noir. Ce qui, plus qu’une ineptie, constitue une des plus hautes trahisons qui soit envers le vivant. Comment, sinon, expliquer que pendant que certains s’attellent à chercher de nouvelles alternatives vertes et durables, d’autres tentent d’accélérer le processus de la formation géologique d’énergie fossile ? En quoi transformer le pétrole en énergie renouvelable permettra-t-il de sauver le monde de la catastrophe annoncée ?

C’est pourtant ce que font les géants du pétrole (et du gaz fossile) – tout comme les politiques qui les soutiennent –, et qui se moquent en réalité éperdument que notre planète soit en surchauffe. À l’instar de BP, qui disait vouloir réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 35% d’ici 2030, et qui aura revu ses chiffres à la baisse, parlant aujourd’hui de 20%. Ou de Shell, qui a décidé de ne plus augmenter ses investissements dans les énergies renouvelables. Voire encore d’ExxonMobil, qui compte pour sa part doubler la quantité de pétrole produite à partir de réserves de schistes des États-Unis d’ici… cinq ans.

Si l’on prend cet exemple, c’est parce que le marché de l’énergie est le moteur de la croissance. Sans énergie, en effet, pas de production. Pas plus que de transport de biens. Bref, le « monde », tel qu’on le conçoit aujourd’hui, s’écroule. Ce qui ne signifie bien sûr aucunement que notre espèce n’y survivrait pas. A contrario, si nous poursuivons sur le chemin de l’énergie carbone, non seulement notre civilisation s’effondrera, mais le « séisme » climatique sera tel qu’il signera la fin de la majeure partie des espèces terrestres et marines. Y compris la nôtre, cela va sans dire.

La question demeure donc : puisqu’il nous faudra de toute façon faire une croix un jour ou l’autre sur les énergies polluantes, pourquoi ne pas commencer à couper graduellement les robinets dès aujourd’hui ? Ou, dit autrement, qu’est-ce qui nous empêche réellement de réfléchir à un mode sociétal plus en accord avec les réalités du jour, et dont notre survie est intimement liée ? Une question qui ne semble pas être la priorité pour l’heure, quoi que le tic-tac de notre horloge se fasse de plus en plus pressant.

 

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