L’exemple

— Allô mon enfant, c’est moi, tante Zaza.

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— Ma tante ça fait…

— Ayo, combien de fois il faut te dire que les gens bien ne disent pas ma tante, ce sont les gens ordinaires qui causent comme ça. Les gens bien disent Tante.

— Ayo M… Tante Zaza, je vois que malgré le fait que tu vis en Australie depuis des années, tu as gardé les vieilles manières de Maurice.

— Pas les vieilles manières mon enfant, manières, les bonnes manières. C’est ça qui fait la différence entre les personnes comme il faut, comme nous, et les… autres.

— Comment ça va en Australie ?

— Ayo mon enfant, qu’est-ce que je vais, te dire ? C’est plus pareil comme avant. Le gouvernement a laissé entrer toutes sortes de gens. Dire qu’on est venus ici pour échapper à la menace asiatique. Aujourd’hui on ne voit que ces gens-la, sans compter les Africains, les Chinois et les je ne sais pas qui ! Il y a de moins en moins des gens de notre milieu ici.

— Je ne comprends pas ce que tu veux dire.

— Je veux dire qu’avant il n’y avait que des gens bien comme nous qui descendent des Européens.

— Même si, comme toi, ils ont la peau un peu, disons, foncée…

— C’est le soleil. Quand j’étais petite on me disait toujours Marie-Thérèse ne vas pas au soleil, ton teint va gâter. J’ai pas écouté, et voilà le résultat : je suis un peu bronzée.

— Un peu seulement Tante ?

— Je vois que tu es toujours insolente même ! Si tu étais devant moi tu aurais fini d’avoir tes deux calottes !

— Tu sais, le monde est en train de changer, il faut vivre avec, les gens se mélangent beaucoup plus entre eux, même dans les familles.

— N’oublie pas que ta cousine s’est mariée avec un… enfin, c’est vrai qu’il est un docteur, qu’il parle un très bon anglais et a une très bonne place, mais il est…

— Il est noir, quoi !

— Arrête de dire des couillonnades ! Il n’est pas noir, comme ces noirs qui sont carrément gros bleu, il est brun foncé. Tu sais très bien que j’ai été forcée d’accepter le mariage parce que ta cousine avait un jacques dans tente !

— Tu as bien fait d’accepter tante Zaza. Tu as vu comme ils sont bien ensemble et comme leur fille est jolie, c’est une cocasité, toi !

— J’espère seulement qu’en grandissant, elle va plus tenir du côté de sa maman que de son papa ! Ayo, pourquoi tu me fais parler de mes affaires ? Moi je t’appelle pour avoir des news. On me dit qu’il y a eu encore un biz-biz politique au PMSD.

— C’est pas un simple biz-biz, tante Zaza, c’est une cassure : le PMSD a quitté l’alliance des partis de l’opposition parlementaire !

— Pour quelle raison le PMSD a quitté l’alliance ?

— On n’a pas très bien compris pourquoi. Ça fait plus de deux semaines qu’il a cassé l’alliance et il n’a toujours pas bien expliqué pourquoi il a fait ça

— Il n’a pas dit pourquoi il a fait ça ?

— Il a juste dit qu’on ne pouvait pas travailler avec Bérenger.

— C’est maintenant qu’il découvre ça : il a pris son temps !

— Les gens disent que c’est un prétexte. Il a fait ça parce qu’il était en train de négocier une alliance anba-anba avec le MSM.

— Tu veux dire que le petit Duval était en train de manger la banane par les deux bouts ?

— Je ne veux pas te choquer en te répétant ce que les gens disent qu’il était réellement en train de faire !

— Pas besoin de me dire mon enfant : je connais la capacité des Mauriciens de se moquer de leurs politiciens ! Mais il y a une affaire que je ne saisis pas : tu m’as dit que le fils Duval était en train de négocier anba-anba avec le MSM.

— C’est en tout cas ce que tous ceux qui ont démissionné du PMSD ont dit et répété.

— Il y a eu beaucoup de gens qui ont démissionné du PMSD après la cassure ?

— La majeure partie toi, dont la présidente et deux députés, incluant Richard Duval.

— Si c’est comme ç,a tu as raison : ce n’est pas un biz-biz au PMSD, il y a le feu dans le poulailler ! Mais il y a une affaire que je ne comprends toujours pas.

— Quelle affaire ?

— Tu me dis que le fils Duval était en train de négocier une alliance avec le MSM. Est-ce qu’il n’avait pas démissionné du gouvernement parce que le MSM voulait passer des lois antidémocratiques ?

— Et alors ?! Tu as oublié à quel point les politiciens mauriciens sont capables de dire une chose aujourd’hui et d’affirmer le contraire le lendemain !

— Tu as raison : les politiciens sont capables de tout ! D’après ce que tu me dis, le fils Duval est en train de suivre l’exemple de son père.

— Ah bon ?!

— Papa a toujours raconté qu’après les élections de l’indépendance, Gaëtan Duval a fait un grand meeting à Port-Louis pour demander à ses partisans s’il devait faire une coalition avec le bonhomme Ramgoolam. La foule a hurlé non et Duval a dit qu’il fallait être un mangeur de c… pour faire une coalition avec Ramgoolam.

— Et alors ?

— Quelques semaines après, il faisait la première coalition avec Ramgoolam. On dirait que son fils est en train de suivre son exemple.

J.-C.A.

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