Sur les routes de l’Ouest : les éboueurs réclament de meilleures conditions de travail

L’un habitant une grosse agglomération de l’Ouest et l’autre un village incontournable sur la route de Rivière-Noire. Ils sont tous deux employés comme éboueurs dans une compagnie privée, spécialisée dans la collecte d’objets et de matériel parfois lourds et encombrants dont les managers de compagnies se débarrassent en les disposant dans les poubelles. Et les camions-bennes les transportent ensuite vers le site d’enfouissement, à La Chaumière ou Mare-Chicose. Ils réclament de meilleures conditions de travail.

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Les deux hommes vident les poubelles de la région de Flic-en-Flac, Bambous et Saint-Martin, où il y a une quantité incroyable de sacs et de contenants à soulever chaque jour. « Nous manipulons plusieurs tonnes de déchets par jour. Pénible, notre métier l’est d’autant plus lorsque les tournées se font plus nombreuses, et ce sans hommes supplémentaires. Patron-la pa le pran dimoun an plis pou fer travay-la », confie l’un des deux qui, visiblement, connaît comme sa poche tous les coins et les recoins de Flic-en-Flac, Bambous et les autres villages avoisinants.

« Nou kondision travay pou vinn de plizanpli difisil. Nou pa gagn bann lekipman ki bizin pou travay, ni soulie, ni enn bon kalite legan e bon mask de proteksion ki bizin », déplore l’autre, en rappelant qur lui et ses collègues sont confrontés à de nombreux dangers, avant de raconter que l’un de ses collègues avait eu la main entaillée par un vieux couteau, alors qu’il vidait une poubelle, et qu’un autre avait eu les doigts perforés à cause d’une seringue suspecte. « Les dangers ne se trouvent pas uniquement dans les poubelles qui sont pleines à ras bord ou lorsque nous sommes accrochés au camion-benne », dit-il.

« Nous sommes aussi exposés à des objets coupants qui traversent l’emballage plastique, sans oublier les drôles de bestioles qui peuvent surgir des ordures, des rats et des asticots attirés par des restes de viande. Bann dimoun krwar ki, kan nou fer sa travay-la, zot kapav permet zot zet tou kalite pouritir dan poubel e ki nou oblize ramase. Nous sommes nous aussi des êtres humains. Nous avons notre dignité. Ils auraient pu avoir un peu de respect pour nous, car nous contribuons énormément à garder leur environnement propre », expliquent-ils. Ils ajoutent que certaines personnes « ne se rendent pas compte ou font semblant de reconnaître que nous faisons un métier difficile, surtout lorsqu’il pleut à grosses gouttes ».

Ce quinquagénaire, qui roule sa bosse depuis douze ans, n’y va pas de main morte. « Puisque nous sommes constamment exposés à des maladies, je crois qu’il est important que la direction nous fournisse des équipements de protection et ceux-ci doivent être adaptés aux risques de la situation. » Il ajoute : « Le modèle porté n’est pas de bonne qualité, pas assez épais et résistant pour protéger les mains des coupures, et les chaussures, qu’ils s’achètent eux-mêmes à bon marché, n’offrent pas une grande sécurité. Si enn obze lour tonb lor lipie ou kapav blese grav. Et les masques que nous portons en cette période de confinement et les conditions dans lesquelles s’exécute la collecte d’ordures recèlent une multitude de risques. »

Il fait de même remarquer que la compagnie n’insiste pas trop pour que les employés portent le dossard, qui rend le travailleur visible dans certaines situations où de gros travaux de construction pour l’asphaltage sont en cours. « Ou kapav perdi lavi dan lespas enn segonn. Sa osi pena problem administration. »

L’autre qui fêtera très prochainement son 60e anniversaire, se joignant à la conversation, croit qu’il est « très important » qu’il adopte des méthodes de travail sécuritaires « pou ki pena blese dan travay ». Il dit avoir déjà été victime d’un accident en raison d’une fausse manœuvre, alors qu’il se trouvait à l’arrière du compacteur. Il avait été transporté d’urgence à l’hôpital, où il avait dû subir une intervention chirurgicale et après quoi il y a été admis pendant un mois. « Mo finn bizin fer koustik pou mo gagn mo saler », se rappelle-t-il.

Cet éboueur de 53 ans, habitant Petite-Rivière, déteste les mercredis et les samedis, les deux jours où il doit se rendre à la porcherie de Saint-Martin pour enlever les déchets des animaux. « Kan ou pase dan bis ou gagn sa loder-la. Mazine ou laba aster, ou bizin tir bann dese-la san bann lekipman apropriye. Ou kapav vomi ou trip parfwa, Pa fasil mo dir ou. » Comme les autres collègues, il croit que la compagnie aurait dû leur fournir du lait à chaque fois qu’ils se rendent à Saint-Martin pour accomplir cette tâche. « Ce n’est malheureusement pas le cas », déplore-t-il .

« Qu’on arrête de nous humilier », disent-ils à l’unisson en lançant un appel au ministre du Travail, Soodesh Callichurn, pour qu’il s’intéresse de près aux conditions dans lesquelles ils opèrent. Reaz Chuttoo, de la Confédération des Travailleurs des Secteurs privé et public (CTSP), et qui a toujours réclamé que le Risk Assessment Report soit effectué sur les lieux de travail pour assurer la santé et la sécurité des travailleurs soit rendu obligatoire, déplore également les conditions de travail des éboueurs à Maurice.

« La CTSP milite depuis des années en vue d’obtenir une Refuse Collection Regulation. Il y avait des amendements en 2013 dans le Remuneration Order pour les compagnies de nettoyage, stipulant que ces travailleurs n’ont pas le droit d’être en contact direct avec les déchets. Cette loi n’a jamais été mise en pratique. Le département de la santé déclare qu’il n’est pas concerné par le Remuneration Order. Nous allons reprendre toute la question avec les autorités concernées et le ministère de l’Environnement dès que la situation retourne à la normale. Bann ebouer pa kapav kontign ramas beze koumsa », dit-il.

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