ASSEMBLÉE NATIONALE : On and off

Et si c’était tout le pays qui était passé en mode on and off? C’est une question qui mérite d’être posée au vu le rythme auquel l’Assemblée nationale se réunit. Un bref rappel de ce qui s’est passé depuis le début de l’année suffira pour établir que tel est effectivement le cas. C’est le 25 mars que les travaux ont démarré, une séance normale qui a été suivie de trois autres les 1, 8 et 15 avril, jour de l’ajournement des travaux pour cause, selon le Premier ministre, de concentration prioritaire sur la réforme électorale. Coup de théâtre, pourtant, le 12 mai avec le prorogation de l’Assemblée nationale toujours avec pour motif que l’urgence est la réforme électorale. Rappel du Parlement le 4 juillet pour examiner ce qui finalement ne sera qu’un mini-amendement qui vise à permettre aux candidats de se présenter à une élection générale sans être obligés de déclarer leur communauté. Les débats durent plus longtemps que prévu et au terme de deux séances, les 7 et 11 juillet, le texte est finalement adopté. Le Parlement est ensuite ajourné au 22 juillet pour repartir pour de longues vacances qui sont supposées prendre fin le 7 octobre prochain à un mois de la présentation du budget 2015. Résultat des courses, thème décidément d’actualité, c’est qu’il n’y a eu que huit séances depuis le début de l’année dont cinq seulement où il y a eu un Question Time permettant aux députés de poser des questions sur des sujets d’actualité.
Quant à la séance de mardi dernier, elle aura été, malgré le contexte très particulier des tractations d’alliance, instructive à plus d’un titre. Si la PNQ a porté sur le métro léger et que le leader de l’opposition a insisté pour que la réalisation de ce projet soit considérée après les élections, le ministre des Infrastructures publiques s’est voulu rassurant sur le calendrier arrêté, sur le choix des firmes constructrices et le maintien de l’emploi dans les compagnies de transport traditionnelles, le coût total de la réalisation de ce chantier étant de Rs 22 milliards. Mais c’est, en fait, le cheval qui s’est invité comme plat de résistance à cette séance avec des remarques qui ont fusé de part et d’autre sur les courses hippiques et le Mauritius Turf Club.
Avant même que ne débutent les travaux, avec son quart d’heure de retard devenu coutumier, les commentaires allaient bon train entre les élus de tous bords. A défaut de pouvoir koze-kozé, le vice-Premier ministre et ministre des Services publics, Rashid Beebeejaun, a eu recours au langage des signes pour s’adresser au député du MSM, Shawkatally Soodhun. Les échanges portaient apparemment sur les arrangements faits pour la rupture du jeûne dans l’après-midi.
Il y a bien eu des signes d’impatience que la séance n’ait pas encore commencé à 11 h 40. Aussi a-t-il lancé : “Bizin kravas bann souval la.” Et lorsque le Premier ministre a fait son entrée dans l’hémicycle, ce sont toujours les vannes autour du cheval et des courses hippiques qui ont fusé, le même leader de l’opposition lançant à Navin Ramgoolam que “ban la pé dir souval inn tass dan paddock!”, ce qui n’a pas manqué de faire sourire l’hémicycle. 
Place ensuite au morceau de choix, les derniers scandales qui ont secoué le Champ de Mars et qui ont été le thème de trois questions des députés Nita Deerpalsing et Rajesh Bhagwan. Navin Ramgoolam annonce d’emblée la couleur: une commission d’enquête sera instituée pour se pencher sur les organisations de courses à Maurice et faire des recommandations en vue de les assainir. Il parle de “remède de cheval”, tandis que Paul Bérenger évoque, lui, la nécessité d’un “bon coup de balai et d’un bon coup de rotin” et Nita Deerplsing “d”écuries d’Augias”.
Si le chef du gouvernement détaille les mesures immédiates qui seront appliquées en vue de redresser les dérives constatées ces derniers temps dans le milieu hippique, Nita Deerpalsing, Rajesh Bhagwan et Mahen Jhugroo n’hésitent pas à dénoncer un à un le manquement noté au Champ de Mars.
Le député du MMM parle de “high-level officers working in Government  at the highest level, although we all know that people may like horse racing and so on  at least to make sure that their presence at the Champ de Mars does not hinder the proper running of the Police Force, of the other services of Government, just by their presence there and their connection with all the mafia at the Champ de Mars”.
Navin Ramgoolam répond que “I totally agree with Honourable Bhagwan, and I have already told the people concerned that they have no business. I know they have a private life, they can do whatever they want, but in those circumstances I do not think it is right, and they are not going to be allowed to do this any further.  I think the honourable Member is totally right to say this”.
La “faillite” ?de la GRA
Le député du MSM, Mahen Jhugroo, vise, lui, directement Paul Foo Kune, bookmaker qui a aussi obtenu un permis d’opération pour une écurie, ce qui constitue un cas flagrant de conflit d’intérêts. Là aussi, Navin Ramgoolam dit être en total accord avec la position du député ajoutant avoir déjà réclamé que des actions soient initiées. Question dans le même registre du député Joe Lesjongard qui parle de propriétaire d’écurie dont la famille est aussi actionnaire dans une compagnie de jeux.
Nita Deerpalsing va, elle, faire le procès de la Gambling Regulatory Authority et de sa “faillite” dans la mesure où elle n’a pu exercer un contrôle adéquat sur ce qui se passe au Champ de mars et, partant, suggérer la mise à exécution de la décision de regrouper les activités de jeux. Une préoccupation également partagée par le député du MSM, Nandoi Bodha.
“My moustache is on and off”
Si le Premier ministre a déclaré que la GRA n’a pas totalement failli, il a souligné que le regroupement des activités de jeux et de paris est en train de se faire de manière graduelle et a assuré qu’aucune nouvelle licence n’a été octroyée. A toutes ces questions et celles portant sur l’utilisation de prête-noms, comme mentionnées par Reza Uteem, Navin Ramgoolam rassure qu’elles feront partie des attributions de la commission d’enquête à venir. 
Parmi les questions au Premier ministre, il y avait aussi celle du député du MSM Mahen Seeruttun sur le monopole accordé à la MBC pour la retransmission des débats parlementaires en direct. Dans ses réponses, le chef du gouvernement a dit que les recommandations du Select Committee qui s’était penché sur la question sont à l’étude, que ce sont les Speakers successifs qui ont autorisé la MBC à filmer les délibérations ou à les retransmettre en direct et qu’il reprendra toute la question avec Razack Peeroo à son retour au pays.
Paul Bérenger se référera, pour sa part, directement aux derniers débats sur l’amendement retransmis en direct pour dire que “even on such solemn occasion, la manipulation is just as ‘infect’? Will he discuss that with Mr Speaker? When coze cozé is on, my moustache is all over television. When coze cozé is off, my moustache disappears from television”, ce qui a provoqué une hilarité générale et qui n’a pas empêché le leader de l’opposition d’inviter le Premier ministre à évoquer tout cela avec le Speaker pour que “la manipulation cesse immédiatement”. Un peu confus, le Premier ministre dira qu’il ne comprend pas comment on peut manipuler des images en direct, mais qu’il se penchera sur les doléances exprimées par le leader de l’opposition.
La tranche des questions pour les autres ministres va tourner aux règlements de comptes et à un exercice de lancement de piques en direction des ministres bien ciblés par l’opposition. Shakeel Mohamed aura eu une réponse très édifiante alors qu’il était interrogé par Lysie Ribot sur le programme d’aide au retour à l’emploi pour des licenciés et autres catégories de chômeurs. 
Pas tendre vis-à-vis de son ancien collègue Xavier Duval, il n’hésitera pas à dire que “the reason why it has delayed is because of this greed of the Minister of Finance then, of taking everything that is of employment: Youth Employment Programme, initiative of the Ministry of Finance and Economic Development. Second issue, what we are going to have is also Back To Work Programme announced en fanfare in the Budget, initiative of the Ministry of Finance. I am only here as they call me so well a junior Minister; I can’t answer that question. I am a small junior Minister, I can’t answer the question”.
Ce sera ensuite une vraie passe d’armes entre le leader de l’opposition et ses collègues avec le ministère des TIC’s Tassarajen Pillay-Chedumbrum sur la situation à Ébène. Paul Bérenger, déplorant que le ministère ne se fie qu’à ce que lui raconte la BPML lui lance : “He is telling us what the BPML has told him, well, has he been there? Has he witnessed that awful mess? This is a jewel in our crown and you have cars all over the place anywhere, bus stops anywhere, now you have vans, hawkers, food on the road. It is an awful mess! Is the hon. Minister aware that BPML is part of the problem and not part of the solution?”. Le ministre a expliqué qu’il a fallu un changement dans les règlements pour convertir les rues de la cybercité en voies publiques en vue de pouvoir imposer des contraventions, ce qui est en train d’être fait pour décourager le parking sauvage. Il a également annoncé la réalisation sous peu de l’aménagement d’un bâtiment dédié au stationnement pour près de 1,400 véhicules.
Une vraie passe d’armes
Paul Bérenger visiblement pas satisfait renchérira “have you been there to look at the number of hawkers, people cooking food in front of cyber buildings, all over the place, bus stops, you cannot drive through once the bus starts in a road. And the filth between the Cybercity and Rose Hill, the grass is never cut! People throw things all over the place. It is filthy. When is that going to stop that filth and this disorder?”
Le ministre a alors parlé de la période 2000-2005 et du manque de planification, ce qui a provoqué un véritable tollé dans les travées de l’opposition nécessitant de fréquentes interventions du Deputy Speaker, Pradeep Peetumber. Toujours est-il que Tassarajen Pillay-Chedumbrum a annoncé qu’un dispositif est mis en place pour mettre de l’ordre et décongestionner la cybercité.
Deux autres ministres ont connu le même sort, Rajesh Jeetah et Hervé Aimée, le premier sur le dossier de l’enseignement supérieur, à telle enseigne qu’un député de l’opposition, mécontent que le ministre revienne sur la période 2000-2005 au lieu de parler du chaos actuel, lui a lancé : “Nou fine réserv enn la chambre pou toi à l’Hôtel Melrose!”, ce qui a suscité des ricanements de part et d’autre et même jusque dans les rangs du gouvernement.
Hervé Aimée sur le gril
Hervé Aimée a été, lui, confronté aux tirs croisés de l’opposition sur le retard mis à doter Agaléga d’une piste d’atterrissage. Il a tellement été mis sur le gril qu’il a, à un moment, évoqué le recours au service des pompes à incendie “pu teigne défié lopozisyon”, ce qui a envenimé la situation et poussé le Deputy Speaker à intervenir. C’est peut-être de ça qu’il a été question lors de cet aparté entre Navin Ramgoolam et son ministre des Administrations régionales.
Deux textes ont aussi été adoptés lors de cette séance. Il s’agit du Professionnal Land Surveyor’s Council Bill, présenté par le ministre des Terres et du Logement, Abu Kasenally et le Mauritius Cane Industry Authority (Amendment) Bill.
Pléthore d’interventions à l’ajournement des travaux, les députés ayant eu vent des vacances prolongées jusqu’au 7 octobre. Alan Ganoo a évoqué le tragique accident qui le jour même avait coûté la vie à l’ouvrier Jacques Prophyre sur le chantier de la SSS Goodlands, tandis que Rajesh Bhagwan a attiré l’attention sur un problème de traitement des eaux usées au lieu dit Verger Bissambar dans la région de Mont Roches.
Autres intervenants, Reza Uteem qui a évoqué un problème de mur à la Rue St-John à Port-Louis, Veda Baloomoody qui s’est élevé contre la hausse des frais légaux qui risque d’être préjudiciable aux justiciables qui n’ont pas de moyens, alors que le Premier ministre a, dans sa réponse, indiqué, que la dernière révision remonte à 2000, soit 14 ans et qu’il appartiendra au Chef Juge de se pencher sur ce dossier.
Françoise Labelle est revenue sur les nombreux problèmes auquel est confrontée la Tertiary Education Commission, son collègue Joe Lesjongard sur un problème d’eaux usées au Morcellement Goolamally, Franco Quirin sur les heures d’ouverture des centres de jeunesse, Josique Radegonde-Haines sur les difficultés d’approvisionnement en eau à Mon-Choisy, Baie-du-Cap, et au phénomène de glissement de terrain à Chamarel.
Pour clore cet item, Satish Boolell qui a suggéré que des feux soient installés tant à la route royale à Forest Side, qu’à la hauteur de la jonction de Frédéric Bonnefin, Stéphanie Anquetil qui a plaidé pour que la gestion du complexe sportif de Glen Park soit confiée à la municipalité de Vacoas/Phoenix et Maya Hanoomanjee sur la relogement des habitants de la Rivière-des-Galets.
Rendez-vous est donc pris pour le 7 octobre. A moins que d’ici là, il n’y a plus d’Assemblée nationale pour cause de dissolution et d’organisation d’élections avant la fin de l’année. Mais rien n’est moins sûr.

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