ÉCONOMIE ET FINANCES : Un mois de mars chaud sur le front des prix

Le front des prix à la consommation, qui a connu un léger répit ces derniers temps, s’annonce chaud pour le mois de mars avec des répercussions anticipées sur la hausse de l’indice du coût de la vie (CPI). Ainsi, lors de sa réunion vendredi, le Petrol Pricing Committee (PPC) a entériné sa première hausse de prix des produits pétroliers depuis son institution il y a deux ans. Désormais, le litre de super est vendu 6% plus cher dans les stations-service, soit à Rs 52.25, alors que le litre de diesel est fixé à Rs 43.95 (+6,7%). Cette majoration des prix du carburant intervient dans un contexte quelque peu difficile pour les ménages, vu la flambée des prix des légumes frais sur les étals du marché ou encore la hausse moyenne de 8% des frais d’examens de School Certificate (SC) et de Higher School Certificate (HSC), payables au cours du mois de mars principalement. Comme pour mieux démontrer la pression des prix sur le porte-monnaie de la ménagère, la dernière édition du Financial Stability Report de la Banque de Maurice, publiée également vendredi, confirme la nette progression des crédits bancaires à la consommation ménagère en 2012 comparativement à 2011, et des risques du maintien de la tendance cette année.
Justifiant la majoration des prix du carburant, la State Trading Corporation (STC) met l’accent sur l’évolution à la hausse du cours du baril de pétrole sur le marché mondial. De 2010 à 2012, le prix Platts de l’essence (référence mondiale) est passé de $ 729 la tonne à $ 1 021 en 3012 (+40%), alors que celui du diesel a augmenté de 88 dollars le baril à 126 dollars, soit + 43%, au cours de la même période.
Face à cette situation, la caisse de stabilisation (Price Stabilisation Account) de la STC n’était plus en mesure de fonctionner, d’où la décision de revoir à la hausse les prix pétroliers. En vue de réduire au minimum les risques de controverse autour de ces nouveaux prix, la STC, avec l’aval du gouvernement, a pris la décision de faire abstraction des prélèvements dans les prix pétroliers pour financer le trou creusé par la Hedging Saga de juillet 2008. Les prix en vigueur ne comprennent plus la contribution imposée de Re 1.25 par litre d’essence et d’une roupie par litre de diesel pour recouvrer les dettes de plus de Rs 4 milliards suite au scandale du Hedging.
Néanmoins, la structure des prix des produits pétroliers montre une différence de Rs 25 et de Rs 16.21 entre les prix CIF et ceux à la pompe pour l’essence et le diesel respectivement. Le principal bénéficiaire de cette « manne » sur les prix des produits pétroliers demeure le ministère des Finances (voir tableau de la structure des prix plus loin). La facture des importations pétrolières a crevé la barre des Rs 30 milliards l’année dernière, soit Rs 3 milliards de plus qu’en 2011.
Sur chaque litre d’essence vendu en station-service, une somme de Rs 10.80 est perçue sous forme d’Excise Duty et de Rs 6.82 pour la Taxe à la Valeur Ajoutée (TVA) de 15%. Pour le diesel, le litre consommé rapporte aux caisses de l’État Rs 3.30 au titre de l’Excise Duty et Rs 5.73 pour la TVA.
Avec une consommation estimée annuellement à 140 millions de litres d’essence et de 290 millions de litres de diesel, le ministère des Finances s’approprie une somme globale de Rs 5 milliards. La Road Development Authority (RDA), organisme qui se retrouve au centre des controverses avec l’allocation d’importants contrats d’infrastructure routière, est subventionnée à hauteur de Rs 700 millions, avec une ponction de Re 1.85 sur le prix de chaque litre d’essence et de Re 1.75 sur chaque litre de mazout.
Les automobilistes contribuent chaque année une somme de Rs 665 millions au budget des subsides sur les prix de vente au détail du gaz ménager, du riz et de la farine, soit une contribution uniforme de Re 1.50 sur chaque litre de produits pétroliers livré aux stations-service de l’île.
Révision des tarifs d’autobus
D’autre part, les compagnies pétrolières ont vu leurs allocations pour des opérations revues à la hausse depuis ce week-end. Dorénavant, elles perçoivent Re 1.82 par litre d’essence contre Re 1.47 auparavant, et Re 1.67 contre Re 1.42 par litre de diesel. « Ces frais opérationnels des compagnies pétrolières sont restés inchangés depuis 2008 et cette augmentation vise à encourager des investissements dans les infrastructures », soutient la STC.
Avec l’entrée en vigueur des nouveaux prix des produits pétroliers, les opérateurs dans le domaine du transport public se sont mis à revoir leurs chiffres car une hausse de 6,7% du prix de mazout constitue un paramètre d’opération non-négligeable. Les effets se feront davantage dans le secteur du convoyage où aucune formule de compensation n’est en vigueur.
Si pour les trajets en taxi, les conditions du marché restent le facteur crucial (voir réactions plus loin), dans le transport en commun, les responsables des compagnies d’autobus et les opérateurs individuels envisagent d’approcher le ministère de l’Infrastructure publique et la National Transport Authority (NTA) pour obtenir une nouvelle révision des tarifs d’autobus, dont le dernier exercice remonte à un peu plus d’une année. Des consultations devront être initiées dans les jours à venir en vue d’élaborer une plateforme commune des compagnies d’autobus pour améliorer le seuil de profitabilité dans ce secteur.
Entre-temps, les ménages continuent à subir la pression de la montée des prix. Les récentes pluies diluviennes ont débouché sur une véritable cascade sur les prix des légumes sur le marché (voir plus loin la mercuriale au Marché Central hier matin). L’arrivée ce week-end des premières cargaisons de légumes, dont l’importation a été autorisée par le ministère de l’Agro-Industrie après les dégâts des cultures vivrières évalués à 30%, devrait augmenter l’offre sans toutefois alléger le niveau des prix. Des habitués affirment qu’il faudra s’attendre à des prix de légumes littéralement hors de portée pour une grande majorité de consommateurs avec ces importations.
SC/HSC : Hausse de Rs 600
Mais à peine le « curry » de chaque jour consommé, le chef de famille se voit confronté à une autre augmentation spécifique au mois de mars. Les familles avec des enfants prenant part à des examens de Cambridge cette année, soit pour le School Certificate (SC) ou le Higher School Certificate (HSC), doivent prévoir des frais en hausse de l’ordre de 8%.
Toujours à la fin de la semaine écoulée, le Mauritius Examinations Syndicate a communiqué aux différents établissements scolaires le barème des frais d’examens en tenant en ligne de compte les tarifs imposés par le Cambridge Examinations Syndicate et le taux de change de la livre sterling. Comparativement à l’année dernière, les Examination Fees sont en hausse de Rs 600.
Pour un étudiant prenant le minimum de six matières au SC cette année, les frais réclamés sont de Rs 8 064, contre Rs 7 468 l’année dernière. Pour des étudiants prenant part aux examens dans sept matières, il faudra prévoir Rs 9 174 contre Rs 8 495 en 2012, et dans huit, Rs 10 284 contre Rs 9 522.
Pour les examens de Higher School Certificate, l’étudiant concourant pour trois matières principales, le General Paper et un sujet subsidiaire, les fees se montent à Rs 11 357 contre Rs 10 520 l’année dernière. Ceux préférant le strict minimum de trois matières principales devront s’acquitter de Rs 8 175 contre Rs 7 576 l’année dernière, alors que pour les trois Main Subjects et le General Paper, les frais d’entrée sont Rs 8 175, soit Rs 599 de plus que l’année dernière.
De ce fait, la conjugaison des effets de ces majorations de prix devront se faire sentir sur le coût du panier de la ménagère à la fin de ce mois. À ce stade, il serait prématuré de tenter de faire une évaluation des répercussions sur l’indice du coût de la vie, donnant raison à la Banque de Maurice, qui ne cesse de tirer la sonnette d’alarme sur les risques d’une reprise de l’inflation.
« Continuous monitoring »
Ce n’est nullement un hasard si, dans le dernier Financial Stability Report, la Banque de Maurice fait état de la nécessité d’un « monitoring » systématique de l’évolution des crédits bancaires à la consommation ménagère. Les données disponibles officiellement indiquent qu’à la fin de septembre de l’année dernière, le « credit for consumption purposes » avait augmenté de 13,4% en une année, soit presque le double par rapport à la période correspondante en 2011.
« Of this, credit card facilities were marginal, representing only 7,6% of total consumption loans as at end-September 2012. In general, the growth in consumption loans appears to have supported nominal household expenditure », souligne la Banque de Maurice qui appréhende le fait que cette tendance à des crédits bancaires ménagers s’accentuera davantage en 2013, compte tenu des conditions prévalant sur le marché.
La Banque de Maurice confirme que les crédits bancaires aux ménages ont enregistré une nette croissance au cours de ces dernières années. « With growth hovering at an annual average of 16% over the past two years, the level of household credit in the domestic economy reached 19,4% of GDP as at end of September 2012 », note ce rapport, qui fait état d’une décélération des prêts-logements au cours de ces cinq dernières années.
Même si la Banque Centrale concède que les ménages sont en mesure d’assurer le remboursement de ces crédits bancaires, une surveillance systématique s’impose pour éviter tout dérapage potentiel. « Although this sector warrants continuous monitoring, the likelihood of a most adverse scenario whereby economic conditions weaken significantly, with sharp reductions in household income and employment, seems limited in the current context », soutient la Banque de Maurice.
Ces facteurs tendent à confirmer que le front des prix à la consommation courante devrait traverser une zone de turbulence au cours du mois de mars du moins…

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