Sus aux idées reçues !

À moins que vous n’habitiez dans une grotte, vous le savez forcément : la lutte contre le changement climatique passe par une réduction de nos émissions de gaz à effet de serre (GES). Si cette cause est entendue, en revanche, il existe un certain nombre d’idées reçues qu’il faut absolument briser. À commencer par celle liée aux sources polluantes d’origine anthropique, et que l’on pense injustement dominées par l’industrie du transport. Certes, ce secteur est l’un des principaux émetteurs de GES (le transport routier et maritime en tête), mais il n’est pas le premier, cette place étant en effet occupée par la production d’énergie et d’électricité. De plus, on a tendance à oublier d’autres secteurs d’activité tout aussi dévastateurs, comme l’agriculture, l’élevage et la production textile.

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Une autre idée reçue – reprise par les industriels autant que par l’appareil politique – concerne la préservation de nos forêts, ce qui nous garantirait, pense-t-on, de réduire notre empreinte carbone. Les arbres, ou du moins leur feuillage, transforment en effet le CO2 en oxygène par un processus (la photosynthèse) connu de tous, car mentionné dans les manuels scolaires du monde entier. Aussi croit-on qu’il suffirait de repeupler nos forêts ou de créer de nouveaux espaces verts pour endiguer le phénomène climatique. Ce qui est hélas faux, car le pouvoir d’absorption de CO2 des arbres se réduit davantage au fur et à mesure que la planète se réchauffe.

D’autres, eux, ont tendance à se focaliser sur le seul CO2 pour justifier la surchauffe de la surface de la planète. Ce qui, là encore, est totalement erroné. Car on devrait y ajouter le méthane (dont chaque molécule a un pouvoir réchauffant 28 fois supérieur au CO2), le protoxyde d’azote (273 fois), les gaz fluorés (7 380 fois), le trifluorure d’azote (17 400 fois) ou encore l’hexafluorure de soufre (25 200 fois). Sans compter les GES dits « naturels », comme… la vapeur d’eau (H2O), créée par l’évaporation de l’eau et qui, du fait du réchauffement, se fait toujours plus présente dans l’atmosphère. Et l’on ne parle pas des GES industriels qui, bien qu’ayant vu leur limitation légiférée, restent malgré tout encore bien présents dans nos chaînes de production.

D’autres encore pensent que l’on trouvera la « recette magique » permettant de stocker le CO2 de l’atmosphère, nous permettant dès lors de pouvoir poursuivre notre route sans trop nous soucier de nos émissions de GES. Ce qui, assurément, serait une erreur. D’autant que nous sommes loin de pouvoir recourir à ces fameuses recettes magiques.

D’abord parce que celles aujourd’hui connues sont extrêmement coûteuses, et constituent autant de sources polluantes pour les mettre en place. En outre, que l’on capture nos émissions directement à la sortie de cheminées d’usine, dans la haute atmosphère, dans les océans ou dans nos sols, ces technologies prendront trop de temps pour être mises au point et déployées aux quatre coins de la planète, nous éloignant chaque jour un peu plus de nos objectifs durables.

Enfin, nous avons tendance à ignorer les menaces invisibles, et davantage encore lorsque ces menaces s’échelonnent sur plusieurs années et décennies. Ce qui est le cas du changement climatique qui, s’il est tout aussi invisible qu’un virus, n’affecte pas nos existences avec la même célérité. De fait, la fonte des glaces ne constitue, dans l’imaginaire collectif, qu’un problème relativement mineur. Certes, les eaux montent, mais cette montée reste trop peu significative que pour nous interpeller. Autant dire que la fonte du permafrost est, à ce titre, le cadet de nos soucis. Or, ce phénomène est bien plus grave qu’il n’y paraît, car sous le permafrost se cachent des rivières de méthane qui, une fois libérées, pourraient bien précipiter l’emballement climatique, et signifier de facto notre arrêt de mort et celui du reste du vivant.

Autant d’idées reçues, donc, qui nous font perdre de vue la gravité de la situation. Or, banaliser pareille menace que le changement climatique peut s’avérer extrêmement dangereux. Minimiser notre implication dans le dérèglement du climat, se dédouanant de toute responsabilité, croire que nos têtes pensantes trouveront bien un moyen de nous « sortir de là » et ignorer le danger, malgré les avertissements, ne nous sauvera pas. Bien au contraire. Lorsque notre maison se transformera en fournaise, ce sera par insouciance, mais aussi en partie par ignorance.

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