AGALÉGA—FINANCEMENT INDIEN—DES VOIX CITOYENNES: « Rann piblik MoU l’Inde-Maurice »

Depuis quelques jours, des voix citoyennes s’intéressent à l’aide financière indienne pour plusieurs projets majeurs à Agaléga, dont une piste d’atterrissage et une jetée. C’était au tour des participants à un forum-débat hier soir à Rose-Hill de relever plusieurs zones d’ombre entourant ces projets et de demander au gouvernement de rendre public l’accord (Memorandum of Understanding) signé par les deux parties. Des Agaléens présents à cette rencontre ont clairement fait comprendre « ne pas être contre le développement », mais « souhaitent en être partie prenante en ayant toutes les données ». Le Collectif Citoyens Agaléga réclame lui aussi la publication de ce document.
Le forum débat d’hier soir, axé sur le thème « Agalega : défis actuels et à venir », s’insérait dans le programme de rencontres intitulé « Mauriciens, ensemble » qu’organise mensuellement la communauté des Jésuites depuis plus d’une année. Une trentaine de personnes, dont plusieurs connaissent bien l’archipel, ont participé à ces discussions, tenues à la Salle Saint Ignace à Rose-Hill. Des natifs, des fréquents visiteurs, des travailleurs, d’anciens enseignants du primaire et une ancienne députée y ont apporté leurs témoignages de la vie à Agaléga.
À travers une collection de photos prises lors de son séjour à Agaléga à la fin de l’année dernière, le père Jacques-Henri David a fait une présentation de l’archipel en guise d’introduction à la soirée. Sans discours soporifique et sur un ton plaisant, l’intervenant a cerné presque tous les aspects de la vie de l’île en invitant de temps à autre ceux qui sont familiers à l’endroit d’y apporter quelques infos supplémentaires.
Par la suite, l’intérêt des Indiens pour la construction de la piste d’atterrissage et de la jetée a dominé les discussions. Il y a eu beaucoup de questionnements sur la longueur exacte et la superficie de la piste d’atterrissage en raison du manque d’informations, donnant lieu à différentes supputations dans plusieurs milieux depuis quelque temps. « Ena pe dir ki li pou 1,5 km, le zot pe koz 2,5 km ek nou finn tann osi 3 km. Nou tann dir ki pou ena osi bann “restricted area”. Ki kantite later pou pran pou konstrir sa lapis-la ? » ont questionné plusieurs participants en soulignant que « l’archipel d’Agaléga appartient à tous les habitants de la République de Maurice ». Selon ces intervenants, le fait de dire qu’Agaléga « n’appartiendra jamais à l’Inde ou autre puissance n’apaisera pas les appréhensions qui redoublent depuis quelques jours », et ce, aussi longtemps que le contenu de l’accord « restera secret ». « Bizin ena transparans ek gouvernman bizin rann piblik MoU ki finn signe pou ki nou kone ki ena ladan », ont réitéré les participants au débat. « Si pena nanryen de grav ladan kifer pa rann sa dokiman-la piblik ? »
Le nombre réduit d’habitants permanents dans l’archipel a aussi été évoqué. Selon des natifs d’Agaléga présents à cette soirée, dans les années 1970 il y avait environ sur les deux îles un total de 2 000 à 2 500 résidents. Aujourd’hui, il y en a seulement 300 et le Père David a maintenu hier soir la réflexion qu’il a faite il y a quelque temps portant sur le dépeuplement à venir de l’archipel. Selon le prêtre, cette diminution du nombre d’habitants est une indication que le processus de « vider Agaléga de ses habitants a été enclenché d’une manière subtile ». « Se enn desizion kalkile. Dousman Dousman pou fer zot ale », a-t-il affirmé.
Relevons le témoignage d’un Agaléen d’une trentaine d’années en visite à Maurice et qui repart dans quelques jours chez lui, au sujet des sentiments dans l’archipel sur la controverse autour du financement du gouvernement indien. « Nou pa kont developman parski ena enn soif developman dan lil », a-t-il souligné. Mais selon son constat, « bann abitan bien partaze lor tou se ki pe dir dan Moris ». « Nou fer parti de la Republique de Maurice e nou suiv bann diskision ki pe deroule. Ena sertenn dimounn dakor ki bann etranze vini pou amen developman me ena boukou abitant ki per ki atansion fer zot kit lil e ki zot pa kapav profit developman ki pe rod amene », raconte Angelin Laurence. D’où la demande des Agaléens pour la publication du protocole d’accord. « Nou pa kone ki kapav ariv nou », explique-t-il. Si une éventuelle présence indienne inquiète les habitants, c’est parce qu’un bateau militaire indien accoste l’île au moins une fois par mois pour des patrouilles. Les officiers militaires profitent de ce séjour pour faire des tests médicaux sur les Agaléens.
Par ailleurs, des membres du Collectif Citoyens Agaléga, formé il y a quelques jours, ont insisté hier soir sur l’importance de la publication de l’accord entre les deux pays. Ce collectif lance un appel aux Mauriciens à se joindre à lui dans ce combat en faveur d’Agaléga et de ses habitants. « Ce collectif est ouvert à tous les Mauriciens qui veulent de la transparence sur l’aide indienne concernant les projets à Agaléga », explique Laval Soopramanien, dirigeant de l’Association les amis d’Agaléga et membre de l’OIDC.

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