CONTES : Il était une fois Perrault

Charles Perrault transforme le conte populaire en réalisant des chefs-d’oeuvre de la littérature universelle et sauve de l’oubli des récits traditionnels, aujourd’hui célébrissimes. La postérité lui doit, entre autres, Barbe Bleue, La belle au bois dormant, Cendrillon, Le chat botté, Peau d’Âne, Le Petit Poucet et Le petit chaperon rouge. Ce magicien des mots est né 12 janvier 1628 à Paris.
Le goût du merveilleux et de la féerie est révélateur de l’état d’esprit qui règne à la cour de Louis XIV. Le conte devient le genre à la mode et nombreuses sont les publications. L’univers des contes envahit celui du théâtre. Le dix-septième siècle est le siècle des moralisateurs. Molière ou La Fontaine mettent le divertissement au service de la morale.
Les oeuvres littéraires revendiquent un but didactique et sont autant d’occasions d’interroger le lecteur sur ses comportements, voire sur la société. Les contes de Perrault s’inscrivent dans cette démarche : non seulement parce qu’il ajoute aux contes des moralités, mais parce que les contes sont au service de l’éducation des enfants. En transposant à l’écrit des récits qui jusque-là appartenaient à la tradition orale, en donnant à des “balivernes” le statut d’oeuvre littéraire.
Littérature orale.
Charles Perrault revendique le droit d’existence d’une littérature d’un genre nouveau. Il veut démontrer que la littérature dite “populaire” est digne d’intérêt.
Ces récits sont issus de la tradition populaire orale, et nourris en partie de l’imaginaire médiéval légendaire, chevaleresque. Leur publication sert le combat que mène Perrault en faveur des Modernes. Par leur style simple et naïf, Perrault consacre ainsi le genre littéraire des contes de fées, récits appartenant au genre merveilleux et fondés sur un schéma narratif immuable.
La prétendue destination des contes aux enfants par des moralités rajoutées après chaque histoire pour expliquer les valeurs illustrées, est une subversion du genre. Issus du folklore français, les contes adaptés littérairement par Perrault n’appartiennent aucunement à la littérature enfantine, mais à une littérature orale, mouvante, destinée aux adultes des communautés villageoises, faits pour être lus le soir, à la veillée.
 
Adaptation.
Le passage des contes à la culture de salon du XVIIe siècle, implique pour Perrault un processus de transformation. Le petit chaperon rouge des versions orales dévorait la chair de sa mère-grand et s’abreuvait de son sang. Cendrillon jetait du sel dans la cendre en faisant croire qu’elle avait des poux pour qu’elle puisse être tranquille. Les contes de Perrault sont le résultat d’une censure assez nette de tous les éléments et des motifs qui, dans la version originale, peuvent choquer.
Perrault ne se contente pas de retrancher ce que les contes pouvaient avoir de vulgaire. Il transforme le récit et l’adapte à la société de son temps, ajoutant des glaces et des parquets au logis de Cendrillon, restituant l’action du Petit Poucet à l’époque de la grande famine de 1693. Il les teinte d’un humour spirituel, agrémente le récit de plaisanteries destinées à ne pas prendre le merveilleux des contes trop au sérieux, déclarant par exemple que l’ogresse de La Belle au bois dormant veut manger la petite Aurore à la sauce Robert.
 
Transformation.
Il adapte son style pour rappeler l’origine orale des contes et leur vivacité, en utilisant le dialogue, le présent de narration ou le jeu des formulettes, comme dans Barbe Bleue : “Anne ma soeur Anne, ne vois-tu rien venir ?” ou dans Le petit chaperon rouge : “Ma mère-grand, comme vous avez de grands bras”. Perrault transforme le conte populaire, en réalisant un des chefs-d’oeuvre de la littérature universelle et sauve de l’oubli huit récits traditionnels, aujourd’hui encore célébrissimes : Riquet à la houppe, La belle au bois dormant, Le Petit chaperon rouge, Barbe Bleue, Cendrillon ou La petite pantoufle de vair, Le Maître Chat ou Le chat botté, le Petit Poucet, Les Fées.
Charles Perrault est pourtant le plus méconnu des classiques : très peu connaissent sa version des contes. Chez Perrault, le Petit chaperon rouge et sa grand-mère finissent mangées par le loup; la version postérieure où le chasseur les sort du ventre est de Grimm. De même, c’est dans Disney que le baiser du prince réveille la belle au bois dormant; chez Perrault, elle se réveille toute seule.
La postérité a préféré ne garder ce que cet homme de lettres appelait le “conte tout sec”, oubliant les moralités. L’essentiel du travail effectué consiste en la collecte et la retranscription de contes issus de la tradition orale française.

- Publicité -
EN CONTINU

l'édition du jour

- Publicité -