RELIGION ET SOCIÉTÉ — L’Église se dit interpellée par la crise écologique

Le cardinal Piat, dans son mandement de carême: « Sous la pression des lobbies financiers et des échéances électorales, les politiques ont beaucoup de difficultés à prendre des engagements »

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Le cardinal Maurice Piat, évêque de Port-Louis, affirme que l’Église, dans son ensemble, se dit interpellée par la crise écologique. C’est ce qui ressort d’un des volets du mandement de carême chrétien, rendu public lors d’un point de presse dans la matinée. Dans l’autre partie de la traditionnelle lettre pastorale, il met l’accent sur la « vocation missionnaire » de l’Église dans le monde aujourd’hui en soulignant qu’« Une Église repliée sur elle-même se rendra vite compte qu’elle est malade ».

L’évêque de Port-Louis a voulu porter un message fort sur la question de la protection de l’environnement pour le bien-être de tout un chacun. Il rappelle également aux décideurs politiques et autres leur engagement à adopter des mesures à long terme pour lutter contre le phénomène du rechauffement climatique. « Le monde où nous vivons est très affecté par la crise écologique, dont les effets se font sentir de plus en plus. Une crise n’est pas seulement source de difficultés, mais aussi une opportunité pour un nouveau discernement et une créativité nouvelle. Elle interpelle les politiques qui, sous la pression des lobbies financiers et des échéances électorales rapprochées, ont beaucoup de difficulté à prendre des engagements sur le long terme et à les tenir. Et pendant ce temps, la planète continue à se réchauffer », s’est-il appesanti.

Et ce n’est pas seulement les politiques qui sont ciblés par le cardinal Piat dans la conjoncture. Il poursuit : « La crise écologique interpelle aussi les industriels, les entrepreneurs et les institutions financières. Beaucoup d’entre eux, et non des moindres, s’interrogent sur la viabilité à long terme du style de développement économique sur lequel nous sommes engagés. Ils se rendent compte que ce modèle de développement est de moins en moins inclusif. Tout en assurant une certaine croissance, il produit des inégalités et pas mal de chômage. Il n’arrive pas non plus à réduire suffisamment la production de gaz à effet de serre qui contribue à réchauffer la planète. Certains, y compris chez nous, commencent à proposer un changement de paradigme qui permettrait d’ouvrir de nouvelles voies de développement économique plus inclusives et plus soucieuses de protéger la viabilité de notre “maison commune”. ».

Plaçant le débat sur la crise écologique et ses répercussions politiques et économiques, le cardinal Piat situe le rôle de l’Église. « L’Église aussi se sent interpellée par cette crise écologique et ses répercussions politiques et économiques. Le défi missionnaire consiste à chercher de nouveaux chemins de concertation et de collaboration pour que « le développement économique ne se limite pas à produire plus de richesse, mais contribue à ce que la vie sociale devienne un espace de fraternité, de paix et de justice pour tous ».

L’évêque de Port-Louis conclura en faisant comprendre que « le combat écologique est un lieu de mission par excellence du troisième millénaire. L’humanité entière, menacée dans sa survie par le réchauffement climatique, est un terrain propice pour entendre une parole prophétique qui dénonce les responsabilités de l’homme dans la catastrophe écologique et annonce l’espérance de conversions nécessaires et d’actions possibles. Dites aux gens que leur vie et celle de leurs enfants sont menacées, et donnez-leur une parole et des actions d’espérance, et ils se mobiliseront avec vous et vous aurez une occasion d’annoncer un Évangile qui a un impact direct sur la vie ».

Au chapitre purement religieux, dans sa lettre pastorale pour le carême, qui démarre mercredi prochain, l’évêque de Port-Louis s’est aligné sur le thème de la « vocation missionnaire » de l’Église dans le monde aujourd’hui. Cette démarche fait écho à une invitation du pape François à tous les diocèses du monde pour « vivre un mois missionnaire extraordinaire » en octobre prochain.

« C’est donc ensemble que nos Églises de l’océan Indien accueillent cet appel du pape François, qui nous invite avec une certaine urgence ‘à sortir de son propre confort et à avoir le courage de rejoindre toutes les périphéries qui ont besoin de la lumière de l’Évangile’ ». Il convie tous les diocèses du monde à « passer d’une pastorale de simple conservation à une pastorale vraiment missionnaire », explique le cardinal Piat au sujet de cette demande du pape.

L’évêque de Port-Louis se permet de dresser un constat de la situation en se demandant:  « est-ce que l’Église à Maurice est «  en bonne santé missionnaire » ? Pour trouver les réponses à cette question, le cardinal Piat invite toutes les composantes du diocèse de Port-Louis (paroisses, communautés religieuses et autres organisations diocésaines) à « entrer avec confiance dans un exercice de discernement missionnaire » et à accorder du temps à cet exercice, en leur proposant quelques questions pour le mener à bien.

L’évêque encourage ainsi les catholiques « à être disciples missionnaires », en citant l’exemple du père Laval, reconnu de tous les Mauriciens. « Qu’avons-nous fait de l’héritage du père Laval ? Nous connaissons l’unique photo qu’il a laissée de lui, debout, nous montrant la croix du Christ. La mission a été pour lui une passion pour le Christ, mais aussi une passion pour le peuple mauricien. » 

Au chapitre consacré aux “Défis des disciples missionnaires”, le cardinal Piat mentionne les situations suivantes : le cas des « chrétiens qui ont décroché » des pratiques religieuses; les parents qui éprouvent des difficultés à transmettre la foi à leurs enfants et les jeunes plongés dans ce qu’il qualifie « d’indifférence religieuse »; les familles « fragilisées par les séparations » et faisant face aux difficultés à gérer les conflits internes; les personnes vulnérables et « ayant recours à des pratiques superstitieuses pour chercher un soulagement »; la crise écologique dans la vie socio-économique; le « cri des pauvres »; ainsi que le nécessaire dialogue entre les personnes de différentes religions dans le pays multiculturel et multireligieux qu’est le nôtre.

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