Sur la route de Beau-Vallon des arbres sacrifiés…

“Nature is in its worst shape in human history”UN report May 06, 2019

- Publicité -

RAFAL (Royals & Friends Action Line)

Non ! Nous n’irons pas danser tout en rond sur la route de Beau-Vallon… Pas du tout ! Parce que si vous allez du côté de Mahébourg ces jours-ci vous constaterez sûrement avec amertume que, dans la région de Plaisance sur le chemin menant à Beau-Vallon, plusieurs de ces magnifiques arbres en bordure de route ont été sacrifiés sur l’autel du sacro-saint “développement”.

Photos : RAHEEM GOPAUL

Ces valeureux “vieux” arbres, qui ont pu résister aux insectes nuisibles et autres prédateurs ainsi qu’aux cyclones, sécheresses et autres intempéries, ont été abattus sans vergogne pour faire de la place, encore et toujours, au béton. Ces arbres n’ont pas su résister au plus dangereux des prédateurs, l’homme accapareur et égoïste.

Pourtant, c’est tout un écosystème qu’on a détruit en quelques heures, et ce, avec l’aval des autorités dit-on ! Cet écosystème terrestre a pris d’innombrables années pour se façonner et s’établir dans un dynamisme écologique avec ses arbres, oiseaux, abeilles, papillons, araignées, et bien d’autres organismes encore. Et cet écosystème, nous l’avons détruit en un tour de main !

Des années et des années, surtout pendant la période du Nouvel An, ces beaux arbres ont offert à nos yeux émerveillés les différentes couleurs chatoyantes de “grappes” de fleurs — des bouquets de fleurs qui s’entrelacent au sommet des branches — jaune des Cassia fistula, mauve des Jacarandas, rouge sang des flamboyants… Mais, la main de l’homme est passée par là avec sa tronçonneuse dévastatrice, ravageuse ! Adieu arbres, oiseaux, papillons….

Photos : RAHEEM GOPAUL

Il a été dit qu’on planterait d’autres arbres dans la région. Mais ceux-ci seront-ils aussi vigoureux que leurs aînés, auront-ils le même ADN, seront-ils de la même trempe ?

Et dire que Maurice est l’un des six pays du programme “Switch Africa Green”, projet pilote financé par l’Union européenne, pour aider certains pays d’Afrique (Burkina Faso, Ghana, Ouganda, Kenya, Afrique du Sud) à réaliser un développement durable en s’engageant en faveur d’une économie verte inclusive qui génère la croissance et des emplois décents. Au vu de ce qui se passe à travers le pays, avec toutes ces masses de béton qui suffoquent la nature, peut-on encore parler de Green Economy ? Il faudra être aveugle et sourd pour y croire !

Quand nous avons contacté Georges Ah-Yan, cet infatigable homme de terrain, qui milite pour la justice sociale, nous avons appris que ce massacre sur la route de Beau-Vallon a été fait « en catimini », tout comme dans le cas de la démolition de l’ancien bâtiment en bois — affectueusement connu comme La School — qui abritait jadis le Collège Royal de Port-Louis.

Photos : RAHEEM GOPAUL

Mondialisation et développement

Il semblerait que l’on mette un accent certain sur certains mots-clés comme « mondialisation », « investissement » ou encore « création d’emplois » pour faire avancer certains projets, même quand ceux-ci s’avèrent être néfastes pour l’environnement et la société en général. Pour une question de dollars, certains esprits malins n’hésitent pas à détruire notre patrimoine naturel. Ce sont des pourfendeurs de la Nature !

Pour essayer de convaincre tout un chacun qu’il faut absolument préserver pour les générations futures les quelques “vieux” arbres et les rares recoins de nature “sauvage” qu’il nous reste — que ce soit en bordure de route, au bord de mer ou ailleurs — nous avons pris la liberté de partager avec vos lecteurs ces quelques lignes qui parlent d’elles-mêmes :

(a) « We continue to cut down trees indiscriminately… It seems that we do not have the right policies and regulations in place to ensure that the global public good and services trees provide to our wider society is maintained for an improved environment and quality of life. Unfortunately, even when such regulations do exist their implementation and enforcement can be a big challenge. » (1)

(b) « Les vieux arbres sont les plus efficaces pour dépolluer l’atmosphère. Quand les élus annoncent qu’en échange d’un vieil arbre coupé ils en replantent 10 jeunes, c’est une arnaque : il faut attendre 25 ans pour que les 10 jeunes commencent à compenser l’activité épuratoire du vieux. » (2)

Malheureusement, les “grands” décideurs et autres “lumières” que nous avons à Maurice mettront l’accent sur le développement et la création d’emplois – comme d’habitude – quitte à effacer/raser les derniers vestiges de nature “sauvage” dans le pays. On a dit et on l’a répété ad nauseam que Maurice va devenir “un grand chantier”. C’est donc le béton qui primera partout, comme quoi on n’a pas suffisamment bétonné. Environmental Impact Assessment (E. I. A.) ? Ce concept est devenu une farce ! Tout comme le slogan « Maurice Ile Durable ». Des hôtels de plage, des villas de luxe pour milliardaires et des shopping malls poussent comme des champignons dans Paradise Island. Certaines mauvaises langues ironisent que “larzan pena loder”.

Photos : RAHEEM GOPAUL

Dans ce contexte, nous ferons bien de nous référer à un article de Saskia Sassen publié dans L’Atlas des Empires (3). Cette dame, professeure de sociologie à l’université Columbia (New York), est d’avis que la mondialisation a permis « la création d’une nouvelle géographie mondiale du pouvoir, avec ses règles et ses élites dirigeantes, qui transcende les frontières établies tout en produisant de nouvelles lignes de séparation à l’intérieur du territoire national ». Il est aussi question de ces « acquisitions massives de terres par des entreprises et des gouvernements dans des pays étrangers » ainsi que « des accords entre des associations internationales de grand banditisme ». L’auteure trouve que « la croissance rapide des propriétaires étrangers altère de manière significative les économies locales et réduit l’autorité souveraine de l’État sur son territoire ». Le résultat alors, c’est que les gouvernements eux-mêmes n’ont d’autre choix que de mettre en œuvre « une politique de dérégulation économique et de privatisation qui diminue leur pouvoir  ». Cercle vicieux, n’est-ce pas ?

Dans tout ce « galimatia » de la mondialisation, quelques riches familles de Paradise Island deviennent encore plus riches, pour ne pas dire super-riches, tandis que la grosse majorité des gens s’appauvrissent et doivent s’endetter pour vivre décemment. En fin de compte, c’est lepep qui est le grand perdant !

Références

(1) Forum Le Mauricien du 14 février 2018 :

Nature under threat | The Key Roles and Functions of Trees as a Global Public Good

by Ehsan Dulloo Ph. D. Conservation Biologist.

(2) Les Secrets des Arbres (page 10) : Hors-série La Vie, juin 2018

(3) L’Atlas des Empires (pages 152-153) : Hors-série LaVie-LeMonde, 2019 “L’émergence de zones de pouvoir parallèles” par Saskia Sassen.

- Publicité -
EN CONTINU

l'édition du jour