VERS LA FIN DU RAMADAN: Quand l’église et la mosquée vivent en “accorité” à Grand-Baie

« L’accorité… » C’est un mot que j’aurais bien intégré dans la nomenclature de mon plaisant dictionnaire évolutif de la francophonie, Le Pouvoir des mots sur le mouvoir des peaux. Tout comme la « doutance », doute à la mauricienne, qui est plus chargé que le doute d’ailleurs, et la « jalouserie », mot formé à partir du verbe jalouser, accolé d’un suffixe, tout simplement, et qui semble peser plus que toute jalousie au monde… Il font partie du vocable francophone qui demande à quitter l’orphelinat de mots que des dictionnaires laissent à la porte des académiciens. Mais revenons à ce mot qu’une situation exemplaire définit dans toute sa latitude : le signifiant « accorité ». Et c’est l’imam Mouazam qui me l’a rappelé, pour qualifier la nature des relations entre la mosquée et l’église de Grand-Baie, ancien village de pêcheurs au nord du pays, et maintenant, haut-lieu de villégiature et du shopping mauriciens.
En quittant la Pointe-aux-Cannoniers, après le temple tamoul coloré sur la gauche, et le bâtiment des garde-côtes, l’on perçoit une église en pierres brunes et noires, au toit en bois, ressemblant à deux becs d’oiseaux, ou deux proues de navire superposées, qui semblent voguer sur le bleu turquoise de la mer indienne. Nichée dans de grands arbres bordant des palmiers et bougainvillées en fleurs, avec une grande cour servant de parking, l’église semble bâtie comme une nef le long de la plage en sable blond. Tout près de l’église, une cour spacieuse, tapissée de gazon soigneusement tondue, abrite la cure et la résidence du prêtre, le père Goupille. On y ressent une sensation de grand espace, rehaussé par la mer si calme à deux pas.
De l’autre côté de la route, se trouve la mosquée, toute simple, de style indien, peinte en blanc, avec un petit dôme rond des constructions musulmanes influencées par l’art moghul, surmontés de minarets octogonaux, dont les arêtes sont bordées de vert. Le parking en bitume y est plus réduit, et durant le mois de jeûne du Ramadan, parfois l’espace pour garer les voitures des fidèles musulmans est réduit à une peau de chagrin, les autorités permettant que l’on se gare le long des routes, sans trop gêner la circulation, surtout pour les prières du Maghrib et du soir.
Les deux lieux de prières se font face, séparés par une route en courbe, menant vers le centre de Grand-Baie et son agitation coutumière. Mais ils sont liés par « l’accorité » qui caractérise leur proximité et leur désir de partage entre gens de foi et de bonne volonté.

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