Le temps politique

Alors que la majorité de la population a la tête dans les préparatifs en vue des fêtes de fin d’année, le pays entre de plain-pied dans un temps politique dominé par la campagne électorale. Que nous le voulions ou non, ce temps-là est indispensable et indissociable à toute démocratie, surtout que le gouvernement aborde l’année prochaine le dernier tournant de son mandat de cinq ans, qui prendra fin en novembre prochain.

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La politique partisane sera désormais présente dans toute chose. Personne n’est d’ailleurs dupe et sait très bien que toutes les décisions annoncées et prises, toutes les législations annoncées ou débattues, seront animées par une intention politique bien définie. À chaque déclaration annoncée et chaque projet énoncé, aussi bien par le gouvernement que par l’opposition, on sera tenté de se demander quels avantages politiques les auteurs veulent en tirer.

Nous entrons donc dans un temps où les promesses vont s’accumuler sans savoir combien d’entre elles prendront forme. C’est aussi le temps de l’immédiateté et des gains à court terme. Nous nous réjouissons actuellement des compensations généreuses annoncées pour l’année prochaine, la hausse conséquente du salaire minimum et autres faveurs annoncées dans tous les sens. Personne, sauf les employeurs du secteur privé, ne s’est opposé aux décisions gouvernementales. Aucun bénéficiaire ne s’est toutefois demandé si cette même générosité pourra être renouvelée l’année prochaine, alors que plusieurs économistes prévoient une flambée des prix.

Si le gouvernement dispose d’autant de moyens pour cette générosité à court terme, pourquoi les collèges secondaires privés, dont la vision est orientée sur l’avenir et le long terme des collégiens, doivent-ils se battre pour que les subsides qui leur sont accordés soient revus à la hausse ? Leurs propositions concernant l’élaboration de la Comprehensive Grant Formula ont, disent-ils, été tout simplement ignorées par les autorités. Les managers estiment que les conditions misent en place par la PSEA les empêchent d’offrir une éducation de qualité puisqu’ils ne pourront investir dans les infrastructures adéquates. Certains ont recours actuellement à une Judicial Review. Les problèmes ne correspondent-ils pas aux stratégies des partis au pouvoir dans le cadre de la campagne électorale ?

Il est difficile de pas placer la présentation du Financial Crime Commission Bill dans le cadre d’une stratégie politique bien calculée. Personne n’est contre les mesures prises pour lutter contre la corruption ou le blanchiment d’argent. Tout le monde sait que les yeux des institutions internationales sont tournés vers la mise en œuvre des décisions prises et annoncées par le gouvernement pour sortir avec succès de la liste grise du GAFI.

Mais le cadre légal proposé est assorti d’éléments qui risquent de porter atteintes aux droits fondamentaux, dont la séparation des pouvoirs ainsi que le droit à la vie privée, qui fait actuellement l’objet d’une enquête du Comité des droits humains, et dont le rapporteur pour Maurice était récemment dans l’île.

Des sérieux doutes sont exprimés non seulement dans le camp de l’opposition politique, mais aussi parmi les membres de la profession légale. Même le DPP a exprimé ses « serious concerns and réservations » à ce sujet. La crainte concernant le risque que ce texte de loi soit utilisé contre les opposants est loin d’être dissipée. Les arguments utilisés par le Premier ministre contre les leaders du Ptr et les autres partis relèvent davantage du financement des partis politiques que de la FCC. Aussi, pourquoi le gouvernement ne vient-il pas avec une loi sur le financement des partis politiques, qui forcerait tous les partis et leurs leaders à opérer dans la transparence ?

À l’heure où écrivons, nous ne savons sur quoi déboucheront les débats démocratiques sur ce texte de loi concernant le FCC à l’Assemblée nationale. Entre-temps, le texte de loi pousse l’opposition parlementaire et extraparlementaire vers un front commun.

Alors que le temps politique entre dans une phase critique avec l’intensification des discours partisans, d’annonces et de promesses alléchantes de part et d’autre, il est important de garder la tête froide afin de ne pas se laisser leurrer par les apparences et pour éviter de se laisser emporter par la passion et l’émotion. Il faudrait garder en tête la question qu’on entend de plus en plus dans beaucoup de familles : « Quel avenir préparons-nous pour nos enfants à Maurice ? »

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