S’adapter ou Abandonner

La Fédération mauricienne de kick-boxing et des disciplines assimilées devra se passer, dans deux semaines, d’un de ses tireurs à la Coupe du monde prévue en Turquie, et pas n’importe lequel. En effet, Warren Robertson, champion du monde juniors 2018, s’est fait un point d’honneur de se retirer de la sélection dimanche dernier pour une raison évidente, mais à la fois peu conventionnelle !

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Faute d’être en forme pour participer à cette compétition mondiale de très haut niveau, Warren Robertson a judicieusement, voire honnêtement et professionnellement, annoncé son retrait du groupe. Le fait d’avoir pris de l’emploi comme peintre depuis trois mois ayant sérieusement handicapé sa préparation.

Pourquoi donc Warren Robertson a eu à trouver un emploi, alors même qu’il est un athlète de haut niveau et bénéficie, par conséquent, d’une assistance financière de l’État ? La raison est toute simple. Sa bourse qui le situait dans la catégorie Mondiale, soit à hauteur de Rs 16 000 mensuellement en 2020, a été revue à la baisse en novembre !

Warren Robertson fait désormais partie de la catégorie inter-continentale et touche une allocation de Rs 9 750 comme c’était le cas fin 2021. Insuffisant pour subvenir à ses besoins personnels en 2023, le forçant ainsi à travailler, afin d’arrondir, à juste raison d’ailleurs, ses fins de mois.

“Assistance is reduced since the kickboxer has not produced any performance since November 2021”, faisait comprendre le HSLU dans son rapport de novembre. Une décision logique et somme toute compréhensible, d’autant qu’on ne cesse de marteler, semaine après semaine, que l’argent du contribuable ne peut et ne doit en aucun cas être jeté par les fenêtres. Même si le bureau du Directeur de l’Audit continue, lui, de dénoncer annuellement les gaspillages prévalant au sein de différents ministères et autres institutions gouvernementales !

Pour être éligible à recevoir une bourse, il faut aussi être régulier aux entraînements. Même si, à un moment donné en 2022, Warren Robertson était considéré à hauteur de Rs 12 000 en dépit du fait d’avoir été sur la touche en raison d’un accident de la route. Et ça, il est important de le préciser.

Sauf qu’une question fondamentale demeure. Peut-on réellement viser l’excellence avec une allocation mensuelle de Rs 12 000 ou moins ? Il ne faut pas non plus oublier qu’il y a des règles à respecter, notamment les résultats sportifs, mais aussi une moyenne minimum de 20h d’entraînement par semaine. Forcément, dans ces conditions, travailler devient problématique. Peut-on alors vivre de sa passion pour seulement Rs 12 000 ou moins ? Tout en étant conscient que l’entretien d’un sportif de haut niveau dépasse largement ce seuil dérisoire. Sans doute que le ministre des Sports, Stephan Toussaint, au même titre que certains de ses hauts cadres, n’a pas la réponse à cela. Eux qui ne jouent définitivement pas dans la même cour, n’est-ce pas ? Tout comme ceux qui sont grassement payés des deniers publics pour définir les contours de ce qu’ils appellent l’excellence. Mais qu’on peine cependant à comprendre en considérant les privilèges qui sont accordés à l’un et le manque de considération dont souffre l’autre !

Le cas de Warren Robertson devrait tous nous interpeller. À commencer par le ministre Toussaint et son leader et Premier ministre, Pravind Jugnauth. Eux qui sont toujours à cheval sur le dossier d’une population active et saine physiquement. Pravind Jugnauth ne déplorait-il pas, lui-même, lors de la semaine écoulée, le taux élevé de diabétiques, de personnes obèses ou encore ceux ayant un penchant pour l’alcool et la cigarette ? Comment alors inciter à un jeune à commencer par pratiquer une activité physique, alors qu’à l’échelle supérieure, certains ne sont même pas reconnus à leur juste valeur ? Ces mêmes sportifs que certains décrivent pourtant souvent comme des ambassadeurs !

La handisportive Noemi Alphonse en sait quelque chose. Elle qui avait, début février, vu sa bourse de haut niveau être injustement réduite de Rs 3 000, alors qu’elle était pourtant performante ! Il a fallu que Week-End tape du poing sur la table pour que certains bureaucrates se rendent compte de leur grosse bêtise. Certains critères imposés par la HLSU ne répondent définitivement pas au contexte et à la réalité pouvant justement favoriser nos athlètes à atteindre l’excellence. Et c’est justement là où le bât blesse. Là où certains ont surtout flanché en omettant de trouver ce juste milieu capable d’harmoniser la base et l’élite. Cela, en prenant en compte à quel point aussi certains éléments sensibles sont à même de nuire à la performance.

La décision de Warren Robertson de faire une croix sur la Coupe du monde en Turquie est un avertissement. Ce ne sera d’ailleurs ni la première et encore moins la dernière fois que le sport mauricien se retrouvera dans pareille situation. À moins d’une réaction responsable de la part de ceux concernés. Le sport de haut niveau, c’est tout un concept que malheureusement, les experts de notre politique sportive semblent ignorer. Du reste, avec les exigences imposées et la somme qui va avec, on doute fort que la formule attire toujours et qui plus est, dans un contexte économique compliqué. Sauf pour ceux qui pensent pouvoir viser l’excellence au petit bonheur.

 

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