Mahebourg — Georges Ah Yan (FCL) : « Des dérapages et une explosion sociale à craindre »

« Les pêcheurs sont inquiets. Ils se demandent comment ils vont joindre les deux bouts car ils doivent payer la location, les factures d’électricité, d’eau, des enfants à élever etc. » C’est ce que fait ressortir le travailleur social, Georges Ah Yan, président du Forum des Citoyens Libres (FCL) et habitant de Mahébourg. C’est pourquoi, ensemble avec les personnes affectées par le MV Wakashio, il cherche une rencontre avec les autorités. Sa crainte : que parvenus au terme de leurs maigres réserves, ceux dont la vie dépend de la mer « commettent des dérapages et occasionnent une explosion sociale ».

- Publicité -

« C’est la désolation et l’incertitude à Mahébourg », fait ressortir Georges Ah Yan, pour décrire l’état d’âme de la région suite au désastre laissé par le bateau japonais. « Tous les jours, des réunions de pêcheurs, de plaisanciers, de banians, d’opérateurs économiques ont lieu sans toutefois aboutir à rien de bien concret. »

Le stress était déjà présent chez ces personnes depuis la COVID-19 mais les dégâts du Wakashio sont venus enfoncer le clou, souligne le travailleur social. « Avant cet incident, les pêcheurs arrivaient encore à pêcher et les banians avaient du travail en dépit de la rareté des poissons. Les plaisanciers, eux, proposaient des virées à prix réduit. Ils arrivaient à sortir la tête hors de l’eau. »

Mais ce qui est source d’angoisse aujourd’hui pour les habitants de la région, « c’est qu’on a lu dans les journaux, c’est que pas avant deux ans la vie ne pourra reprendre son cours normal. » Et ajoutent-ils : « De même, ce n’est pas avant deux ans que l’on pourra consommer les poissons du sud. De fait, les gens ont maintenant peur de consommer du poisson. »

Toutes ces composantes de la société se sentent perdues d’autant qu’elles ne disposent pas des informations qu’elles aimeraient entendre pour mieux se projeter dans l’avenir. « Par exemple, ce n’est que dans un an que tout retournera à la normale et en attendant, les autorités nous apporteront leur soutien. ». Au lieu de tout cela, selon Georges Ah Yan, on voit de petites réunions par-ci et d’autres par-là. « Il n’y a pas une vision d’ensemble. Cela n’avancera à rien quand chaque groupe fait des démarches de son côté », déplore-t-il.
Les chauffeurs de taxi se retrouvent tout autant en détresse financière depuis qu’il n’y a pas de touristes. « Maintenant, on entend dire que c’est dangereux de se baigner dans ces eaux – je ne dis pas que c’est vrai – mais c’est aux autorités de venir de l’avant pour distinguer le vrai du faux. Quand les habitants ne reçoivent pas les informations qu’ils devraient avoir, ils commencent à spéculer, à courir à gauche et à droite… C’est là le problème », dit Georges Ah Yan.

N’étant pas en mesure de répondre aux interrogations des habitants, le FCL cherchera une rencontre avec le ministre de tutelle en vue « de savoir ce qu’on fera car l’assurance n’arrivera pas tout de suite, la mer a été souillée et les gens ne voudront peut-être pas manger nos poissons dans l’immédiat… comment faire pour vivre ?» Et d’ajouter : « Certains reçoivent Rs 800 par jour pour nettoyer la mer et une allocation de mauvais temps de Rs 465. Il est question que le gouvernement leur accorde un Minimum Wage de Rs 10 200. Mais les pêcheurs, eux, sont inquiets, se demandant comment ils vont joindre les deux bouts quand ils doivent payer la location, les factures d’électricité, d’eau, des enfants à élever etc. »

Le FCL ne manquera pas de participer à la marche du jour. « Nous irons exprimer notre colère par rapport au long délai qu’il y a eu avant de prendre des actions pour limiter les dégâts par le vraquier. Si dans les jours suivants, on avait pompé l’huile lourde, les pêcheurs auraient pu continuer de pêcher», dit-il.

Il souligne que si à Mahébourg, « on a su bloquer la pollution avec les bouées, à Bois-des-Amourettes et Grand-Port, c’est un désastre. » Car l’huile a pénétré dans les mangroves et les roches. Et il est difficile d’enlever le mazout. Il regrette que les autorités ne viennent pas dans ces régions affectées pour expliquer quelle est la situation et quels sont les plans de restauration.

« Certaines des personnes affectées ont quelques réserves mais une fois ces réserves épuisées, l’explosion sociale ne saura être contrôlée. Il y aura des dérapages. C’est là notre crainte. Nous voudrions que les autorités prennent les devants pour empêcher cela. »
Georges Ah Yan estime, par ailleurs, que les autorités devraient rencontrer tout le monde en même temps et non à travers des réunions séparées. « Ce que les autorités ne comprennent pas, c’est que les pêcheurs de Beau-Vallon, Rivière-des-Créoles, etc. sont d’une même région. Il faut rencontrer tout le monde en même temps. Parfois, il y a même des réunions sectaires ! »

- Publicité -
EN CONTINU

l'édition du jour

- Publicité -